Attal offre des miettes pour tenter d'étouffer la mobilisation des agriculteurs


Hier, le Premier ministre Gabriel Attal a fait sa première déclaration publique sur les manifestations d’agriculteurs. Il a offert des concessions mineures dans une tentative cynique de mettre fin aux manifestations, sans satisfaire leurs revendications, avant qu’elles ne déclenchent des grèves massives des travailleurs.Hier, les agriculteurs bloquaient des routes à travers la France.

72.000 agriculteurs étaient mobilisés dans 85 départements, selon la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA). Hier, au moins 60 blocages d’axes routiers étaient recensés, dans les centres économiques ou agricoles du pays: le sud-ouest, où les ils ont commencé, la côte méditerranéenne, la vallée du Rhône, la Bretagne, et les régions lilloise et parisienne.

Attal offre des miettes pour tenter d'étouffer la mobilisation des agriculteurs

[AP Photo/Christophe Ena]Dans le sud-est, des agriculteurs ont incendié une mutuelle à Narbonne, un bureau de douane à Nîmes et des péages près de Montpellier.Ils ont organisé au moins 5 blocages d’autoroutes dans la région parisienne et ont maintenu leur menace hier de faire entrer leurs tracteurs dans la capitale, bloquer le gouvernement. «On a juste à franchir la barrière pour arriver aux portes de Paris», a dit Alexandre Plateau, de la FNSEA, à un blocage à Saint-Arnoult.

Il a ajouté: «c’est une possibilité dans la soirée, tous nos adhérents et autres agriculteurs sont prêts».85 pour cent des Français soutiennent les agriculteurs, et le ministre de l’Intérieur fascisant Gérald Darmanin a promis, pour l’instant, de ne pas envoyer les CRS contre eux. Il est évident que la FNSEA est débordée, car les rapports indiquent que les agriculteurs ont commencé à bloquer des autoroutes à travers le sud de la France sans son aval.

Attal a parlé pour tenter de diviser et de désorienter les agriculteurs et créer de meilleures conditions pour que la FNSEA et d’autres fédérations, comme la Coordination rurale ou la Confédération paysanne, récupèrent et mettent fin au mouvement. Cette stratégie a été expliquée sans détour dans une tribune mercredi soir par l’éditorialiste Cécile Cornudet sur le site du quotidien économique, Les Echos.La tribune, intitulée «Gouvernement Attal: Les syndicats sont nos amis ! », commence en avouant que le gouvernement et les fédérations paysannes sont dépassés.

«La grogne s’étend», écrit-elle, rappelant la lutte des «gilets jaunes» contre les inégalités sociales en 2018-2019. «Rien n’est pire qu’un mouvement aux mille mots d’ordre … donc sans interlocuteurs, pour négocier et canaliser. Comme au temps des ‘gilets jaunes’.

»À l’occasion du 25e anniversaire du World Socialist Web SiteDans cette vidéo, le président du comité de rédaction international du WSWS, David North, explique le contexte de la création du WSWS, examine son bilan et son importance contemporaine et lance un appel à tous les lecteurs pour qu’ils fassent des dons au WSWS et élargissent son lectorat.Selon elle, la bourgeoisie et le gouvernement devraient utiliser les fédérations d’agriculteurs comme ils utilisent les bureaucraties syndicales: pour canaliser et étrangler la base.Elle poursuit: «Puisque la colère est partie de la base, il fallait donc que la FNSEA prenne le lead et embraye vite pour retrouver de la crédibilité.

Deux jours pour étendre ses actions, 40 revendications hiérarchisées présentées ce mercredi, une réunion d’arbitrage du gouvernement jeudi matin, les annonces de Gabriel Attal vendredi. C’est huilé, orchestré.»Alors que routiers, pêcheurs et taxis rejoignent les agriculteurs, Cornudet a appelé à des concessions, afin d’étouffer le mouvement et d’éviter qu’il ne provoque une grève générale.

Elle a écrit : «Il faut répondre vite maintenant, car laisser la colère prospérer est la meilleure façon de la laisser s’installer, voire faire tache d’huile.»Conformément à ce scénario, Attal est apparu hier après-midi à une ferme dont le propriétaire, selon TF1, avait fait patte blanche à son équipe de communication et au ministère de l’Intérieur. Il y avait aussi Jérôme Bayle, qui a participé aux blocages autour de Toulouse et qui, au cours des dernières 24 heures, a soudainement été promu dans les grands médias comme «l’éleveur grande gueule qui porte la parole du mouvement» (selon Libération).

