Interview du ministre de l'agriculture en amont du congrès de la FNSEA


Le ministre de l’agriculture affirme vouloir marier souveraineté alimentaire et transition écologique, et estime que la population agricole ne peut descendre sous son niveau actuel de près de 400 000 agriculteurs « pour des raisons d’occupation de l’espace », mais ne veut pas pour autant envoyer les jeunes « au casse-pipe ».
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Qu’allez-vous annoncer aux adhérents de la FNSEA à Dunkerque ?
Marc Fesneau : « Je viens pour rendre des comptes sur ce qu’on a fait (…), pour dire quel est le calendrier (…). La question, ce n’est pas d’être populaire, c’est de répondre à la crise et à la colère des agriculteurs. Il arrive assez régulièrement que les congrès de la FNSEA soient un peu toniques, voire plus. »
Que répondez-vous aux autres organisations syndicales qui reprochent à la FNSEA une « cogestion » de la politique agricole ?
Marc Fesneau : « On a besoin d’écouter tout le monde. Les syndicats nourrissent parfois entre eux une espèce de querelle de modèles. Mais moi, j’ai besoin de tous les modèles. (…) : des jeunes en transition, qui ont envie de s’installer sur un ou deux hectares pour faire du maraîchage – ce que je ne veux pas, c’est les envoyer au casse-pipe –, tout autant que ceux qui ont envie de produire, du lait, des céréales, du porc, pour exporter en Chine, en Algérie. »
La FNSEA a évoqué un « plan de cessation d’activité » pour les agriculteurs les plus en difficulté. Est-ce une mesure que vous envisagez ?
Marc Fesneau : « Mon objectif n’est pas de supprimer des agriculteurs (…). En Italie, c’est 1,2 million d’agriculteurs pour une population quasi équivalente (à la France). 400 000 agriculteurs, pour des raisons d’occupation de l’espace, pour des raisons de besoins territoriaux (…) c’est un objectif que je me fixe (pour la France).
Ma responsabilité, ce n’est pas le plan social, mais c’est de faire en sorte que les éleveurs retrouvent de l’air (…) Il peut y avoir des cas où il y a des gens qui ont besoin de sortir de l’agriculture et ça, on est en train de regarder. »
Le manque d’eau dans certaines régions ne met-il pas en péril certaines cultures ?
Marc Fesneau : « On a besoin d’avoir un système qui n’épuise pas la ressource en eau et en même temps qui s’adapte au changement climatique (…). L’eau dans les Pyrénées orientales pour la vigne, ce n’est pas pour faire des hectares de plus, c’est juste pour ne pas qu’elle meure.
Si (les agriculteurs) sont en impasse dans l’Aude à cause de l’eau, je ne vais pas leur dire que le mieux, c’est qu’ils disparaissent. Ce que je veux, c’est faire transiter le modèle. Est-ce que sinon je me résous à ce qu’il y ait des pans entiers de territoires qui soient inexploités ? On va faire quoi? Des panneaux photovoltaïques et de la broussaille ? »
Depuis le début de la crise, vous avez surtout proposé des solutions de court terme. Que faire face au changement climatique ?
Marc Fesneau : « Quand vous avez +4°C, peu importe le scénario, (…) les productions vont évoluer territorialement par nature et donc on a besoin d’adapter notre agriculture. Si les rendements baissent chaque année, vous n’accédez pas à la souveraineté alimentaire. »
Allez-vous ré-autoriser des molécules interdites en France pour des raisons de santé et d’environnement comme le demandent certaines filières telles que les betteraviers ?
Marc Fesneau : « Les agriculteurs ont tout à fait en tête l’idée qu’il faut faire la transition. Ce qu’il ne faut pas, c’est les acculer, c’est-à-dire interdire trop vite ou ne pas donner une trajectoire alternative (…). Il faut que les autorisations soient données plus vite, sur le biocontrôle par exemple. Dans les Hauts-de-France (où se tient le congrès de la FNSEA), il y a la question de la culture des endives. (…). On essaie de trouver une voie pour ne pas qu’elle disparaisse. »
Quand présenterez-vous la nouvelle version du plan Écophyto sur la réduction d’usage des pesticides ?
Marc Fesneau : « Dans les jours qui viennent. Ce qui veut dire (…) que la pause était une pause et pas un abandon. »
Sur les retraites des agriculteurs, serez-vous en mesure de concrétiser la réforme dès 2026 comme prévu par la loi ?
Marc Fesneau :  « Ce n’est pas une affaire budgétaire (..). C’est une affaire de mise en œuvre. On a un petit sujet technique (…) on va trouver la solution. L’objectif, c’est 2026. »