Quand Olivier Dussopt ose parler de « misère », peut-on le qualifier de « social-traître » ?


Olivier Dussopt est-il un « social-traître » ? L’insoumission s’est posée la question alors qu’Olivier Dussopt répondait à une question de la députée LFI Danielle Simonnet sur les travailleurs des plateformes. « Créer leur entreprise », « activité », « émancipation », « autonomie » sont les seuls mots qui lui viennent en tête. Puis, le ministre en charge de l’injuste réforme des retraites a haussé le ton en tenant un discours abject.
« Nous n’avons pas le discours misérabiliste que vous avez. Si vous entretenez le misérabilisme, c’est parce que le jour où il n’y a plus de misère, il n’y a plus de France Insoumise », s’est-il exclamé dans l’hémicycle. Il est tellement plus simple de reprocher à ses adversaires d’entretenir un soi-disant misérabilisme, quand c’est sa propre politique qui la crée. 400 000 pauvres de plus depuis l’élection de Macron, et « en même temps », les 500 familles les plus riches du pays ont vu leur fortune passer de 571 milliards à 1000 milliards d’euros en 5 ans. Le macronisme porte en lui la misère, Dussopt le défend, la France Insoumise la combat. Le ministre du Travail a choisi son camp.
Olivier Dussopt est enfin un socialiste qui a trahi. Opposant le jeudi, ministre le lundi : en 2017, il s’est opposé et a voté contre le premier budget à la sauce Macron… avant de rejoindre le gouvernement et de défendre le même budget. Dussopt, social-traître ? La question, elle est vite répondue. Notre article.

M. Dussopt, êtes-vous simplement bête ou vraiment méchant ? 

Le ministre du Travail semble vraiment au bout du rouleau. En tout cas, on ose espérer que ce soit le manque de sommeil qui lui ramollisse la cervelle. Dans sa dernière intervention, il déclare : « Vous (LFI) regrettiez que les jeunes des quartiers viennent créer leur entreprise, viennent créer leur activité sur une plateforme. Nous, nous encourageons leur activité. Nous encourageons leur émancipation. Nous encourageons leur autonomie. » 
Oui, vous avez bien lu. Le ministre du Travail associe autonomie et émancipation à travail de plateformes (Delivroo, Uber et compagnie). N’a-t-il pas eu vent des revendications de tous les travailleurs ubérisés européens, réclamant de tribunes en manifestations à être reconnus comme salariés ? N’a-t-il pas vu que la promesse de l’auto-entrepreneur libéré de son patron s’est fracassée sur le mur de la réalité de l’exploitation capitaliste aggravée par le manque de protection sociale ? Macron a-t-il nommé un parfait ignorant au poste de ministre du Travail ? 
Il existe une autre explication. Olivier Dussopt serait méchant. Il sait très bien que pédaler jour et nuit, par canicule ou sous la neige, n’a rien d’une activité émancipatrice. Il sait très bien que le rêve vendu par Uber n’est qu’un tissu de mensonges. Il préfère vanter les grandes actions de son ministère, qui vise à permettre à encore plus de travailleurs et de travailleuses de découvrir les joies des courses contre la montre, entre les bus et les ambulances, au péril de sa vie, pour une paye de misère.

Quand Olivier Dussopt ose parler de « misère », peut-on le qualifier de « social-traître » ?

Pourquoi nommer la misère et la combattre quand on peut accabler ses adversaires qui luttent contre elle ?

Pourquoi nommer la misère et la combattre quand on peut accabler ses adversaires qui se battent contre elle ? Voilà le choix fait par Olivier Dussopt dans l’hémicycle ce 17 février 2023. « Nous n’avons pas le discours misérabiliste que vous avez. Si vous entretenez le misérabilisme, c’est parce que le jour où il n’y a plus de misère, il n’y a plus de France Insoumise » : voilà le discours abject tenu par le ministre chargé de la réforme des retraites face à la représentation nationale.
Les députés insoumis se battent contre la politique portée par le chef de l’État, précisément en ce moment contre la retraite à 64 ans parce que cette politique est créatrice de misère. Il est tellement plus simple de taxer ses adversaires d’entretenir le misérabilisme, lorsque c’est sa propre politique qui la crée. Quand on parle ubérisation, accidents du travail, précarisation, cadences infernales, Dussopt préfère critiquer le comportement de ses adversaires politiques. Le ministre du travail mesure-t-il la violence de ses propos ?

Abject. Il y a plus de 9 millions de personnes sous le seuil de pauvreté ; 400 000 en plus depuis l’élection de #Macron…et voilà tout ce que le ministre de Dussopt a en dire. Le jour où il n’y aura plus de misère c’est parce que nous serons au pouvoir. #DirectAN https://t.co/tdNgCSQQGF— Bastien Lachaud (@LachaudB) February 17, 2023

« Le jour où il n’y aura plus de misère, il n’y aura plus de France Insoumise » : Olivier Dussopt en est-il bien sûr ? Quel camp défend le partage des richesses ? Certainement pas la minorité présidentielle, mais celui de l’intérêt général humain, défendu depuis sa création par la France Insoumise. Retraite à 60 ans, hausse du SMIC, blocage des prix, gel des loyers, garantie d’emploi… « Le jour où il n’y aura plus de misère c’est parce que nous serons au pouvoir », a répondu le député insoumis Bastien Lachaud.

