‘Iota’, mangas, Damso… l’interview passionnée de Lous and The Yakuza


Lous and The Yakuza, c’est un charisme hors-norme et une matu­rité décon­cer­tante, pour une jeune artiste qui joue avec les codes. On l’a ren­con­trée pour une inter­view à Paris, le jour de la sor­tie de son deux­ième album : l’ex­cel­lent Iota. Autour d’un verre, on a par­lé de ce deux­ième opus ‑forcément- mais aus­si de sa pas­sion pour les man­gas, de son acolyte Damso, de pos­i­tiv­ité, de poli­tique, d’art en général. Une dis­cus­sion pas­sion­nante, jalon­née de rires francs.


Ça va ? Com­ment tu te sens ?

La journée est pleine d’é­mo­tions. Trop con­tente de la réac­tion de mes fans, j’ai pas encore vu la réac­tion des gens qui sont PAS mes fans [haha]. J’ai checké Twit­ter mais du coup je vois que ma com­mu, j’ai pas encore Googlé mon nom [haha]. Pour l’in­stant les gens sont hyper con­tents, so sup­port­ive… Je m’at­tendais pas à autant d’amour des gens qui me suiv­ent, ils ont l’air fiers de moi, j’ai l’im­pres­sion qu’ils sont de ma famille. Ils sont là en mode “tu vas y arriv­er”. Mais quoi? Ce matin j’é­tais un peu vidée. C’est telle­ment bizarre de sor­tir un album ! C’est comme partager un secret hyper impor­tant à tout le monde.
 
Oui, il y a quelque chose d’in­time et dès que l’al­bum est sor­ti, il n’est plus totale­ment à toi ?
C’est ça. J’ai l’im­pres­sion que l’u­nivers s’est aligné ! Parce que quand je me suis réveil­lée, Damso m’a appelée, et je pleu­rais. Il m’a dit de me focus sur les bonnes choses, m’a don­né plein de bons con­seils et j’é­tais là : “I don’t deserve you” [haha] ! “Je t’aime mer­ci, t’es le meilleur”. Franche­ment tout le monde a été trop mignon avec moi. Et puis là on va aller à la release, j’ai hâte ! Parce que je m’ha­bille pas comme ça dans la vraie vie [elle mon­tre sa tenue, ultra-classe évidem­ment]. Si tu m’avais vue en train­ings… Un moment je me suis même dit, que j’al­lais te pro­pos­er de faire l’in­ter­view dans ma cham­bre. Mais ma cham­bre est dans un état pas respectueux [haha]
 
Est-ce que c’est plus dur de se lancer dans un deux­ième album que pour le premier ? 
Je l’ai fait comme le pre­mier ! Pour le pre­mier je l’avais écrit en 3 mois de mai à juil­let 2017, et là pareil je suis par­tie au Mex­ique en mai l’an­née dernière. Et en juil­let j’avais fini ma sélec­tion. Claire­ment de mai à juil­let ça a l’air d’être ma péri­ode créa­tive ! Et puis on a retra­vail­lé ensem­ble, je suis repar­tie au Mex­ique en septembre-octobre 2021, et mon album était fini. J’ai pas de pres­sion, c’est l’in­dus­trie qui met la pres­sion. Je fais juste ce que j’aime et je suis con­tente, reconnaissante.

Pas d’ap­préhen­sion à recom­mencer à zéro ?

Mmmh. Là je suis déjà sur le troisième. Parce que je com­mence l’écri­t­ure bien en amont du stu­dio ! C’est pareil à chaque fois. J’ai pas d’at­tentes, pas d’ap­préhen­sion. J’e­spère par con­tre que les gens vont l’aimer, bien sûr. J’es­saie d’avoir une pen­sée pos­i­tive : si les gens l’ai­ment pas… Je recom­mence. Et je le garde pour moi. Parce que même si les gens ne l’ai­ment pas, ça veut pas for­cé­ment dire que c’est un échec. Ça veut juste dire que les gens ne l’ai­ment pas.
Comme en pein­ture : si je trou­ve une pein­ture mag­nifique et qu’à l’u­na­nim­ité tout le monde la trou­ve éclatée au sol, les gens vont dire “cette pein­ture est éclatée”. J’es­saie de ne pas voir le monde comme ça, j’es­saie de me dire que c’est de l’art, en fait. Que c’est cen­sé être appré­cié ou ne pas être appré­cié. En tant qu’artiste, c’est impor­tant de se sou­venir de ça. La musique c’est comme la pein­ture, le design, la mode… Dans un mag­a­sin, tu pass­es devant des T‑shirts, y’en a plein que tu n’aimes pas. Et pour autant, on ne voue pas un culte de haine aux T‑shirts qu’on n’aime pas ! C’est que de l’art, des choses à partager. Ça n’a aucun but, ça ne sert qu’à être appré­cié ou non. Si c’est pas appré­cié, c’est pas grave.
 
