Emmanuel Macron entame la campagne de l’entre-deux-tours. Le candidat-prĂ©sident a obtenu 28,4%, selon les estimations Harris Interactive x Toluna pour RTL et M6. « Une bien drĂŽle de campagne ». Il ne faut pas aller bien loin en macronie pour entendre cette phrase. DĂ©putĂ©s, conseillers, ministres… Tous s’accorde pour dire que cette campagne ne ressemble Ă aucune autre et qu’aucune sĂ©quence n’est prĂ©visible.Â
L’aveu a mĂȘme Ă©tĂ© fait par Emmanuel Macron. « Je ne pourrai pas mener campagne comme je l’aurais souhaitĂ© en raison du contexte », dĂ©clarait-il aprĂšs avoir officialisĂ© sa candidature dans une lettre envoyĂ©e aux Français. TrĂšs vite, les soutiens du candidat ont compris que la magie de la campagne de 2017 ne se reproduira pas.Â
Et pour cause, « la nouveautĂ© macronienne est en train de sâĂ©vanouir. Lâancien candidat disruptif donne aujourdâhui le sentiment dâĂȘtre dĂ©sordonnĂ© et plat. La campagne leur Ă©chappe », analyse le politologue Pascal Perrineau, professeur Ă Sciences Po, dans Le Monde. Entre la crise sanitaire, la guerre en Ukraine et la fin du quinquennat, Emmanuel Macron a dĂ» revĂȘtir diffĂ©rents costumes, au risque de dĂ©laisser celui de candidat.
Le candidat empĂȘchĂ©
Un candidat, sans campagne. L’Ă©quation Ă©tait quasi impensable il y a quelques semaines. Il est pour l’instant difficile de savoir si cette stratĂ©gie est voulue ou subie par Emmanuel Macron. 1 seul meeting avant le premier tour, pas de dĂ©bat .
Selon Olivier Bost Ă©ditorialiste politique Ă RTL, le candidat-prĂ©sident « a fait son grand meeting Ă Nanterre devant 30.000 personnes. Deux heures dâun discours peu enthousiasmant, pour amorcer un front rĂ©publicain. Un show Ă lâamĂ©ricaine pour ancrer son unique meeting Ă gauche, aprĂšs avoir ancrĂ© son unique confĂ©rence de presse Ă droite ». Mais il « est dĂ©jĂ dans lâaprĂšs premier tour. ‘Câest le combat du progrĂšs contre le repli, le combat du patriotisme et de lâEurope contre les nationalistes’, a-t-il posé ».Â
Au-delĂ de cette campagne atypique, Emmanuel Macron a eu des difficultĂ©s Ă trouver un Ă©quilibre politique. Penchant tantĂŽt Ă droite, tantĂŽt Ă gauche. AprĂšs avoir fait des appels du pied Ă l’Ă©lectorat de gauche lors de son seul meeting de campagne, le candidat a repris appui sur sa jambe droite. Dans Le Figaro, Ă trois jours du premier tour, il dĂ©clarait : « Sur la question du travail et du mĂ©rite, pour ne prendre quâun exemple, je me retrouve dans ce quâa dĂ©fendu le prĂ©sident Sarkozy« .
EngagĂ© dans la campagne de l’entre-deux-tours, Emmanuel Macron a appelĂ© à « un grand mouvement politique d’unitĂ© et d’action ». « J’appelle tous ceux qui depuis six ans et jusqu’Ă ce soir se sont engagĂ©s pour travailler Ă mes cĂŽtĂ©s Ă transcender leurs diffĂ©rences pour se rassembler en un grand mouvement politique d’unitĂ© et d’action pour notre pays », a-t-il dĂ©clarĂ© depuis son QG Ă©lectoral.
L’uniforme du chef de guerre
L’invasion russe de l’Ukraine a retardĂ© l’entrĂ©e en campagne d’Emmanuel Macron et a changĂ© toute la dynamique de la campagne. Le prĂ©sident-candidat a Ă©tĂ© en contact plusieurs fois avec Vladimir Poutine. Lors d’une allocution, prĂ©cĂ©dent son annonce de candidature, le prĂ©sident dĂ©clarait : « J’ai choisi de rester en contact, autant que je le peux et autant que c’est nĂ©cessaire, avec le prĂ©sident Poutine pour chercher sans relĂąche Ă le convaincre de renoncer aux armes » et « pour prĂ©venir la contagion et l’Ă©largissement du conflit autant que nous le pouvons ». Emmanuel Macron sera constamment ramener Ă la situation en Ukraine. Ă cinq jours du premier tour de l’Ă©lection prĂ©sidentielle, le candidat a rebasculĂ© sur le costume de prĂ©sident de la RĂ©publique en ayant un entretien tĂ©lĂ©phonique avec Volodymyr Zelensky. Les images du massacre de Boutcha ont Ă©tĂ© au cĆur de ces discussions.Â
La blouse pendant la crise sanitaire
Avant la guerre en Ukraine, la guerre contre le coronavirus a aussi Ă©tĂ© un marqueur de ce quinquennat. LĂ aussi, Emmanuel Macron s’est posĂ© en chef de guerre en martelant lors de l’une de ses allocutions que la France Ă©tait en « guerre ». Une dĂ©claration qui lui aura valu bien des critiques. Le prĂ©sident de la RĂ©publique avait d’ailleurs conditionnĂ© le timing de sa candidature Ă la fin du pic Ă©pidĂ©mique. Sur le terrain, Emmanuel Macron a aussi Ă©tĂ© interpellĂ© sur le sort des soignants non-vaccinĂ©s. Lors d’un dĂ©placement Ă la La Pommeraye, une soignante dans ce cas a dit au chef de l’Ătat : « Monsieur le prĂ©sident, pourquoi obliger les soignants Ă se faire vacciner ? Sâil vous plaĂźt, laissez-nous travailler !« , comme le rapporte Ouest-France. En rĂ©ponse, le prĂ©sident de la RĂ©publique a rĂ©pondu que « le gouvernement ne va pas enlever lâobligation vaccinale ». « Je vous le dis en toute sincĂ©rité », a-t-il ajoutĂ©.
Le costume de président
C’Ă©tait l’un des marqueurs de la campagne prĂ©sidentielle de 2017. Mais il semble appartenir au passĂ©. Emmanuel Macron met dorĂ©navant en avant son expĂ©rience Ă la tĂȘte de l’Ătat. Dans sa lettre adressĂ©e aux Français, Emmanuel Macron estime qu' »il est des choix quâavec lâexpĂ©rience acquise auprĂšs de vous je ferais sans doute diffĂ©remment. Mais les transformations engagĂ©es durant ce mandat ont permis Ă nombre de nos compatriotes de vivre mieux, Ă la France de gagner en indĂ©pendance. Et les crises que nous traversons depuis deux ans montrent que câest bien ce chemin qui doit ĂȘtre poursuivi ».Dans Le Figaro, le prĂ©sident-candidat ajoutait vouloir « chercher la confiance de nos compatriotes parce que jâai acquis une expĂ©rience des crises, une expĂ©rience internationale, jâai appris aussi de mes propres erreurs ». Et d’ajouter : « Les crises mâont forgĂ©, jâai encore une Ă©nergie intacte, ce qui me permet de faire des choses de maniĂšre plus claire et tranchĂ©e quâil y a cinq ans. Câest dâabord ça qui mâimporte ».
La rédaction vous recommande
Lire la suite