En bon ministre de Macron, ce sont les mesures portées par Dussopt qui provoque la misère

Baisse des APL et en même temps suppression de l’impôt sur la fortune. Suppression des repas à un euro pour les étudiants et toujours pas de traces d’une taxe sur les super-profits. Ruine des services publics, le seul patrimoine des démunis et subventions de 157 milliards chaque année aux multinationales qui saccagent les humains et la planète. Bilan de 5 années de gouvernement Macron : les 500 plus grandes fortunes ont vu leur patrimoine pratiquement doubler, de 571 milliards à 1000 milliards d’euros. Dans le même temps, les files d’attente à l’aide alimentaire s’allongent. 

L’enquête de Libération est formelle. Sous Macron, plus on est riche, plus on s’enrichit. 75% des plus pauvres, en revanche, sont encore plus pauvres aujourd’hui qu’au début du quinquennat Macron. 
Cela va encore s’aggraver avec la retraite à 64 ans voulue par Macron et portée par Olivier Dussopt. Après 60 ans, les corps des ouvriers et des employés sont usés. Ils n’arriveront pas à 64 ans. 30 % des seniors sont déjà au chômage ou au RSA à 62 ans. Quelle sera la conséquence d’un report de deux ans de l’âge légal de départ en retraite ? De la misère, encore plus de misère pour le peuple. Une autre solution existe : taxer la fortune des ultra-riches, 2% suffirait ! Mais cela M. Dussopt, comme tous les membres du gouvernement Macron, refusent même de l’imaginer
La France insoumise ne fait pas dans le misérabilisme. Si ses élus passent autant de temps à parler des plus pauvres, c’est parce que se battre pour la dignité de toutes et tous, c’est le sens de leur engagement, le programme politique sur lequel ils ont été élus. Parce que c’est ce que leur raison et leur morale commandent. 
M. Dussopt, oserez-vous prétendre que l’on peut être heureux dans un océan de misère ? Si c’est le cas, dites-le, au moins ce sera clair. En attendant, cessez de chercher pouilles à celles et ceux qui dédient leur vie celle de leurs équipes à la défense du droit à la dignité des travailleurs et travailleuses épuisés, maltraités, discriminés et qui n’ont que leur représentant élu à l’Assemblée nationale pour porter leur voix. 

« C’est Dussopt, le traître ! »

Sans transition, tant qu’on parle de M. Dussopt avant qu’il ne retourne à l’oubli dont il n’aurait jamais dû sortir, rappelons que cet homme est un traître. Réélu député socialiste en 2017, il est nommé le 24 novembre 2017 Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics dans le gouvernement d’Édouard Philippe. Il a ainsi défendu devant l’Assemblée nationale le budget de l’État… contre lequel il avait voté une semaine plus tôt. 

Dussopt, le traître ! Traitre, j’ai le droit parce que c’est vrai. Le jeudi, il votait contre le budget de Macron. Le lundi, pouf, il est ministre. Cela s’appelle un traître. Il a des gens qui pensait élire un député d’opposition de gauche. #PourNosRetraites pic.twitter.com/4dJPBeImkw— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) February 16, 2023

Une situation que n’a pas manqué de rappeler Jean-Luc Mélenchon lors de son meeting du 16 février 2023 à Paris. « J’étais assis à un mètre derrière lui quand il était député socialiste. Pendant un mois, comme un répondeur, il critiquait le budget de l’État. […] Il finit la semaine. Il vote contre, on est jeudi. Arrive le week-end. On est lundi : pouf, il est ministre Macron ! Le même ! Ça s’appelle un traitre. À l’époque, des gens croyaient qu’ils élisaient un député d’opposition de gauche : ils se retrouvent avec un gars qui est membre du gouvernement » : opposant le jeudi, ministre le lundi.

Rien d’étonnant finalement de la part d’un député qui luttait contre le report de l’âge à 62 ans en 2010, et porte la réforme des retraites à 64 ans aujourd’hui. Un retournement de veste rappelé par Inaki Echaniz, député socialiste des Pyrénées-Atlantiques. Le 7 février 2023, il a piégé Olivier Dussopt en lui posant la même question que celui-ci avait posé à Éric Woerth (député Renaissance, ex Les Républicains) en 2010. Olivier Dussopt était alors député socialiste.
Sans s’en rendre compte, Olivier Dussopt s’est levé pour répondre à sa propre question. Une faille spatio-temporelle s’est ouverte à l’Assemblée nationale, en même temps que le revirement d’Olivier Dussopt sur la question des retraites a éclaté à la vue de la représentation nationale. 

Olivier Dussopt fait partie des socialistes qui ont rejoint Emmanuel Macron par opportunisme politique ou par réelle adhésion politique à ses idées. Voire les deux. Comment le PS des années 2010 en est-il arrivé là ?
La note du think thank Terra Nova, proche du PS, porte une lourde responsabilité sur ce qu’est devenu le PS et sur le nombre d’ex socialistes convertis aux idéaux macronistes. Cette note avait théorisé l’abandon des classes populaires afin de se tourner vers une nouvelle majorité électorale urbaine dans le but de conquérir le pouvoir. Sûrement Olivier Dussopt en a-t-il fait son livre de chevet, vu ce qu’il est devenu aujourd’hui. Dussopt, « social-traître » ? La question, elle est vite répondue.
Par Nadim Février et Ulysse Kummer