Posons la question simplement : que veut Gabriel Attal ? Répondons de même : tout, et le plus vite possible.
Il est toujours amusant de regarder un ambitieux s’ébattre sur la scène publique. Depuis le début de janvier, moment de sa nomination à Matignon, nous l’avons vu partout, nous l’avons entendu parler de tout. Nous avons noté son sourire où affleure parfois une teinte sarcastique. Le regard est vif, la démarche énergique. L’ambitieux.
Mercredi dernier, il a osé une mise en scène qu’aucun de ses prédécesseurs n’aurait osée. Il a, le temps d’une séance de questions au gouvernement, congédié son gouvernement pour répondre seul aux députés. Le culot. A-t-on besoin d’un dessin ?
À 35 ans, Gabriel Attal ne voit pas seulement loin, il vise haut. Une marche encore le sépare du sommet.
Tout dans son comportement suggère l’envie de la gravir. Et s’il n’en dit rien lui-même, il laisse dire. Malin.
Le Premier ministre Gabriel Attal. Photo AFP
« Nous nous méfions des Rastignac »
Quel jugement porter sur cette ambition ? Spontanément, la culture de ce vieux pays pousse au dénigrement de la jeunesse. Nous nous méfions des Rastignac. Malgré tout, quand il s’en présente un – Sarkozy en 2007, Macron dix ans plus tard –, nous prenons.
« Défendre Kiev, c’est défendre Paris ; défendre l’Ukraine, c’est défendre la démocratie »
La preuve inverse est établie par la banalité de François Hollande qui nous a très vite lassés. Informé de ces précédents, Gabriel Attal peut avancer sans rien cacher de sa personnalité et de ses désirs. À lui de montrer ses talents. L’Histoire fera le reste.Le pouvoir, sa conquête, sa conservation, exige d’immenses efforts, impose pas mal de reniements, fabrique beaucoup d’échecs et d’amertume. Souvent sombre, rarement lumineux, il ne permet que de rares succès. Pourquoi alors le désirer ? Mystère de la vie. Soyons pourtant heureux que certains parmi nous en aient encore le goût.
Encore des volontaires
Tout pourrait les en détourner : l’argent facilement gagné ailleurs, le poids écrasant des responsabilités, la reconnaissance faible des citoyens, ou à l’inverse, le tombereau quotidien de critiques et d’insultes.
Un politicien anglais disait un jour : « Si vous voulez être aimé, ne faites pas ce métier. Achetez un chien. »
Voilà bien la menace qui pèse sur les démocraties. Que les ambitieux désertent, et que restent, seulement, les aventuriers et les besogneux.
Jean-Michel Aphatie
Journaliste politique reconnu, Jean-Michel Aphatie, passé par la presse écrite et la radio, tient une chronique, chaque jour, dans « Quotidien » sur TMC.