Depuis quelques jours sur Insta­gram, tu asso­cies une chan­son de l’al­bum à un man­ga. Tu peux nous expliquer ?
Je suis obsédée par les man­gas. J’ai une petite bib­lio­thèque de… 2000 ouvrages. Vrai­ment c’est une mal­adie [haha] ! Là je le fais de façon très obvi­ous, mais on a ini­tié ça depuis le début dans l’i­den­tité de l’al­bum. Je m’in­spire de la cul­ture ani­ma­tion et man­ga, le pre­mier clip a été inspiré par Satoshi Kon, réal­isa­teur de Papri­ka…  [Devant mon regard qui trahit mon incul­ture totale en ter­mes de man­ga, elle précise/vulgarise] Si je dois faire une com­para­i­son occi­den­tale, Miyaza­ki ce serait Walt Dis­ney, et Satoshi Kon plutôt Pixar, avec un côté plus décalé. Satoshi Kon il a donc fait Papri­ka, Mil­le­ni­um actress, Per­fect Blue : des films anthologiques, extra-connus pour être décalés, notam­ment dans la réal­i­sa­tion. Dans ses coupes, dans la super­po­si­tion d’im­ages, des tran­si­tions étranges… Pour mon pre­mier clip je me suis inspiré de sa façon de réalis­er et de faire des cuts, qui est vrai­ment étudiée dans les écoles de ciné­ma. Et j’ai appelé Wendy Mor­gan, ma réal­isatrice, en lui dis­ant qu’il fal­lait qu’on s’en inspire. Elle était là “WHAT?” parce que c’est très com­pliqué. Mais on s’est lancés, on a fait le clip de “Kisé” et puis j’ai voulu faire le deux­ième : c’est un one shot, comme une per­for­mance live, inspiré de Miyazaki.

Là je l’ai vrai­ment fait de manière fla­grante, en expli­quant “voilà un man­ga et voilà une musique ! ” alors que depuis le début du pro­jet c’est plutôt sug­géré. Pre­mier clip Satohsi Kon, deux­ième clip Miyaza­ki… Toutes les cov­ers et art­works de mon album sont inspirés de Kazuo Kamimu­ra, un des man­ga­ka les plus con­nus des années 70, très under­ground dans l’e­sprit… Et puis j’ai fait la live ses­sion avec VEVO pour “Hiroshi­ma”, on s’est inspiré de Galaxy Express ‑un des pre­miers man­gas que j’ai lus étant petite- et du per­son­nage Mae­tel… Là y’a encore quelques visuels qui vont sor­tir, tous inspirés par des per­son­nages dif­férents, et à chaque fois c’est une ré-interprétation d’une oeu­vre mais vrai­ment de manière fla­grante. Et quand j’en par­le ça me fait plaisir parce que c’est une cul­ture à laque­lle je suis telle­ment attachée, j’adore le Japon, j’adore la japan­i­ma­tion, les man­gas. L’autre fois, Brut est venu à la mai­son, et la jour­nal­iste n’en croy­ait pas ses yeux l’air de dire “mmmh… t’es folle” [haha]. C’est vrai­ment ma pas­sion ultime.
Je pen­sais que j’al­lais être seule dans mon délire et les gens ont bien réa­gi, même ceux qui s’en foutent des man­gas. Ça donne envie à cer­tains de s’y intéress­er, et c’est le meilleur com­pli­ment qu’on peut me faire. Quand on me dit “Tu m’as don­né envie de lire” ça me fait encore plus plaisir que “j’aime ta chan­son”. Parce que la lec­ture c’est telle­ment impor­tant, c’est la vie.
 
