INTEMPERIES. Ajaccio : au Petit Capo, "on ne pensait pas que l'eau monterait si vite"


Il fallait chausser ses bottes pour pénétrer dans la propriété d’Helena, ce lundi 19 décembre, au petit Capo. Derrière le portail, le jardin n’était plus qu’un large miroir d’eau reflétant le ciel. Une vision qui désole la propriétaire et les amis qu’elle accueillait le temps d’une semaine et qui ont été surpris par la montée des eaux, vendredi.

« Il était 9 h 30 quand on a commencé à avoir de l’eau dans la maison. Vers 10 heures, en voyant que ça continuait à monter, j’ai dit  : il faut qu’on bouge, qu’on parte  ! Et en l’espace de 10 minutes, on a eu 30 centimètres d’eau. On ne pensait pas que l’eau monterait aussi vite », raconte Anouk. Avec son mari et ses deux enfants, elle se réfugie sur une butte derrière la maison, avant d’être évacuée par les pompiers.

Comme Anouk et sa famille, une quinzaine de personnes ont dû être prises en charge par les secours, vendredi au Petit Capo, où aucun blessé n’est à déplorer. Avec des dégâts matériels parfois conséquents  : un voisin ayant refait sa maison à neuf récemment pourrait bien être confronté à des dégâts irréparables et plusieurs véhicules ont dû être remorqués hier car définitivement hors d’usage. Les sinistrés attendaient hier leur assureur pour faire le point sur la prise en charge des dommages.

Absence d’entretien ?

Selon les habitants de ce lotissement informel et jamais régularisé, les inondations seraient dues au ruissellement des eaux venues du col de Canareccia, mais aussi du débordement du cours d’eau de Sevani qui serpente entre les propriétés et passe sous le pont que traverse la piste en terre.

Problème, toujours selon les habitants  : le cours d’eau aurait vu son lit s’élever progressivement sous l’effet des déversements de sable occasionnés par les travaux de la route de Saint-Antoine, dont la CdC est maître d’ouvrage. Ils pointent également la responsabilité des services de la mairie dans le manque d’entretien et de curage du cours d’eau dont une portion passe sur le domaine privé communal.

 Intempéries de vendredi : des résidents de Petit Capo mis en sécurité

« Ils ont dit qu’ils ne pouvaient rien faire », affirme-t-elle. Les riverains déplorent en outre le sous-dimensionnement des buses d’évacuation situées sous le pont, qui, relatent-ils, ont été rapidement submergées vendredi. Désabusés, certains riverains se sont résolus à ôter un peu de sable du ruisseau, bien que l’opération soit passible de sanction par la police de l’eau.

Reste que cette situation soulève une fois encore la question de l’urbanisation de ce secteur situé en zone inondable, mais où, selon les riverains, les habitants à l’année sont toujours plus nombreux et pourraient s’élever à une cinquantaine aujourd’hui. Une vulnérabilité que le changement climatique et l’accentuation des épisodes méditerranéens pourraient encore mettre à l’épreuve à l’avenir.

Inondations et régularisation  : La mairie ne répond pas

Elle n’a pas non plus souhaité répondre à nos questions sur la régularisation de Petit Capo.

Depuis un demi-siècle, les tentatives engagées pour donner un cadre juridique à ce lotissement construit en toute illégalité sur une zone inondable (le secteur avait déjà été fortement inondé en 2008) ont plusieurs fois été engagées sans jamais aboutir.

L’histoire est bien connue des Ajacciens  : l’attribution à des fins clientélistes, dans les années soixante, par la commune propriétaire du site, de baux individuels, précaires et révocables, permettant la construction de cabanons de pêcheurs, sorte d’abris de jardin. Au fil des années, ces cabanons se sont transformés en villas de tailles diverses, plus d’une centaine y est aujourd’hui recensée.

La création d’un lotissement communal avait alors été envisagée

La mairie explique alors qu’elle souhaite avancer « à petits pas »

 VIDÉOS. Des inondations à Ajaccio après les précipitations de ce vendredi matin

Ces derniers, dont une grande partie s’acquitte chaque année non seulement de la taxe d’habitation mais également de la taxe foncière, souhaitent la résolution du dossier. Un recensement des titulaires des baux (certains ayant été transmis ou vendus depuis les années soixante) est alors réalisé. La création d’un lotissement communal évoquée par le passé est finalement jugée inconciliable avec le Padduc et la loi Littoral.

Trois pistes sont donc évoquées dans le cadre de la commission  : la création de baux emphytéotiques, la vente de terrains sans viabilisation avec interdiction de revente durant quinze ans, enfin, la vente de terrains, toujours avec l’interdiction de revente durant quinze ans mais avec viabilisation.

La réalisation d’un réseau électrique enterré sur trois kilomètres et celle d’une adduction d’eau potable pour un coût estimé à environ 25 000 euros par lot sont notamment envisagées. Appelés à se prononcer, les habitants de Petit Capo ont penché pour cette dernière option. « Il y a environ un an, des géomètres sont venus délimiter les terrains », assure un résident resté depuis sans nouvelle de la mairie. Le dossier semble au point mort.

Le point de la CdC sur ses travaux

Les services des routes de la Collectivité de Corse dont les travaux ont été pointés du doigt par certains résidents de Petit Capo, apportent des précisions  : « La Collectivité a réalisé des travaux de rectification de la chaussée entre le col de Saint-Antoine et le col de Canareccia sur les RD 11B et RD 111B. La voirie desservant le secteur du « Petit Capo » depuis la RD 111 B n’est pas une voirie qui relève de la compétence de la CdC. Les travaux réalisés par la CdC ont fait l’objet d’études hydrauliques et d’une autorisation au titre de la loi sur l’eau par arrêté préfectoral. Par ailleurs cette opération a été financée dans le cadre du Plan exceptionnel d’investissement. Les ouvrages hydrauliques réalisés sur les RD 11 B et RD 111B ont correctement fonctionné et ne montrent pas de désordres particuliers liés au dernier épisode pluvieux ».

Les services de la CdC accompagnent leur réponse d’une carte de la DDT 2A des risques naturels en Corse-du-Sud, signalant la zone de Petit Capo comme zone inondable.

Orange dans l’attente d’un terrain pour implanter une antenne

La mort d’un lieu paradisiaque nous voulons garder la magie de Capo di Feno ». Interrogé sur ce dossier, Orange assure qu’il reste « à la disposition des collectivités pour installer l’antenne ». L’opérateur attend que la mairie désigne un terrain pour cette implantation.