Alain Huberty, co-fondateur de la galerie Huberty & Breyne : (…)


Vous ĂȘtes une nouvelle fois prĂ©sent Ă  la BRAFA et nous constatons que vous ĂȘtes le seul reprĂ©sentant de la BD. Que reprĂ©sente cet Ă©vĂšnement pour votre galerie ?
Alain Huberty : Que la bande dessinĂ©e trouve sa place en tant qu’art au milieu de tous les styles qui sont prĂ©sentĂ©s ici. C’était cela la consĂ©cration lorsque nous avons intĂ©grĂ© la BRAFA, que la BD soit acceptĂ©e en tant qu’art et c’est toujours le cas aujourd’hui, mĂȘme s’il est vrai qu’il n’y a plus beaucoup de galeries BD cette annĂ©e…
Il n’y a que vous, en fait.
Oui, c’est vrai que les autres galeries (Champaka et la Belgian Fine Comic Strip Gallery, NDLR) ont toutes arrĂȘtĂ© car il faut bien reconnaitre que les cinq ou six premiĂšres annĂ©es, ce n’était pas trĂšs rentable d’ĂȘtre prĂ©sent Ă  la BRAFA, mais c’était important d’ĂȘtre lĂ . C’est comme avec Christie’s. Au dĂ©but, nous gagnions beaucoup moins d’argent lorsque nous faisions les ventes aux enchĂšres avec Christie’s au lieu de faire les nĂŽtres. Mais sur le long terme, nous y avions gagnĂ© car en Ă©tant adossĂ© Ă  une institution telle que Christie’s, on a augmentĂ© la valeur de la BD sur le marchĂ© de l’art. Et c’est cela notre leitmotiv.

Cette année marque un changement dans le retour de la BRAFA puisque cet évÚnement a déménagé. Il a quitté le site de Tours & Taxi dans le centre-ville de Bruxelles pour rejoindre le Palais 12 du Heysel dans le nord de la ville. Etes-vous satisfait de ce déménagement ?
Et bien au niveau de l’amĂ©nagement de la foire, on ne voit pas trop la diffĂ©rence. Il manque peut-ĂȘtre un peu de fleurs mais pour le reste, on retrouve la BRAFA que l’on a toujours connue en terme de dĂ©coration et de scĂ©nographie : c’est Ă  dire douillet, feutrĂ©, trĂšs haut de gamme. AprĂšs, il y a la question de l’affluence qui se pose naturellement auprĂšs des organisateurs et des exposants, est-ce que le public nous suivra dans ce nouveau lieu ? On ne peut pas encore rĂ©pondre Ă  cette interrogation pour le moment mais vous savez, il y a 10-12 ans, le quartier de Tours & Taxi n’était pas trĂšs frĂ©quentable non plus. Donc, c’est vrai que d’un cĂŽtĂ© le site du Heysel, c’est excentrĂ©, c’est loin mais de l’autre cĂŽtĂ©, tout le monde connait le Heysel en Belgique.
Je pose la question car j’ai l’impression que votre stand est plus petit que d’habitude…
C’est exact et nous n’avions pas le choix en tant qu’exposant car les organisateurs ne savent pas encore si cette nouvelle Ă©dition de la BRAFA sera un succĂšs vu le dĂ©mĂ©nagement. Donc, les organisateurs n’ont pas voulu prendre de risques en louant un palais supplĂ©mentaire. Ce qui explique pourquoi nos stands ont perdu un tiers de leur surface habituelle.

Au niveau des artistes exposĂ©s sur votre stand, on retrouve les habituĂ©s : Avril, Geluck, Loustal,…
En effet, il y a les artistes que vous venez de citer. Il y a aussi Jean-Claude Götting et Miles Hyman dans les habituĂ©s. J’ai Ă©galement deux nouveaux artistes avec qui je suis content de collaborer, François Roca et Ever Meulen. Du coup ici, nous sommes dans le coin Vuitton dans lequel il aurait dĂ» y avoir des dessins de la ville de Rome rĂ©alisĂ©s par Miles Hyman, de Mexico rĂ©alisĂ©s par Nicolas de CrĂ©cy et Ever Meulen pour Bruxelles mais comme le stand est plus petit et que les dessins de Miles sont assez grands, je n’ai mis que des toiles de l’artiste franco-amĂ©ricain.
En dehors de la BRAFA, allez-vous assister à d’autres salons d’art durant ce second semestre 2022 ?
Avant la BRAFA, nous Ă©tions Ă  Drawing now et Art Paris mais d’ici la fin de l’annĂ©e, il n’y a rien de prĂ©vu pour le moment.
Ce que nous avons aussi prĂ©vu de faire, c’est de revenir Ă  nos bases. C’est Ă  dire que nous programmerons moins d’expositions mais qui durent plus longtemps. On s’est agrandi avec Les Arts dessinĂ©s afin de prĂ©senter des dessinateurs qui ne font pas forcĂ©ment de la BD. Nous allons aussi revenir sur des salons de BD tels qu’à AngoulĂȘme ou Ă  DeĂ»lĂ©mont, mais de maniĂšre plus rĂ©flĂ©chie car nous pensons proposer des fardes d’illustrations, des passes partout, de beaux cartels, etc.
Cette réorganisation est-elle due à la crise Covid-19 ?
Nous Ă©voluons au fur et Ă  mesure, c’est une rĂ©flexion constante. Nous avons des amis Ă  HEC auprĂšs de qui nous avons pris conseil, car nous nous sommes rendu compte que la galerie Huberty & Breyne a Ă©voluĂ©. Nous sommes passĂ©s de quatre personnes, dont un employĂ©, Ă  quinze employĂ©s en trĂšs peu de temps. Donc, nous avons les maladies des jeunesses des entreprises qui grandissent trop vite mais nous nous faisons aider car il ne faut pas oublier qu’à la base je suis professeur de mathĂ©matiques, je n’ai aucune formation pour gĂ©rer une Ă©quipe de quinze personnes. Je reconnais avoir fait beaucoup d’erreurs mais aujourd’hui, je me fais conseiller pour que chacun trouve sa place et que l’entreprise aille de l’avant.