Deux invités sur l’al­bum : Ben­jamin Epps et évidem­ment Damso… Pour toi, com­pos­er et écrire de la musique c’est tou­jours un partage, ou ça peut se con­cevoir en “Solo” ?
Je les conçois tou­jours en solo. Dans mon pre­mier album y’a pas de feat, et dans le deux­ième finale­ment y’en a qu’un : Damso. Parce que Ben­jamin Epps fait mon interlude.
 
Non parce que, de ce que tu mon­tres sur les réseaux, t’as l’air de faire quand même beau­coup de choses en équipe, mais la musique en se conçoit en solo ?
Exacte­ment ! Et puis une fois que j’ai fini mon écri­t­ure, et fini de con­cep­tu­alis­er parce que dans mon pro­jet je veux que les formes d’art se mélan­gent. Et c’est ça qui est bien avec la plate­forme musi­cale : quand tu fais de la musique, tu peux faire un clip et y créer du mobili­er, des struc­tures. La musique nous laisse l’e­space pour créer telle­ment de choses, là où par exem­ple dans la pein­ture tu vas pas… Quoique, je viens d’y penser mais tu pour­rais met­tre un haut-parleur der­rière une toile, et la toile chante quand les gens passent devant, ça peut être cool ! Mais ce que je veux dire c’est que c’est moins évi­dent que dans la musique, où on peut créer. Ça se fait un peu tout seul mais après, dès que j’ai fini ma con­cep­tu­al­i­sa­tion, je vois avec mes pro­duc­teurs, c’est un tra­vail d’équipe où on mélange mes inspi­ra­tions avec les leurs, on passe au clip même chose, et même le mixeur rajoute quelque chose. Mon album est mixé par Jaycen Joshua, mixeur extra­or­di­naire qui a mixé ‑je pense- l’en­tièreté de l’in­dus­trie améri­caine ! Il est vrai­ment très fort, adorable et telle­ment sup­port­ive…  Cha­cun amène sa pat­te, le tout c’est de choisir les bonnes per­son­nes qui entrent dans ta pat­te. Et puis quand on cherche des col­lab­o­ra­teurs… C’est la pre­mière fois de ma vie, au stu­dio, que je me suis dit que j’al­lais met­tre la voix de quelqu’un d’autre. Et c’é­tait avec Ben­jamin. Je m’é­tais jamais dit ça en studio.
 
Parce que du coup pour Damso, ça s’est passé comment ? 
On était au télé­phone, comme d’hab “blblblblbl” [très bonne imi­ta­tion de conversation-charabia]. Je par­le pen­dant des heures, lui il écoute [haha] ‑parce qu’il est très très gentil- et pen­dant que je par­le, mon coude appuie sur la touche Espace de mon PC et Damso entend le “tum­dum­dum”, le début de la mélodie de “Lubie”. Il me dit “c’est quoi ça ?”. Je réponds “oh par­don, c’est un morceau que j’ai fait et que j’ai pas fini”. Il me dit de lui envoy­er, qu’il trou­ve ça mag­nifique. Il a même pas enten­du ma par­tie dessus. Il écoute, et 7 min­utes après il m’en­voie son cou­plet. One shot. Vrai­ment c’est fou dans notre dis­cus­sion What­sApp, y’a le mes­sage où je lui envoie, et sa réponse en dessous en voicenote, son cou­plet quoi. Et on fait que des chan­sons douces ensem­ble ! Pareil pour le morceau dans son album, “Coeur en miettes”. Ensem­ble on a une vibe très artis­tique. Je pense que, quand l’in­dus­trie voit Lous And The Yakuza et Damso, ils se dis­ent “OÙ EST LE BANGER ? OÙ EST LE BANGER ?” et nous on arrive avec un guitare-voix folk [elle chante] “J’ai envie d’te dire je t’aime” et “Is he lone­ly, hmm-hmm ?” [haha­ha] Les gens de mon équipe sont tou­jours en PLS quand je leur fais écouter un son, l’air de dire “ah ! vous avez encore décidé d’être dépres­sifs? Super  ! ”

 
Pour toi, quelle chan­son résume le mieux, ou en tout cas définit le mieux l’album ?
Très com­pliqué ! Parce qu’elles font toutes par­tie de l’al­bum pour cette rai­son. Ok, “Ciel” et “Yuzu balade” : le début et la fin. Parce que “Ciel” c’est une prière, c’est l’ou­ver­ture et “Yuzu balade” c’est l’ac­cep­ta­tion, j’ac­cepte que j’aime la per­son­ne. L’or­dre est impor­tant dans l’al­bum et c’est plusieurs facettes de dif­férentes his­toires, mais qui s’emboîtent pour en créer une nou­velle. Puisque l’al­bum est une oeu­vre en elle-même, et moi je déteste le con­cept de faire des com­pi­la­tions… Et mes fans en peu­vent plus, là on m’a insultée tout le matin : “ton album ne fait que 30 min­utes, tu te fous de ma gueule?” [haha].

