l’essentiel
Viticulteurs indépendants, coopérateurs, présidents des crus Minervois et Corbières, Jeunes agriculteurs, élus départementaux et sénateurs se sont retrouvés, lundi 16, dans le Lézignanais pour une tournée des caves mais aussi pour aborder la crise qui impacte lourdement la filière.
Si la période des vendanges est, généralement, le moment où les viticulteurs sont gagnés par l’effervescence que procure le gain du travail de toute une année, la morosité s’est aujourd’hui invitée dans le vignoble audois. Parce que les marchés, pour les rouges surtout, ont dégringolé, mais aussi parce que les deux années de sécheresse vont, une nouvelle fois, réduire les rendements à peau de chagrin.
Dans ce contexte, Valérie Dumontet et Sébastien Gasparini, conseillers départementaux, ont proposé à plusieurs acteurs de la filière (présidents des syndicats des crus Corbières et Minervois, représentants des Vignerons indépendants, des coopérateurs, des Jeunes agriculteurs) ainsi qu’au vice-président du Département délégué à l’agriculture, Alain Giniès, et au sénateur Sébastien Pla, de se retrouver au cours d’une tournée des caves dans le Lézignanais. L’occasion de constater la diversité des façons d’exploiter la vigne, certes, mais aussi de faire le tour des problématiques et de tirer des perspectives.
Philippe Costes, président du cru Minervois, a ainsi évoqué les marchés, dans un contexte de départs consécutifs de son appellation et de celles des Corbières et Fitou du CIVL.
« Je suis d’une génération qui a connu UCCOAR d’un côté et le Val d’Orbieu de l’autre qui étaient les numéros 2 et 3 en termes de négoce. Aujourd’hui ça n’existe plus. Ça veut dire qu’on a vendu les commerciaux.
Ça c’est structurel. On est sur des marchés très concurrentiels », a-t-il lâché en prenant exemple sur la réorganisation du négoce en Espagne. « Une seule entreprise, en Espagne, peut vinifier plus que le département de l’Aude.
Et 50 % des vignobles qu’ils collectent sont irrigués : ça vous donne la dimension concurrentielle de leurs structures. Quand on veut vendre du vin en Belgique, aux Pays-Bas ou ailleurs, ce sont eux qu’on a en face […] », a-t-il souligné, appelant à une réflexion globale autour de l’organisation du modèle français.De son côté, Olivier Verdale, président du cru corbières, a fait un point rapide de la situation : « Les Corbières sont au plus mal ; certaines communes ont perdu plus de 75 % de la production : c’est énorme.
Le millésime sera très qualitatif mais il nous manque clairement de l’irrigation. Le conseil départemental y est sensible, avec Réseau 11 (NDLR : syndicat départemental ayant vocation à sécuriser la production et l’acheminement de l’eau potable), mais il faut qu’il aille plus loin. Il nous faut des solutions palliatives en attendant le fameux tuyau d’Aqua domitia pour amener l’eau du Rhône qu’on nous promet pour 10 ou 12 ans.
Il nous faut de l’eau pour garder nos vignes. La disparition du vignoble peut s’accélérer très très vite ».Alain Giniès, vice-président du Département, s’est focalisé sur ce sujet tout en gardant une lueur d’espoir : « L’eau, ce n’est pas pour faire plus mais pour faire mieux.
Le Département sera à vos côtés, pourvu qu’il y ait des Associations syndicales autorisées (ASA) : certains n’ont pas encore monté la structure pour recevoir l’eau… Intelligemment, il y a peut-être des forages à penser pour attendre des jours meilleurs : le préfet, lors d’une session de la chambre d’agriculture, n’a pas dit non. Il est prêt à recevoir quelques exemples : soyons en capacité de les porter rapidement. »
L’exception « méridionale » de la viticulture
Sébastien Pla, sénateur et exploitant lui-même, a loué cette possibilité de discuter avec tous les représentants de la filière.
Défendant une exception « méridionale » de la viticulture, il est revenu sur le projet sur le projet de loi d’orientation agricole, qui fixe les stratégies de développement de l’agriculture filière par filière sur les 20 prochaines années, abandonné depuis la dissolution : « Il faut positionner le débat sur le structurel : comment consolider nos exploitations sur le pourtour méditerranéen ? Soit en diversifiant, soit en allant chercher d’autres revenus, et, surtout, en abordant la question du partage de l’eau : nous devons être en capacité de faire des propositions, il faut que l’ensemble des collectivités locales se mettent autour de la table pour mettre en place des réflexions et des moyens financiers. Au Sénat, on est prêts : on attend d’avoir le véhicule législatif le plus efficace pour aller chercher le plus de moyens financiers et traiter le problème de l’eau. » Une priorité.
Une urgence.