la répression a brisé le mouvement prodémocratie


, le 8 août 2021Dans une petite rue du centre de Minsk, l’inscription « vive la Biélorussie » peinte en grandes lettres blanches sur le bitume, en août 2020, avait résisté de longs mois. Les manifestations avaient cessé, les drapeaux blanc, rouge, blanc étaient arrachés, les médias indépendants et les associations interdits depuis longtemps, mais la peinture du slogan de l’opposition au régime d’Alexandre Loukachenko tenait bon. Avant d’être finalement recouverte d’une couche de gris, il y a quelques semaines. Un an après la réélection contestée d’Alexandre Loukachenko, il ne reste rien ou presque de la révolution pacifique. Le régime a procédé à une répression méticuleuse. »Ce fut une année pleine de douleur et d’émerveillement », résume Svetlana Tikhanovskaïa, la principale opposante de Loukachenko, qui a dû s’exiler après sa défaite à la présidentielle, défaite qu’elle a d’ailleurs refusé de reconnaître. « D’un côté, nous avons vu la brutalité du régime anéantir la société civile, réprimer les médias et les défenseurs des droits de l’homme, poursuit-elle. Nous avons vu la souffrance endurée par des innocents, les lois bafouées, et l’injustice. Mais de l’autre côté, nous avons créé une société biélorusse meilleure, qui, malgré les répressions et la peur, continue de se battre. »

Six cents prisonniers politiques

Mais l’élan enthousiaste, l’espoir de voir la chute du régime ont été brisés net par la répression brutale. Six cents prisonniers politiques, des milliers d’arrestations et d’exilés (surtout de jeunes diplômés) plus tard, le régime est encore debout, toujours sous perfusion financière russe.En Biélorussie, ceux qui ont choisi de rester ont réduit ou cessé leur activité de partisans. S’ils restent, c’est une question de principe. « Je veux avoir le droit de vivre dans mon pays », tranche Alexeï, 30 ans, programmeur qui a réussi l’exploit de ne jamais être arrêté malgré une activité frénétique contre le régime. Pourtant, il admet rêver parfois d’exil, mais il « chasse vite ces pensées ». Parfois, c’est pour ne pas laisser leurs parents tout seuls, ou comme Mikalai, ingénieur de 24 ans, « parce qu’ d’adopter un chiot, trop jeune pour un tel voyage ». Il plaisante à peine : après avoir pensé quitter le pays toute son adolescence, il est aujourd’hui convaincu qu’il doit rester pour le reconstruire.

la répression a brisé le mouvement prodémocratie

« Je veux avoir le droit de vivre dans mon pays »

Les principales figures de l’opposition sont parties de Biélorussie depuis longtemps, ou croupissent en prison comme Maria Kolesnikova, qui a préféré déchirer son passeport pour ne pas être forcée à quitter le pays. Son procès s’est ouvert mercredi à Minsk, en même temps que celui de l’avocat Maksim Znak. Ils risquent douze ans de prison pour « conspiration pour s’emparer du pouvoir » et « création d’une organisation extrémiste ». De la prison n° 1, Maksim Znak nous écrit qu’il a « la conscience tranquille » et ne « regrette rien » : « Faut-il regretter d’être allé dans la cave pour découvrir un début d’incendie, ou est-ce mieux de ne jamais ouvrir la porte et vivre dans une calme ignorance? Ce n’est pas mieux, évidemment. »

Improbable que les manifestations reprennent 

répond Artyom Shraibman, du centre Carnegie à Moscou. Le dialogue n’est plus une option. Pour Alexandre Loukachenko, être assis à la même table que ses opposants représenterait déjà une défaite. Le moteur de cette crise qui persiste, ce sont ses erreurs de jugement, comme ce qui s’est passé à Tokyo. Il y a une escalade, qui va conduire à de nouvelles sanctions, et ainsi de suite. » Une spirale infernale et incontrôlable.