 

Oulah oui, un peu sec.

Mais telle­ment ! Déjà pourquoi vous regardez le tim­ing d’un album ? On s’en fout du temps ! Ce qui est impor­tant c’est ce qui est dit. J’ai répon­du à l’un d’en­tre eux pour dire “écoute, j’ai pas envie de dire de la m*rde pour avoir un long album, c’est pas grave.” Je ferai peut-être un long album le jour où tous les mots seront impor­tants. Tout ça pour dire que chaque par­tie, même si c’est court pour cer­tains, a son impor­tance pour moi. J’ai choisi par­mi 30 à 40 morceaux pour venir à ces 12 titres, et c’é­tait telle­ment dur. Mais je savais que je voulais être con­cise dans mon pro­pos, aller droit au but”. Comme dans Gore, où il y avait 10 morceaux, c’é­tait pire ! Là j’en ai rajouté deux. J’aime pas les albums longs, j’ai jamais aimé.
Après je peux com­pren­dre, tout le monde veut + de morceaux parce qu’au­jour­d’hui on con­somme la musique beau­coup plus vite qu’a­vant. On écoute la musique comme si elle péri­mait. Moi j’é­coute tou­jours l’al­bum de 2013 de James Blake, comme si ma vie en dépendait  !
 
Ta chan­son préférée de l’al­bum ? Peut-être celle que tu as le plus hâte de jouer live ?
Ça se tape entre “Autodéfense” et “Tré­sor”. T’as aimé “Autodéfense” aus­si? Elle revient sou­vent (j’ai demandé tout à l’heure sur Twit­ter). Je pen­sais pas du tout ! Parce que la struc­ture est pas clas­sique, y’a pas de drum pen­dant une minute… “La mon­ey” c’est aus­si une de mes préférées à per­form. Je l’ai jouée pen­dant ma pre­mière tournée alors que c’é­tait pas sor­ti, et c’est le son où, même si un jour tout le monde s’en fout dans le pub­lic, moi j’ai l’én­ergie au som­met. Tout à l’heure quelqu’un m’a dit que ça lui fai­sait penser à MIA. J’aime bien que ça représente vrai­ment la colère dans laque­lle j’é­tais. C’est la pre­mière fois que je crie dans un cou­plet : “L’amour ne m’a lais­sé que ses vices ! ” C’est trop bien, trop libérateur.

On a l’im­pres­sion que pour toi, par­ler d’in­time c’est sou­vent poli­tique. Dans le sens où dans l’al­bum tu nous par­les de toi et d’amour, mais en fil­igrane on sent qu’il y a d’autres choses : le suc­cès, le mode survie, la bizarrerie, l’ar­gent. Est-ce que tu le vois comme ça ? 
Car­ré­ment, parce que l’amour se trou­ve dans toute ces choses ! La poli­tique j’ai tou­jours voulu en faire par­tie, et ça fait deux ans que je veux m’en défaire. Et en fait j’ar­rive pas à m’en défaire parce que tout est poli­tisé. Je veux dire on a réus­si à poli­tis­er le voile : c’est grotesque, ça n’a absol­u­ment rien à voir avec la poli­tique. Pour­tant tout est poli­tisé, dans une ère où tout le monde s’indigne, s’in­surge, tout le monde pense que ce qu’il a à dire est impor­tant. C’est mar­rant parce que la rela­tion que les gens ont avec la parole a totale­ment changé : aujour­d’hui on dit tous ce qu’on veut quand on veut, et c’est les mêmes gens qui vont te dire qu’on “ne peut plus rien dire”. On est dans l’ex­trême ouver­ture d’e­sprit où tout le monde peut par­ler non-stop, et d’un autre côté on ne peut plus néces­saire­ment tout dire. On vit dans une époque un peu louche quand même. Avant la parole à grande portée était détenue par une poignée de per­son­nes, médias, intel­lectuels, politi­ciens, sci­en­tifiques. Aujour­d’hui tout le monde peut avoir le même impact. Le prési­dent de la République fait moins de retweets que Elon Musk. Kanye West fait plus par­ler de lui qu’un mec qui est en train de trou­ver, je sais pas, un vac­cin con­tre la polio. Et donc notre échelle de valeur a changé. Ne pas être poli­tique aujour­d’hui, ça relève de l’im­pos­si­ble. Ça ne va pas avec l’ère de notre temps. Si ça se trou­ve, dans une de mes chan­sons on va penser que je revendique ça, que cette phrase est pour le fémin­isme etc… Parce que les gens ont aus­si, plus que jamais, besoin d’ap­partenir à une communauté.
 
