Le ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer nationale, qui s’est tant battu pour continuer d’accueillir les enfants, paie cher le dernier protocole sanitaire et ses vacances à Ibiza. Cinq ans qu’il tient les rênes du « mammouth », un record sous la Ve République, et c’est dans la dernière ligne droite que tout a foutu le camp. Au front depuis deux ans de crise sanitaire, Jean-Michel Blanquer avait le sentiment d’avoir exécuté la mission présidentielle : garder l’école ouverte quoi qu’il en coûte, même si, pour cela, il avait parfois dû se battre « à mains nues », selon son expression, notamment au printemps 2020 lors du premier déconfinement, quand Édouard Philippe s’y refusait.Jeudy Politique – Le grand chapeau de BlanquerCe mantra d’Emmanuel Macron avait les faveurs de l’opinion et était cité en exemple chez nos voisins européens. Le ministre avait monté en octobre son think tank, le Laboratoire de la République, afin d’alimenter la campagne à venir. Mais rien ne s’est passé comme prévu. La vague Omicron a fait trébucher Jean-Michel Blanquer, le « bon élève » du gouvernement, celui que « Le Point » avait, en 2018, baptisé le « vice-président ». Et de « chouchou » du chef de l’État et de la première dame, il s’est mué en « boulet », selon un membre de la majorité. Une situation qu’il vit entre « rage » et « injustice », tant est immense son sentiment de ne pas avoir démérité.C’est une petite allumette qui a suffi à mettre le feu. Le dimanche 9 janvier, les chefs d’établissement apprennent dans la presse les dernières règles sanitaires. Une semaine plus tôt, ils avaient déjà découvert, toujours dans un média, les mesures pour la rentrée. « Au-delà du protocole qui change souvent, ce qui nous crispe, c’est le mode de communication : on ne peut pas découvrir dans un journal payant le protocole du lendemain matin », se désole Bruno Bobkiewicz, secrétaire général du SNPDEN-Unsa, principal syndicat des chefs d’établissement. Ajoutées au manque de concertation, ces erreurs de communication ont fait remonter le ras-le-bol des salariés de l’Éducation, obligés de lutter contre les contaminations et de bricoler chaque jour pour pallier l’absence des collègues, des assistants d’éducation, des surveillants malades et non remplacés. Les pieds du « mammouth » sont plus fragiles qu’il n’y paraît. Les réformes entreprises ces cinq dernières années – celle du lycée et du bac, celle de la formation initiale, la loi pour une école de la confiance, les changements dans la mobilité des enseignants, sans compter la réforme des retraites finalement abandonnée… – ont souvent mis les personnels dans la rue. « Je n’ai jamais autant manifesté que pendant ce quinquennat », assure Élise, prof de français dans un lycée parisien. Sans réussir à faire fléchir le ministre qui, jusqu’à la semaine dernière, s’enorgueillissait de tenir tête aux puissants syndicats de profs.
Trop bon élève, le ministre aurait dû dire non à des règles inapplicables
» La suite est connue en tout cas s’inquiète un membre de la majorité De nombreuses avancées ont été concédées : 8 000 renforts supplémentaires dans l’Éducation nationale voire « épuisé » selon certains. Le lendemain, il lâche : « Je ne suis pas parfait, je fais des erreurs. Je n’ai aucun problème à dire que je suis désolé de certaines choses. » Cela n’aura pas suffi : huit organisations syndicales, dont la puissante FCPE, première fédération des parents d’élèves, ont appelé à de nouvelles journées d’action, les deux derniers jeudis de janvier.
Pour les législatives, il est en quête d’une circonscription
Quand on lui pose la question, Blanquer ne confirme pas et ajoute : « Si on vous demande, vous direz que nous sommes ensemble pour très longtemps. »Sale séquence pour le ministre des profs qui espérait reprendre l’avantage en défendant son « très bon bilan » bientôt à la télévision face à Éric Zemmour. Même s’il exhorte la majorité à ne pas se laisser intimider et à valoriser son action, « on ne compte pas sur lui pour la campagne », prévient sans prendre de pincettes un pilier macroniste. La politique, il y a pourtant pris goût. « Je ne suis pas né dans un chou », aime répondre Blanquer quand on lui fait remarquer son manque d’expérience, voire sa naïveté. Endurci par cinq ans passés à dompter le « mammouth », il est bien décidé à aller au combat législatif. Il s’est mis en quête d’une circonscription en Île-de-France. Pour l’instant, c’est loin d’être gagné. Toute reproduction interdite