Elle a bien failli disparaĂźtre de nos assiettes. Aujourd’hui, la Bonnotte, une pomme de terre ronde, Ă la peau trĂšs fine et au goĂ»t iodĂ©, cultivĂ©e sur l’Ăźle de Noirmoutier, s’exporte jusqu’au Japon ou Ă DubaĂŻ. Le tubercule n’a dĂ» son salut qu’Ă la dĂ©termination, Ă la fin des annĂ©es 1980, d’une coopĂ©rative de producteurs, soutenus par l’ Inrae et Monoprix. Ensemble, ils dĂ©cident de sauver cette variĂ©tĂ© fragile, qui ne peut ĂȘtre plantĂ©e et ramassĂ©e qu’Ă la main, rendant la mĂ©canisation de sa culture impossible.
La pomme de terre la plus chÚre du monde ?
Sa production reste d’ailleurs limitĂ©e Ă 100 tonnes, qu’il faut vendre vite, la primeur, rĂ©coltĂ©e entre le 8 et le 20 mai, ne se conservant qu’entre trois et six jours. Pas Ă©tonnant dĂšs lors qu’elle a Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©e pomme de terre la plus chĂšre au monde lors d’une vente Ă Drouot !A Noirmoutier, la production de pommes de terre ne se limite pas Ă la Bonnotte. Avec son microclimat, sa terre sablonneuse, nourrie de goĂ©mon et naturellement salĂ©e par les embruns, l’Ăźle offre des conditions idĂ©ales – il y gĂšle rarement – pour obtenir des pommes de terre hĂątives et primeur. RĂ©coltĂ©es tous les jours, sept variĂ©tĂ©s se succĂšdent sur l’Ăźle, du 15 mars au 15 juillet : SirtĂ©ma, Lady Christ’l, Zen, Bonnotte, Laurette, Anna lisa, Iodea.
Marins patates
« La pomme de terre est une tradition Ă Noirmoutier depuis le XIXe siĂšcle. Aliment complet pour les familles, elle Ă©tait produite jusqu’Ă la fin de la seconde guerre mondiale par des « marins patates ». Des Noirmoutrins Ă la fois pĂȘcheurs, sauniers, Ă©leveurs et agriculteurs selon la saison », explique Nicolas Paille, directeur de la coopĂ©rative agricole de Noirmoutier.En 1945, pour s’affranchir de l’intermĂ©diaire des courtiers agricoles, 350 de ces « marins patates » se regroupent en coopĂ©rative pour conditionner et vendre en commun leur production. Mais aussi se dĂ©fendre face Ă la pomme de terre bretonne, prĂ©fĂ©rĂ©e car moins coĂ»teuse, par la grande distribution. Pour faire face, les producteurs dĂ©cident de se faire connaĂźtre et d’investir, Ă la fin des annĂ©es 1980, 5 % de leur chiffre d’affaires dans de grandes campagnes de pub. Leur combat paie. La pomme de terre primeur de Noirmoutier est finalement reconnue par un arrĂȘtĂ© rĂ©glementaire et, en 1996, fait son grand retour sur les Ă©tals.
Label Rouge et IGP
De quoi encourager toute la filiĂšre locale, qui poursuit sa montĂ©e en gamme et obtient, en 2018, un label rouge obtenu pour quatre des sept variĂ©tĂ©s, et deux ans plus tard, la prĂ©cieuse Indication GĂ©ographique ProtĂ©gĂ©e (IGP). Sous l’impulsion du cahier des charges de l’IGP, les producteurs sont aujourd’hui engagĂ©s dans une dĂ©marche d’agriculture durable et zĂ©ro pesticide pour une partie de la production. « LimitĂ©s en termes de pĂ©rimĂštre par l’insularitĂ© et l’IGP, nous avons trouvĂ© un Ă©quilibre Ă©conomique. Sur 12 tonnes produites, un tiers de la production est rĂ©servĂ© aux restaurateurs, aux maraĂźchers et aux grossistes en fruits et lĂ©gumes et les deux-tiers vont en grande distribution ». En saison, la coopĂ©rative emploie 80 personnes pour le conditionnement et la vente des pommes de terre et 150 en comptant les renforts chez les producteurs.