Les enjeux environnementaux comme les changements climatiques sont-ils assez abordés à l’école ? Non, soutiennent des élèves, qui ont l’intention de faire bouger les choses. Ils ont fondé un comité sur la question, composé de professeurs et de l’Association pour l’enseignement de la science et de la technologie au Québec (AESTQ), qui milite pour une révision de la formation.
C’est dans le cadre du programme optionnel de science et technologie de l’environnement en 4e secondaire que Marie Maltais et Olivier Cloutier, maintenant élèves de 5e secondaire à l’école privée Mont-Saint-Sacrement, à Saint-Gabriel-de-Valcartier, ont constaté que le sujet était peu discuté.
« Nous en avons parlé deux fois pendant une dizaine de minutes, pour la préparation d’un examen du ministère. Le contenu datait », raconte Olivier Cloutier. « Dans le cours régulier, il y a encore moins de questions environnementales qui sont abordées », renchérit Marie Maltais.
En parlant avec d’autres élèves, ils ont constaté que l’intérêt était pourtant là et que plusieurs ne savaient pas où trouver l’information. Les deux jeunes espèrent convaincre le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, de revoir le curriculum de formation scientifique.
« Beaucoup de questionnements »
y ont répondu.
La moitié des répondants du niveau secondaire disent ne pas être assez informés en classe sur les changements climatiques, et 70 % des élèves du primaire aimeraient recevoir plus d’information à l’école à ce sujet. Ils sont 62 % du niveau primaire à être inquiets face aux bouleversements climatiques, contre 57 % au secondaire. Marie Maltais et Olivier Cloutier comptent diffuser leur sondage plus largement avec l’aide de centres de services scolaires. Ils comptent également le transmettre à des étudiants du collégial.
« Les phénomènes comme les tempêtes ou les changements de température, qui se ressentent au quotidien, ressortent beaucoup. Il y a beaucoup de questionnements. Les élèves ne se sentent pas capables d’agir par rapport à ça », glisse Marie Maltais, qui estime que les jeunes devraient être mieux outillés.
Programme vieux de 20 ans
Le programme de science et technologie, enseigné aux élèves dès le primaire jusqu’en 3e secondaire, date d’une vingtaine d’années, renchérit Camille Turcotte, directrice générale de l’AESTQ.
On parlait d’environnement, mais très peu des changements climatiques », lance-t-elle.
Selon elle, les thèmes des programmes en science et technologie mériteraient d’être revus. « Il est temps de réviser. » Les enseignants doivent de plus être à jour dans leurs connaissances pour intéresser leurs élèves aux enjeux actuels. « Nous avons plusieurs signes sur le terrain qui montrent que les jeunes sont préoccupés par ces questions », dit Camille Turcotte.
Un sondage a été fait auprès des quelque 570 membres de l’AESTQ pour préciser leurs besoins en formation continue en ce qui a trait aux changements climatiques. Un total de 272 personnes ont répondu, preuve que cela préoccupe le milieu, pense-t-elle.
Bien que les élèves soient en mesure de trouver de l’information sur Internet ou par les médias, il y a une grande utilité à traiter des changements climatiques en classe, croit-elle. « Il y a un enjeu de désinformation, un jeune sur Internet peut se retrouver dans une bulle de mauvaises informations. L’école est là pour éduquer les jeunes. Et aussi pour en faire des citoyens allumés dotés d’un esprit critique, bien outillés pour se positionner face aux enjeux sociaux, à travers la confrontation d’idées avec leurs pairs. »
Camille Turcotte précise que le ministère de l’Éducation du Québec (MEQ) met actuellement en place un processus allégé de révision continue des programmes. Elle espère que celui de science et technologie sera le premier sur lequel le ministère se penchera.
De leur côté, Marie Maltais et Olivier Cloutier aimeraient bien voir l’ajout d’ateliers sur les changements climatiques et comptent poursuivre leurs démarches pour savoir ce que les jeunes aimeraient voir comme changements. Ils veulent mettre sur pied un réseau étudiant à partir de janvier prochain.
La directrice générale de l’AESTQ s’est jointe à leur comité, fondé au printemps dernier, après la réception d’un article de Marie Maltais qui portait sur ces questions et sa publication dans la revue de l’association. Des professeurs de l’Université du Québec à Rimouski en font également partie. Parmi eux figure le père de Marie, Martin Maltais, un spécialiste bien connu qui a ses entrées au ministère de l’Éducation et qui lui donne un coup de main.
Projet pilote
De son côté, Daniel R. Rousse a fait le choix de ne pas diriger une chaire de recherche pour plutôt s’activer à réaliser des projets en appui au comité.
« On prépare à l’ETS un programme de formation destiné aux gestionnaires et aux maîtres en exercice et en formation des écoles privées et publiques du Québec. Celui-ci va s’appeler “Grands enjeux environnementaux” », explique-t-il. Il espère qu’il y aura une première cohorte en 2024.
Le Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys, sur l’île de Montréal, s’est montré intéressé à l’implantation d’un projet pilote à cet égard. La première étape du projet serait d’aller à la rencontre d’enseignants, toutes matières confondues,pour avoir une idée des apprentissages qu’ils aimeraient transmettre concernant les changements climatiques.Le ministère de l’Éducation réagitDe son côté, le ministère de l’Éducation a indiqué vendredi au Devoir que des travaux sont actuellement menés en lien avec l’actualisation des programmes d’études en formation générale des jeunes, dans le but de les standardiser, et qu’une consultation a été menée.« La réflexion constante du ministère permet d’ailleurs de réfléchir sur le programme de sciences en formation générale des jeunes, écrit-on. Le ministère est conscient que son programme aborde de façon moins soutenue des enjeux devenus plus actuels qu’au moment où le programme a été établi. »On précise qu’une veille est menée et que des informations pertinentes sont récoltées en vue d’une éventuelle refonte du programme. Le moment de cette refonte n’a pas encore été déterminé, mais pourrait survenir dans « un horizon à court ou moyen terme », indique-t-on.Il n’existe pas de cours obligatoire concernant les changements climatiques, mais le ministère ajoute que, dans le nouveau programme de Culture et citoyenneté québécoise, il sera notamment question d’enjeux environnementaux.
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