Des milliers de tonnes de déchets plastiques à l’abandon ont été collectés par Jouvert. Les factures, d’un montant de 4,3 M€, sont en suspens.
Au même titre que les milliers de tonnes de déchets plastiques stockés aux Salles-du-Gardon après la faillite de l’entreprise Soreplast, les questions s’amoncellent dans cet épineux dossier économico-environemental. Un volet pénal à cette affaire est-il à envisager ? Comment les autorités ont laissé la situation dégénérer, et in fine, qui va régler les factures ?
Le tribunal administratif de Nîmes a examiné l’affaire ce mardi et va tâcher de répondre à une partie de ce fiasco financier, doublé d’un scandale environnemental. Trois requêtes ont été déposées. Deux par l’entreprise Jouvert qui réclame son argent auprès d’Alès Agglo, une par cette même collectivité qui s’est, à son tour, retournée contre l’État.
Une entreprise en danger
Deux points précis sont abordés : la légalité de l’arrêté de réquisition pris par Patrick Malavieille et la réalité de la prestation de l’entrepreneur. Selon le rapporteur « les déchets issus d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) ne sont pas de la compétence du maire ».
De plus, l’obligation de remise en état du terrain incombe au dernier exploitant. L’arrêté serait donc entaché d’irrégularité. Dernier point relevé par le rapporteur, le fait que l’entrepreneur n’a pas tenu de registre justifiant des tonnes de déchets traitées. « D’autres déchets, en plus de Soreplast, ont été enfouis. » Et de conclure : « Les trois requêtes doivent être rejetées. »
L’avenir de la société qui compte une centaine de salariés, se joue en ce moment
Le conseil de l’entreprise Jouvert, Me Xavier Hemeury, décrit une situation alarmante pour l’entreprise Jouvert : « L’avenir de la société qui compte une centaine de salariés, se joue en ce moment. On a tenté de négocier pendant la médiation. On aurait pu parvenir à un accord entre Jouvert, l’État, l’Agglo et l’Ademe. Les travaux ont été réalisés au prix de 103 € la tonne. Lorsque la chambre régionale des comptes a inspecté le Smiritom (le syndicat mixte en charge des déchets ménagers de l’Agglo, NDLR), c’était 114 € la tonne. Les déchets sont enterrés dans l’ancienne mine de Cadacut. On a fourni des relevés topographiques, mais s’il faut réaliser une expertise, nous sommes d’accord. Aujourd’hui, l’entreprise Jouvert a souscrit un prêt de 2 M€ au titre du prêt garanti par l’État, ainsi qu’1,7 M€ de dette personnelle. »
« C’est curieux : l’entreprise n’est pas ICPE »
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Les mouvements de déchets ont débuté… avant les réquisitions
L’avocat poursuit sa plaidoirie avec le registre des déchets réclamé par l’Agglo depuis 2017. « Les mouvements de déchets ont débuté… avant les réquisitions. Ça pose un léger problème. » Au passage, l’avocat égratigne un ancien sous-préfet d’Alès : « Les services de l’État étaient au courant de l’arrêté de réquisition. Ils ont envoyé une lettre d’observation à la comcom qui stipule : « la gestion des déchets industriels et non pas ménagers, n’est pas de votre compétence. L’arrêté est contestable. Vous avez l’opportunité de le retirer ». »
« Une allergie locale au code de la commande publique »
L’avocat s’étonne une dernière fois : « En juillet 2016, La Grand-Combe est rattachée à Alès Agglo. Deux semaines plus tard, les réquisitions sont ordonnées mais les 4 M€ pour Jouvert ne sont pas inscrits au budget de la comcom. L’Agglo découvre la situation lorsqu’on lui réclame la première facture en 2017. Ça donne un éclairage particulier sur les responsabilités des uns et des autres. »
L’ultime réflexion du conseil tombe comme un couperet : « Il y a une allergie locale au code de la commande publique. » La décision est attendue à la fin du mois.