Dans un horizon toujours obscur, ce rendez-vous alsacien aura ressemblé à une éclaircie. Stella Assange a assisté mardi dernier à Strasbourg à un spectacle monté par une comédienne dramaturge et une comédienne metteuse en scène. Il évoquait le sort de son mari Julian, incarcéré en Angleterre depuis 2019. Le fondateur de Wikileaks est sous le coup d’une demande d’extradition des États-Unis où il encourt une peine de cent soixante-quinze ans d’emprisonnement. Il lui est reproché d’avoir publié des documents confidentiels sur les opérations militaires menées par Washington en Irak et en Afghanistan et des exactions commises par les Gi’s.
 L’opinion publique est avec nous, mais cela ne suffit pas pour l’instant à stopper la menace d’extraditionÂ
Stella Assange
À Strasbourg, Stella Assange a lu un poème de son époux, père de ses deux enfants nés en 2017 et 2019, écrit dans sa prison de haute sécurité de Belmarsh et répondu aux questions d’un public convaincu. « Tous ont trouvé insupportable l’énorme injustice dont il est victime », a-t-elle dit au JDD. Depuis plusieurs semaines, à Strasbourg comme au Parlement européen en décembre, elle s’efforce de mobiliser sur « l’urgence de la situation ». « L’état de santé physique et psychologique de Julian n’est pas bon et il faut bien comprendre que le combat continue, ajoute-t-elle, l’opinion publique est avec nous, mais cela ne suffit pas pour l’instant à stopper la menace d’extradition. »
Une procédure d’appel a été enclenchée
alors qu’il n’a commis aucun crime. »
Les espoirs placés dans l’élection du démocrate Joe Biden à la Maison-Blanche se sont vite dissipés. Le président élu en novembre 2020 est resté sur la position américaine définie à l’origine des fuites organisées par Wikileaks. Julian Assange reste la cible. « Il est désigné comme un traître, alors même qu’il n’est pas citoyen américain, mais australien », pointe sa femme, qui déplore la faiblesse des États face à Washington. « Le Premier ministre australien a été à la remorque en ne protégeant pas l’un de ses nationaux », accuse-t-elle. Elle dénonce aussi l’attitude de la Suède qui avait déclenché, à la suite de la plainte de deux femmes, une procédure d’agression sexuelle contre son mari, finalement sans fondement.
Espionné par la CIA
Le républicain Donald Trump avait été plus offensif. Pendant son mandat, Julian Assange avait été espionné par la CIA au sein même de l’ambassade d’Équateur à Londres où il s’était réfugié de 2012 à son arrestation par la police anglaise dans ces mêmes lieux en avril 2019. Un projet d’assassinat aurait même été fomenté contre lui, sous l’égide du secrétaire d’État, Mike Pompeo. « Mais, avant même l’arrivée de Trump au pouvoir, rappelle Stella Assange, la ligne des États-Unis était déjà dure, comme en témoignent les déclarations d’Hillary Clinton, ministre de Barack Obama ».
Son avocat Antoine Vey
dénonce Antoine Vey, mais c’est une affaire politique. Il faut que les gouvernements européens fassent pression pour mettre fin à ce qui s’assimile à une détention arbitraire ». Assange a publié des informations exactes, ajoute l’avocat. Il est notable que les journaux qui les ont publiées aux États-Unis et en France n’ont pas été poursuivis. À Londres, Stella Assange refuse de baisser les bras. Elle veut rester persuadée que son mari finira par être libéré.