La fin de l'exploit sportif ?


1896C’est la date des premiers Jeux olympiques de l’ère moderne. À l’initiative du Français Pierre de Coubertin, 241 sportifs se sont affrontés à Athènes. Depuis, les J.

O. ont lieu tous les 4 ans, comme lors des Jeux antiques à Olympie.2027C’est la date à partir de laquelle la moitié des records établis ne pourront plus être améliorés que de 0,05 % au maximum, soit l’équivalent de quelques millièmes de seconde au 100 m (selon l’Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport, Irmes).

La fin de l'exploit sportif ?

2068C’est la date à partir de laquelle 90 % des records sportifs ne pourraient plus du tout être dépassés, selon une modélisation effectuée par l’Irmes.«  »Nous arrivons à un stade où les limites physiologiques sont visibles » – GEOFFROY BERTHELOT, Chercheur à l’Insep »

la moitié des records seront établis à 99 mais aussi chez les hommes) montrent un palier, voire une régression, depuis plusieurs années.Il n’empêche que le processus de sélection des meilleurs athlètes montre des limites.

Au cours du XXe siècle, la taille des populations n’a cessé d’augmenter : l’humain a grandi en moyenne de 5 cm au cours de cette période. Une évolution morphologique qui a permis de sélectionner des athlètes toujours plus grands, plus puissants, et donc susceptibles de prouesses. Du côté du sprint par exemple, la taille des champions a augmenté en moyenne de 16 cm entre les années 1900 et le début siècle.

L’Américain Eddie Tolan, recordman du 100 m en 1932, mesurait 26 cm de moins que le géant de 1 m 96 Usain Bolt. Et il pesait 30 kg de moins. Mais depuis trois décennies, la taille des femmes et des hommes n’augmente plus dans des régions comme l’Amérique du Nord ou l’Europe, où la croissance était pourtant forte depuis siècle.

« En l’absence d’évolution des gabarits, ou de l’apparition d’un nouveau réservoir d’athlètes comme ce fut le cas avec les coureurs de fond d’Afrique de l’Est à partir des années 1980, il n’y a pas de raison que les records évoluent significativement », pointe François Desgorces, maître de conférences à l’université de Paris et spécialisé en physiologie de l’exercice.Est-on en train d’assister à une transition entre une période qui a vu des athlètes toujours plus impressionnants se succéder, et une ère où les nouveaux champions seraient morphologiquement semblables à leurs prédécesseurs ? En NBA, le championnat de basket-ball nord-américain, c’est déjà le cas. Dans ce sport, où le fait d’être doté d’une grande taille offre un réel avantage, les équipes américaines peinent à sélectionner des athlètes plus grands, et les meilleurs marqueurs plafonnent à une hauteur, déjà bien élevée, de 2 m.

Aussi, il faut bien l’avouer, l’image de l’athlétisme est moins illustre qu’autrefois. « Cette discipline doit faire face à la concurrence d’autres sports, souvent plus populaires et qui offrent davantage de visibilité, comme le football américain aux États-Unis.Il n’est donc pas certain que tous les athlètes dotés du meilleur potentiel se tournent vers le sprint, le saut en hauteur ou encore le lancer », signale François Desgorces.

Selon des chercheurs britanniques qui ont étudié l’évolution des performances des athlètes autrichiens, les performances des hommes ont diminué de plus de 9 % sur l’épreuve du lancer de poids, et de 11,4 % sur le lancer de marteau, entre les années 1980-1999 et 2000-2019. Un déclin dû au manque d’attractivité de ces disciplines ? Peut-être pas seulement… car ces épreuves nécessitent une masse musculaire et une puissance qui peuvent être améliorées par la prise de substances dopantes comme les stéroïdes anabolisants, soulignent les scientifiques.

Les performances plafonnent

C le record du saut en hauteur établi par la Bulgare Stefka Kostadinova grâce à un saut à 2C aucune femme n’est pour l’instant parvenue à faire tomber le record de la discipline établi il y a 38 ans par l’athlète tchèque Jarmila KratochvílováHANGST//.Mais les divers scénarios établis par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) indiquent qu’au cours des prochaines décennies, la température moyenne pourrait sérieusement augmenter dans de nombreuses villes où se dérouleront les évènements sportifs.

« Lors des Jeux olympiques d’été, les athlètes pourraient subir des chaleurs tellement importantes que cela diminuerait leurs performances. Il sera peut-être alors envisagé de déplacer ces compétitions à l’automne, ou bien de s’orienter vers des lieux moins chaud » , indique Geoffroy Berthelot.Pourtant, certains athlètes affolent toujours les compteurs.

Comme la Néerlandaise Sifan Hassan qui, le 6 juin dernier, a établi un nouveau record du monde sur l’épreuve du 10 000 m féminin. Et cette performance a été battue seulement deux jours plus tard, par l’Éthiopienne Letesenbet Gidey en 29 minutes et 1 seconde. « Alors qu’on observait une stagnation des performances, les records reprennent leur marche en avant sur les courses de fond et de demi-fond », analyse Pierre-Jean Vazel.

Les moyens pour augmenter la performance…

KONTENTE et n’a jamais défini clairement de règles concernant l’épaisseur des semelles, la composition des chaussures et les matériaux autorisés », déplore Pierre-Jean Vazel. Un flou réglementaire qui conduit à des incohérences : « Certains de ces nouveaux modèles sont autorisés et d’autres non, c’est totalement arbitraire. Il est possible par exemple de se qualifier pour les prochains Jeux olympiques avec des modèles de chaussures qui seront interdits lors de la compétition », souffle l’entraîneur d’athlétisme.

Les polémiques sur l’aide technologique apportée par ces chaussures ne font que commencer. Car certains équipementiers s’attaquent au sprint, et testent de nouvelles « pointes » dans cette discipline. « D’après les premiers retours, elles permettent surtout de diminuer les temps de contact entre le pied de l’athlète et le sol », indique Pierre-Jean Vazel.

Une nouveauté qui pourrait faire tomber le record de Florence Griffith-Joyner ou celui d’Usain Bolt ? Réponse dans les mois qui viennent…

Multisports, une réponse à la pénurie de records ?

DEDERT/DPA//La différence est une force

Et si le secret d’un grand champion était d’être une heureuse anomalie ? Usain Bolt se démarque par sa très grande taille, qui fait de lui un coureur moins aérodynamique que ses adversaires, mais aussi par une technique de course bien particulière : « À chaque foulée, ses pieds restent plus longtemps en appui sur le sol, ce qui normalement est un handicap pour le sprint », analyse François Desgorces.

Mais le Jamaïcain se sert de ses appuis pour générer une puissance maximale phénoménale, évaluée à 2 620 watts lors de sa course record à Berlin (2009). Soit plus d’une fois et demie la puissance maximale que les meilleurs sprinters du Tour de France exercent en un coup de pédale.