d’un PowerPoint et d’un pitch de trois minutes. Une formule en vogue : Nuit pour entreprendre, Nuit de l’info, Nuit de la cybersécurité… Des concours nocturnes fleurissent dans toutes les grandes écoles. Pourtant, tous les chronobiologistes l’ont acté : l’être humain n’est pas fait pour travailler la nuit. « Certes, avant 25 ans nous supportons beaucoup mieux les privations de sommeil qu’à l’âge adulte car l’horloge biologique est moins présente », souligne Damien Davenne, chronobiologiste et professeur à l’université de Caen. N’empêche : « La nuit, nous sommes programmés pour dormir, donc naturellement moins performants. »
« Prendre des décisions dans l’urgence »
Quel est donc l’intérêt de développer ces nouveaux formats ? Marie Mathieu-Pruvost, la directrice de l’enseignement de l’Ecole des ponts, évoque d’abord l’aspect purement pratique. « C’est beaucoup plus facile de réunir des entrepreneurs, des professeurs et des étudiants de différentes écoles la nuit », souligne-t-elle. « On n’a pas à se soucier des questions d’emploi du temps. » Au-delà de ces aspects logistiques, l’Inseec Grande Ecole, qui a initié la tendance il y a quatorze ans avec sa Nuit de la gestion de crise, met surtout en avant l’objectif pédagogique. « Les coups de stress font partie de la vie du manageur, quel que soit son secteur d’activité, rappelle son directeur général Thomas Allanic. Comme ils n’arrivent jamais au bon moment, ils peuvent très vite déstabiliser. D’où l’intérêt de confronter nos étudiants à des situations délicates pour leur apprendre à prendre des décisions dans l’urgence et à les assumer. » Concrètement, tous les étudiants de dernière année sont convoqués le temps d’une soirée sur les campus de Paris, Bordeaux et Lyon. Dans chaque salle, deux équipes s’affrontent, l’une joue le rôle du comité de direction d’une entreprise, l’autre incarne les acteurs à l’origine de la crise : des salariés mécontents, des syndicalistes, des clients insatisfaits… « A la moitié de la nuit, on réalise un débriefing de l’exercice puis on change les rôles et les scénarios », complète Thomas Allanic.
Fédérer les troupes
analyse Claire Leconte, professeure émérite de psychologie de l’éducation, spécialiste des rythmes biologiques. « On peut être pleinement à ce qu’on fait, ce qui permet de mener des réflexions et des échanges plus riches. »
« Un vrai effort physique »
Guillaume en a fait l’expérience avec le bureau des étudiants, dont il fait partie. « Avec les autres membres de l’association, on se retrouve régulièrement après les cours pour chercher de nouvelles idées d’activité », raconte-t-il. « Et à chaque fois, le même scénario se reproduit : à 19 heures, rien ne vient, c’est la page blanche, et à 23 heures, allez savoir pourquoi, tout se débloque. » Au fur et à mesure que l’heure avance à la Ruche, les projets s’affinent. « Notre objectif est de développer une sorte de Yuka du textile », explique ainsi Tiffany. Un outil qui permettrait aux consommateurs de connaître l’empreinte carbone de leurs vêtements et de leurs chaussures avec un système de notes. Les étudiants présentent leur projet devant leurs camarades et un jury, le 2 décembre 2021. ELODIE CHERMANN Pour gagner en efficacité, le groupe se répartit les tâches. Pendant que Grégoire et Jérémie mettent au point l’interface de l’application, Guillaume, Thomas, et Paul-Emile élaborent leur business plan. Tiffany, de son côté, travaille sur le diaporama et la vidéo de présentation, mais bientôt les premiers bâillements surgissent. « J’ai l’habitude de me coucher tard pour réviser », confie-t-elle. « Mais rester éveillée toute la nuit pour travailler demande quand même un vrai effort physique. »
Sortir de sa zone de confort
mastères spécialisés (SAMS) Samedi 29 janvier 2022, de 10 heures à 18 heures. Paris Event Center, 75019 Paris sams.groupelemonde.fr Elodie Chermann