Attal a commencé par quelques platitudes nationalistes, déclarant qu’il apportait «deux mots d’ordre: d’abord protéger notre héritage et notre identité» et aussi «acheter français». Il a dénoncé la violence et a remercié les syndicats. Il a énuméré des mesures pour demander aux agriculteurs de mettre fin au mouvement.

Il a proposé de suspendre la hausse des taxes sur le gazole, d’augmenter les fonds pour l’agriculture en Bretagne et de sanctionner les entreprises agroalimentaires qui enfreignent la loi Egalim sur le partage des recettes des ventes de denrées alimentaires. Il a aussi proposé de limiter les restrictions écologiques sur les projets de construction agricole et a dénoncé un accord commercial entre l’Union européenne (UE) et le Mercosur, la zone de libre-échange sud-américaine. Ceci empêcherait les produits des agriculteurs sud-américains d’atteindre les marchés européens.

Ces mesures nuiraient aux agriculteurs du Mercosur et ne résoudraient pas la crise agricole en France ou en Europe. Elles ne répondent pas à l’effondrement des subventions agricoles de l’UE dû à l’inflation. Elle ne prévoit pas non plus l’aide financière massive nécessaire pour aider les agriculteurs à atteindre les objectifs fixés par le programme «De la Ferme à la Fourchette» de l’UE pour réduire la consommation d’énergie, d’engrais à base de nitrates et d’autres produits que l’UE veut limiter pour lutter contre la crise climatique.

Selon TF1, le gouvernement lui-même s’attendait à ce que ses propositions ne satisfassent pas les agriculteurs, et que les manifestations se poursuivraient pendant plusieurs jours. Néanmoins, la foule triée sur le volet autour d’Attal a dûment applaudi, et Bayle a insisté auprès des journalistes que le mouvement était fini, avant de prendre un verre avec Attal.«Il ya des gens qui m’envoient des messages, ‘Faut pas que tu t’arrêtes, il faut penser à lui, à lui, à lui.

Bien sûr, mais nous ça fait neuf jours qu’on est ici» a-t-il dit. Sur le gouvernement, il a ajouté: «Ils ont tenu parole, on tient parole». En effet, il semble qu’Attal ait organisé cette mascarade cynique sur la base de promesses de Bayle qu’il travaillerait avec Attal pour étrangler la mobilisation.

La plupart des agriculteurs s’opposent la tentative de Attal d’étouffer leur lutte. Sur les réseaux sociaux, des assemblées d’agriculteurs qui écoutaient d’Attal l’ont copieusement hué. Loading Tweet …La FNSEA, qui cherche désespérément à prendre le contrôle des mobilisations pour les étouffer, a dû se poser hypocritement en partisane du mouvement.

Son président, Arnaud Rousseau, a dit au journal de 20h de TF1 que la FNSEA continuerait à soutenir les manifestations malgré le discours de Attal. «C’est trop juste, avec ses annonces, le Premier ministre a réussi à faire lever un barrage», a dit Rousseau. «Ce qui a été dit ce soir ne calme pas la colère, il faut aller plus loin».

Il a appelé Attal à le rencontrer ce matin pour «continuer à travailler sur les revendications que portent la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs».Les agriculteurs et les travailleurs doivent rejeter l’offre d’Attal. Il n’y a rien à négocier avec le gouvernement Attal-Macron, que les travailleurs doivent faire chuter.

La question posée aux agriculteurs et aux travailleurs est de briser le diktat des bureaucraties nationales qui les subordinnent à une perspective réactionnaire de négocier avec Macron et donc à étrangler la lutte contre l’État capitaliste et l’UE.Les manifestations des agriculteurs éclatent à travers l’Europe, et une puissante grève des cheminots allemands commence. Il faut développer une lutte commune, internationale contre l’UE et les gouvernements capitalistes réactionnaires d’Europe.

Il faut rassembler agriculteurs et travailleurs par-delà des frontières et des bureaucraties nationales dans des comités de la base. La perspective essentielle pour une telle mobilisation est de préparer une lutte révolutionnaire pour le pouvoir ouvrier et pour les États-unis socialistes d’Europe.