explique-t-elle.
Car ce qu’elles veulent, c’est d’abord comprendre. »→ À LIRE. Au procès des attentats du 13 novembre, la défense sur un fil de Salah AbdeslamComprendre pourquoi, enchaîne l’avocate, un garçon « né en Belgique et ayant grandi avec les valeurs occidentales » a pu vouloir tuer des jeunes gens qui avaient sensiblement le même âge que lui.
Comprendre aussi le rapport à la religion de cet accusé qui, à la différence de bien d’autres terroristes, ne semble pas s’être engagé, avant les attentats, dans un intense processus de radicalisation.
Une adhésion aux « lois de Dieu »
Jusque-là, la question de la religion n’avait jamais été abordée de front avec Salah Abdeslam, ce qui ne l’a pas empêché d’évoquer à l’audience son adhésion « aux lois de Dieu » et à celles de la charia. « Je tiens d’abord à dire qu’il n’y a pas de divinité à part Allah et que Mohamed est son messager », avait aussi lancé l’accusé le tout premier jour du procès.
Lors de son interrogatoire de personnalité début novembre, le président Jean-Louis Périès avait volontairement occulté le chapitre « religion », le renvoyant au moment où l’accusé serait questionné sur le fond du dossier.Aujourd’hui, on y est. Et Me Josserand-Schmidt constate que le seul survivant du commando du 13 novembre a grandi dans une famille ayant une pratique religieuse « modérée et lointaine ».
Ce que confirme l’intéressé debout dans le box. Durant l’enquête, il a aussi été établi que Salah Abdeslam fréquentait davantage les casinos que les mosquées, à la différence de deux de ses frères, dont Brahim, un des terroristes ayant mitraillé les terrasses.Alors, « pour comprendre », Me Josserand-Schmidt entame un long dialogue avec l’accusé.
« À aucun moment dans votre parcours, on ne note un changement radical dans l’intensité de votre pratique religieuse (…). Alors, comment, ensuite, peut-on prendre les armes pour une religion qu’on a si peu approfondie ? », demande l’avocate. « C’est la peur, la crainte.
La peur de celui qui vous a créé. J’ai eu peur de Dieu, de l’enfer, du châtiment de Dieu », explique Salah Abdeslam, en ajoutant qu’il craignait une réaction divine face à sa passivité devant les « massacres » que subissaient alors ses « frères syriens » de la part de Bachar Al Assad puis de la coalition internationale. « C’est là que j’ai pris conscience qu’il fallait faire le djihad pour aider ces frères.
Dans la communauté musulmane, quand un membre souffre, c’est tous les membres qui souffrent », poursuit l’accusé évoquant une sorte de tourment intérieur : « Mes frères se faisaient massacrer et moi, j’étais peu assidu à la mosquée, j’aimais faire la fête et profiter de la vie. Alors, j’ai voulu les aider même si je n’étais pas très pieux. »
« J’avais ma mère, ma fiancée »
Dans cette crainte d’une punition divine qui expliquerait cette fuite en avant vers la radicalisation et la violence terroriste ? L’audience du jour ne parvient pas à lever toutes les interrogations. Quand Me Stéphane Saidani l’interroge sur un verset du Coran selon lequel, dit-il en substance, « quiconque tue un croyant sera voué éternellement à l’enfer » -« Pensez-vous que ceux qui ont commis ces faits sont en adéquation avec ce verset ? »-, l’accusé répond par la négative. Puis précise : « L’État islamique, alors, répond à l’agression de la coalition avec les moyens du bord.
Eux, ils bombardent. Donc, l’État islamique bombarde. Ce verset-là n’a rien à voir avec ce qui s’est passé.
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