À Brest, la course aux dossiers au tribunal judiciaire


Ce vendredi 12 janvier, comme tous les vendredis au Palais de justice de Brest, un climat particulier règne. Au-delà du week-end qui se profile, ce sont les comparutions immédiates de la fin de semaine qui s’annoncent. Des véhicules de la police ou de la gendarmerie qui s’alignent çà et là autour du bâtiment rappellent les déferrements en cours à la permanence pénale du parquet. Au terme des gardes à vue, les mis en cause sont en effet présentés au procureur selon la gravité de l’affaire. Ce dernier décide alors de leurs sorts judiciaires. Soit, ils seront convoqués plus tard à une audience classique. Soit, ces personnes poursuivies feront l’objet d’une procédure d’urgence, la fameuse comparution immédiate.

La permanence du ministère public est continuellement en alerte. Nuit et jour, les escortes des forces de l’ordre se succèdent dans le bureau de la permanence, au dernier étage. La procédure pénale oblige, elle n’a pas d’heure  ! Le vendredi matin dans ces lieux de la justice, s’entend alors la question : « Il y a combien de compas aujourd’hui ? ». Ce vendredi 12 janvier 2024, il y en a six et c’est l’effervescence. Le magistrat qui présidera l’audience fixée à 13 h 30 s’immerge à la hâte dans les procès-verbaux des dossiers retenus. La secrétaire du barreau fait chauffer le téléphone pour trouver des avocats commis d’office dont les premiers s’inquiètent de découvrir l’affaire et d’avoir un entretien avec le ou les clients du moment. Une course contre la montre s’anime ainsi autour de ceux qui gambergent dur dans l’isolement des cellules d’attente.

À Brest, la course aux dossiers au tribunal judiciaire

« Un dossier est-il prêt ? »

C’est l’heure. Les robes vite mises virevoltent dans le prétoire. Faisant des allers et retours entre la salle des délibérés et son siège, le président s’impatiente : « Un dossier est-il prêt ? ». « J’ai besoin de m’entretenir avec mon client  !  » répond un avocat, alors que le représentant de l’escorte pénitentiaire prévient de l’arrivée d’un détenu de la maison d’arrêt. Comme un lièvre, l’huissier fait des bonds, entre tous.Il est 14 h, quand un homme âgé de 43 ans apparaît enfin dans le box. Lui sont reprochés les délits de détention, offre, usage et acquisition de stupéfiants, commis mercredi 10 janvier 2024, à Brest. Visiblement fatigué par les heures passées et peut-être par autre chose, le quadragénaire reconnaît d’emblée la vente d’héroïne pour financer sa consommation. Mais, il souhaite un temps pour préparer sa défense. C’est ce que demande son avocate invoquant l’épuisement de son client. Le juge traduit : « Vu son état délabré, on peut comprendre  !  ». Et prononce donc un renvoi de droit du procès à une date ultérieure. S’ensuit un court débat sur le maintien ou non du prévenu en détention provisoire. Sans surprise, ce dernier rejoint la prison de Brest. Affaire suivante…

Une histoire à ne pas dormir debout

Dans le box, un homme âgé de 44 ans. Lui a, sous le régime de la semi-liberté, pris la poudre d’escampette le 21 novembre 2023, pour voler des véhicules chez des particuliers. Trois en une journée à Plougastel-Daoulas, dont un vol pour la seconde fois chez la même personne en deux ans. Son leitmotiv ? « Je vole des voitures pour dormir dedans  !  ». Mais, grand seigneur, il « laisse les voitures à proximité pour que les gens les récupèrent  !  ». Son casier judiciaire est long comme le bras, son curateur a jeté l’éponge, le président est perplexe. L’homme écope de dix-huit mois ferme avec une interdiction, valable pendant trois ans, de paraître dans la commune de Plougastel-Daoulas.Autre affaire. Celle d’un trentenaire, devant répondre d’une évasion et de multiples outrages commis à Morlaix entre le 5 et le 10 janvier 2024. Sous le coup de la semi-liberté, il devait rejoindre le centre pénitentiaire du Mans, le 5 janvier 2024 mais a choisi de venir à Morlaix, avant d’être interpellé quatre jours plus tard, « par hasard », comme le précise le président Christophe Subts. Alcoolisé, il affuble les policiers de tous les noms d’oiseaux en sa possession, les menace. Dans le box, sa mémoire lui fait défaut. « On a tout essayé pour lui au point que son casier judiciaire est un petit mémento pour l’application des peines  !  », tance le procureur Camille Mansioni. Le prévenu a en effet 30 mentions sur son casier judiciaire et est finalement condamné à un an et demi de prison ferme.