La crise Covid-19 a-t-elle impacté la galerie ? Et si oui, de quelle maniÚre ?
Nous avons trĂšs bien vendu durant le Covid-19 grĂące Ă  notre magasin en ligne. Les confinements ont fait que les gens s’ennuyaient et pour se changer les idĂ©es, ils achetaient. Et la vente digitale est totalement intĂ©grĂ©e aujourd’hui dans notre mode de fonctionnement. Donc pour rĂ©pondre Ă  votre question : non, nous n’avons pas souffert de la crise Covid-19.
Quels seront les temps forts de la rentrée ?
À Bruxelles, depuis le 17 juin et jusqu’au 27 aout, nous proposons une exposition intitulĂ©e The Traveler, imaginĂ©e et orchestrĂ©e par David Merveille. À Paris, Ă  la galerie Huberty & Breyne – Matignon, nous organiserons une sorte de BRAFA au cours de laquelle nous prĂ©senterons des Ɠuvres d’artistes que nous dĂ©fendons.
La rentrĂ©e 2022 sera chaude car nous proposerons une exposition consacrĂ©e Ă  Claire BretĂ©cher Ă  Paris, ainsi qu’une expo Zep toujours Ă  Paris. À Bruxelles, nous proposerons une expo Marc-Antoine Mathieu, ainsi qu’une exposition intitulĂ©e “OnomatopĂ©e” qui reviendra sur un de mes amours de jeunesse qui consiste Ă  casser les arts. Cette expo sera dirigĂ©e par CĂ©cile Angelini et elle aura carte blanche pour crĂ©er cette exposition qui aura lieu en dĂ©cembre.
Des nouvelles de votre fille Elisa Huberty, travaillez-vous avec elle aujourd’hui ?
Elle a ouvert une galerie Ă  Bruxelles situĂ©e rue Blaes dans le quartier des Marolles. La galerie s’appelle « TWXS » pour that’s what x said et qui se positionne en tant que galerie d’art militante sur tout ce qui va de travers dans notre monde aujourd’hui. Il y a pas mal de jeunes qui sont trĂšs engagĂ©s sur les questions de l’écologie, des LGBTQIA+, de la grossophobie. Elisa Huberty partage ces valeurs d’égalitĂ© et elle fait sa part pour faire avancer les choses. TWXS est une partie de la galerie Huberty & Breyne mais dont je ne me mĂȘle pas car Elisa la gĂšre de A Ă  Z.
Je profite de l’occasion pour vous annoncer que mon associĂ© Marc Breyne a ouvert une nouvelle galerie. Je prĂ©cise que Marc et moi sommes toujours associĂ©s mais Ă  un moment, nos visions ont divergĂ©. Marc ne se plaisait plus au Chatelain car notre galerie bruxelloise correspond Ă  mon idĂ©al, c’est-Ă -dire un “white cube”, tandis que lui avait plus envie de revenir Ă  une sorte de “cabinet de curiositĂ©s”. Nous avons donc dĂ©cidĂ© ensemble d’ouvrir un nouvel espace de 150 mÂČ qui est aussi situĂ© rue Blaes mais au numĂ©ro 32. Sa galerie s’appelle “MARC by H&B” qu’il gĂšre seul, il fait ce qu’il veut, je n’interviens pas sur la programmation de sa galerie et lui n’intervient plus dans la galerie du ChĂątelain. Nous sommes chacun Ă  la tĂȘte d’une galerie qui fait partie du mĂȘme groupe mais avec deux visions diffĂ©rentes.
Donc, vous ĂȘtes toujours mariĂ©s mais vous avez des arrangements (rires) ! Et donc, tous ces changements ont eu lieu durant la pĂ©riode du Covid-19 ?
Quasiment, oui. Et il y a aussi la collaboration avec FrĂ©dĂ©ric Bosser qui correspond Ă  une envie qu’ont certains artistes d’exposer leurs Ɠuvres. LĂ , nous avons exposĂ© Pat AndrĂ©a, Ă  la rentrĂ©e ce sera au tour de GĂ©rard Garouste en septembre. Et la thĂ©matique c’est le dessin, le dessin qui vient de la BD ou de la BD pour enfants. Parce que nous nous sommes rendus compte que des artistes tels que Andrea ou Garouste ont leur galerie dans laquelle ils exposent leurs tableaux qui valent des fortunes, mais personne ne s’intĂ©resse Ă  leurs dessins, en fait ! Et lĂ , nous avons senti qu’il y a quelque chose d’intĂ©ressant Ă  faire. Et comme FrĂ©dĂ©ric Bosser avait trĂšs envie de rouvrir une galerie, nous avons travaillĂ© ensemble pour lancer ce nouveau projet. Maintenant, mon autre prioritĂ© est que j’arrĂȘte de croitre et que je me concentre sur la coordination de tous ces projets, car j’ai encore plein d’idĂ©es. Par exemple, une collaboration avec deux galeries d’art en Suisse, Ă  Lausanne et Ă  GenĂšve. C’est beaucoup de projets en perspective.

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