Par Julia Gualtieri
Publié le 29 Nov 22 à 18:00
La Marne
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La SEMM et la mairie de Pomponne ont finalement trouvé un terrain d’entente grâce au retrait de la société d’économie mixte de Montévrain au profit d’un autre promoteur. ©JG./La MarneAprès cinq ans de procédure judiciaire, la hache de guerre est enterrée. La mairie de Pomponne et la SEMM, Société d’économie mixte de Montévrain, ont finalement trouvé un protocole d’accord au sujet du permis de construire accordé par erreur en 2018. Tout a été validé par le tribunal administratif et les deux acteurs du conflit se disent aujourd’hui satisfaits. Pourtant, le conflit autour de la construction d’un programme immobilier de plus d’une centaine de logements près de la gare de Lagny–Thorigny, appelé l’Écrin de Pomona, a été long et l’ambiance entre les deux, plus que tendue.
Un conflit devenu un poids
Mais il y avait urgence à trouver une solution. D’un côté, la SEMM, organisme public-privé détenu majoritairement par la mairie de Montévrain, accumulait des dépenses sans pouvoir lancer son chantier. De son côté, après une décision judiciaire défavorable, Pomponne devait payer des indemnités de plus de 3 millions d’euros qui l’auraient endettée sur des années.
D’où vient le conflit ?
Le conflit entre la SEMM et Pomponne date de 2018. À cause d’un courrier envoyé en retard par la communauté d’agglomération de Marne et Gondoire (CAMG), un permis de construire déposé par la SEMM a été validé. Comptant 107 logements contre les 85 envisagés, le programme situé à l’angle de la rue de la Madeleine ne convenait pas à la ville. En octobre 2018, le maire de l’époque, Roland Harlé, a donc pris un arrêté pour fraude au permis de construire et préempté le dernier terrain pour s’opposer au projet. Mais le tribunal administratif a donné raison à la SEMM en novembre de la même année. Restait à attendre le jugement au fond. En attendant, des négociations ont débuté en 2019. Suspendu par les élections municipales puis la pandémie de Covid-19, le conflit a repris après l’élection du nouveau maire, Arnaud Brunet, avant de trouver l’issue actuelle.
« Le temps a joué en notre faveur », estime le maire de Pomponne, Arnaud Brunet, qui avait fait de ce conflit un de ces enjeux de campagne. Autre facteur, le changement opéré à la direction de la SEMM, avec l’arrivée de Jean-Pierre Bariant comme directeur général en avril 2021, reconnaît Arnaud Brunet. « Nous avons pu discuter. C’était impossible avant. »
Vendre pour « calmer le jeu »
Le nouveau directeur général l’assume pleinement : « Mon objectif était de mettre fin à ce conflit pour arrêter les dépenses et redorer notre blason. Cette guerre fratricide entre deux communes qui appartiennent à la même agglomération n’était bonne pour personne », explique-t-il. « Nous avons décidé de partir pour calmer le jeu. La seule condition était de pouvoir nous y retrouver financièrement au vu des dépenses réalisées. » Alors que la société est dans une situation économique délicate, elle avait également intérêt à se sortir de ce bourbier judiciaire coûteux et mauvais pour son image. Au point d’abandonner les juteuses indemnités réclamées ?« Nous n’avons aucun intérêt à ruiner une ville voisine. Par ailleurs, dans ces conflits, on sait qu’on n’obtiendra pas la totalité des demandes », répond Jean-Pierre Bariant. L’ardoise de la ville de Pomponne a donc été totalement effacée. Un accord validé par le tribunal administratif.Vidéos : en ce moment sur Actu
Un repreneur providentiel
La porte de sortie trouvée s’appelle Edouard Denis. Repreneur providentiel, le promoteur a accepté de racheter les terrains à la SEMM à hauteur des 6 millions d’euros demandés pour l’Ecrin de Pomona et l’offre a été validée par la mairie. « Les négociations ont duré sept mois. Nous avions un autre promoteur intéressé, mais qui n’était pas prêt à remplir nos conditions », explique Jean-Pierre Bariant.La SEMM voulait partir vite et retrouver sa mise de fond rapidement. « Nous sommes très contents de cette issue en harmonie avec le maire et la mairie de Pomponne », se félicite le directeur général de la société.
« 40 logements en moins, c’est une belle différence »
Le projet « Madeleine » compte cette fois 113 logements. Pendant le bras de fer, le nombre de logements a servi de levier. Dans les dernières propositions, la SEMM était montée de 107 à 151 logements.
C’était soit nous payions, soit nous avions plus de logements. Finalement, on s’en sort sans indemnités à payer et avec 113 logements. Cela n’a l’air de rien, mais 40 logements en moins, c’est une belle différence.
Arnaud Brunet
Pourquoi l’opposition s’est-elle abstenue ?
Lors du vote du protocole d’accord en conseil municipal du 30 juin 2022, les élus des deux listes d’opposition se sont abstenus, ainsi qu’un élu de la majorité, Jean Bedu. En tout, 9 élus se sont abstenus. Pourquoi ? Selon les élus de Pomponne, un nouvel élan, c’est l’absence de réponses claires aux questions qui les a conduits à « une posture de méfiance sur le sujet ». Le renoncement de la SEMM aux faramineuses indemnités demandées via le tribunal administratif les laissait également plus que dubitatifs : « Quelle est la contrepartie ? », interroge Hervé Guise. « On ne devait avoir que 107 logements, il y en a finalement 113… », note-t-il.Sur les questions d’urbanisme, les échanges sont généralement tendus et les élus minoritaires déplorent le faible nombre de réunions en commission. Selon le maire, il était impossible de répondre à toutes les questions tant que tout n’était pas totalement validé.
L’intérêt pour le maire est également d’avoir un nouveau partenaire avec qui il peut discuter plus sereinement de l’architecture générale des projets. D’autant qu’Edouard Denis a aussi racheté à la SEMM le projet à l’autre bout de la rue de la gare, dit Chabanneaux.Les travaux du projet Madeleine ont d’ailleurs déjà commencé, avant la fin officielle du conflit judiciaire.
La fin d’un conflit ?
Bien que ce nouvel arrangement semblait convenir à tous, il a toutefois fait peser sur la mairie le soupçon du conflit d’intérêts. En effet, comme l’a souligné l’opposition à plusieurs reprises, l’ancien adjoint à l’urbanisme de Pomponne est salarié chez Edouard Denis. S’il a rendu sa délégation, restant simple conseiller municipal, les groupes minoritaires s’interrogeaient.« Je m’en suis tout de suite douté, dès que la SEMM nous a transmis l’offre. C’est pour ça que j’ai insisté pour que l’on attende d’autres propositions », explique Arnaud Brunet.Proposée de façon anonymisée raconte le maire, la proposition d’Edouard Denis avait obtenu la majorité des avis en commission d’urbanisme. « Les autres propositions demandaient plus de logements », poursuit le maire. Se disant serein dans cette transaction « entre groupes privés », il se satisfait de l’issue trouvée.« C’était une promesse de campagne. Ce conflit est soldé, le nombre de logements est raisonnable et nous avons retrouvé notre liberté financière », conclut-il.Cet article vous a été utile ? Sachez que vous pouvez suivre La Marne dans l’espace Mon Actu . En un clic, après inscription, vous y retrouverez toute l’actualité de vos villes et marques favorites.