Oui et sou­vent, tu as envie d’ex­trapol­er et de trou­ver du sens…
Oui ! Et par­fois y’en a absol­u­ment pas, ou c’est pas le leur. Mais c’est ça qui est beau avec la musique et l’art en général. Le dernier musée où je suis allée c’é­tait à Los Ange­les et il y avait des pein­tures de Picas­so. Et je me posais la ques­tion du sens, devant les oeu­vres. J’ap­pré­ci­ais avec quelqu’un qui était à côté de moi, on com­mence à par­ler, et le mon­sieur défonce la pein­ture en mode “son trait est dégueu­lasse”. On ne voy­ait pas du tout la même chose, on en a débat­tu et c’é­tait hyper intéres­sant ! Ce qui est bien dans l’art c’est que tout est sub­jec­tif. Et il faut se défaire de ça, pour se focalis­er sur les gens qui aiment bien. À quoi bon met­tre son énergie sur les gens qui n’ai­ment pas ? Même si beau­coup émet­tent une cri­tique con­struc­tive. Mais qu’est-ce qu’être con­struc­tif dans l’art ? Y’a beau­coup de gens pour qui l’art c’est de la tech­nique, donc pour eux cer­taine­ment que je fais un album pour­ri parce que j’ai pas la tech­nique de Mari­ah Carey. Pour d’autres, l’écri­t­ure fait la chan­son. Il faut savoir ne pas être trop sérieux dans sa déf­i­ni­tion et dans sa cri­tique. Et aus­si ne pas se pren­dre trop au sérieux en tant qu’artiste.
 
Tu touch­es à pas mal de choses à coté de la musique : pein­ture, design, mode, tra­duc­tion de poésie, tu es bien­tôt offi­cielle­ment autrice parce que tu pré­pares un roman. Com­ment tu crées de la cohérence entre tout ça ?
Y’en a pas [haha] ! Après je pense que c’est moi la cohérence, sim­ple exis­tence rend les choses cohérentes. Je suis rwandaise, con­go­laise, j’habite en Bel­gique, je suis signée en France, mon man­age­ment est améri­cain, j’ai fui la guerre et en même temps j’ai fini dans un inter­nat de super-riches entre mes 15 et 18 ans, et je suis fan du Japon comme si c’é­tait ma patrie. I make no sense, ma sim­ple exis­tence est un freakin’ non­sense [haha] ! Je pense que ce n’est que la con­ti­nu­ité. Le tout c’est de rester hon­nête. C’est ma seule cohérence, la seule chose que je veux être. Ou bien être hon­nête dans ma malhonnêteté.
 

C’est à dire ?

La plu­part du temps on écrit des choses, on pense qu’elles sont vraies… Et puis dans deux ans je vais regarder le même texte et me dire “com­ment j’ai pu penser ça ?”. Même si j’ai tort j’ai envie être sincère dans mon erreur, parce que c’est comme ça que je vais appren­dre et que je ne vais jamais le regret­ter. Pour l’in­stant je n’ai pas de regret dans ma vie. Et j’e­spère que ça va continuer  !
 

Un dernier mot ? 

Il faudrait tous qu’on se respecte les uns et les autres, et qu’on s’aime [énorme rire]. C’est mon souhait ! T’imag­ines on s’aime tous, sur la Terre entière ? Comme t’aimes ta famille ou ton amoureux, mais entre incon­nus. En se voy­ant dans la rue, on se dit “je t’aime” et on se fait un câlin. Le monde serait trop bien ! Ça a l’air bateau, on m’a tout le temps dit que c’é­tait cliché, mais je préfère être cliché et être pour l’amour. Dans la vie je préfère quand je rigole  !

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