le gouvernement envisage de durcir les règles d'indemnisation pour répondre à la pénurie de main d'oeuvre


Il n’est plus possible d’avoir dans le même temps, autant de chômage, au-dessus de 7% dans l’Hexagone, et des postes disponibles, faute de candidats. C’est ainsi que Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie, s’est exprimé aux Rencontres économiques qui se tenaient ce week-end à Aix-en-Provence. Une réponse aux patrons – de grands groupes comme de petites entreprises -, qui se plaignaient tous d’avoir du mal à recruter. Quel que soit le secteur, dans l’aéronautique, le transport, le tourisme, ou l’hôtellerie-restauration, tous assurent être contraints dans leurs activités à cause de ces problèmes d’effectifs. Des restaurants ferment plus tôt, faute de personnel, des commandes ne peuvent être honorées. etc. Et alors qu’Emmanuel Macron reçoit, ce lundi, à Versailles, les patrons étrangers dans le cadre de l’opération « Choose France », « comment attirer les investissements dans l’Hexagone si on est incapables d’avoir les moyens humains, et les compétences ? », s’agace un conseiller ministériel. Pas question de freiner l’attractivité française.

Aller vite, dès la rentrée

« Il y a de nombreux angles morts, des zones grises dans le système, qui ne favorisent pas le retour à l’emploi », plaide un bon connaisseur du dossier, proche de l’exécutif. Exemple : « quand vous abandonnez votre poste du jour au lendemain, sans donner signe à votre employeur, vous pouvez quand même toucher une allocation », développe-t-il. En durcissant encore un peu plus certaines règles d’indemnisation, le gouvernement espère donc inciter les actifs à reprendre un travail plus vite. Surtout, il promet d’aller vite. « Cette réforme de l’assurance chômage pourrait se faire dès la rentrée, avant celle des retraites.. », juge un poids lourd du gouvernement. Sans compter qu’Elisabeth Borne n’aurait aucune difficulté à se lancer dans ce dossier pourtant très technique qu’elle connaît sur le bout des ongles. C’est elle, en tant que ministre du Travail, qui a géré l’an dernier la dernière réforme. Enfin, il y a une petite fenêtre de tir en termes de calendrier : la convention assurance chômage s’arrête le 31 octobre prochain. Il faut donc statuer. Le gouvernement peut donc choisir, soit de garder les mêmes règles, soit de les modifier.

le gouvernement envisage de durcir les règles d'indemnisation pour répondre à la pénurie de main d'oeuvre

Des syndicats opposés, mais une opinion publique plus favorable

Et tant pis, si les syndicats sont contre. De la CFE-CGC à la CFDT, en passant par la CGT, tous ont bataillé contre la dernière réforme, et il y a peu de chances qu’ils aient changé d’avis. Interrogé sur France Info, ce lundi matin, Philippe Martinez le leader de la CGT a ainsi regretté « que le gouvernement soit encore dans la croyance qu’il suffise de durcir le système, pour que les demandeurs d’emploi retrouvent du travail. C’est un peu plus compliqué que ça ». Et le chef de file du syndicat de Montreuil de souligner qu’à peine un chômeur sur deux était indemnisé. En d’autres termes, on ne reste pas au chômage par plaisir ou par intérêt. Le gouvernement sait toutefois que dans l’opinion publique, l’opposition est nettement plus partagée. Aucune réforme de l’assurance chômage n’a mis foule dans la rue. Pour convaincre les réticents, le gouvernement entend présenter cette réforme comme une solution pour lutter contre la hausse des prix. Quand on travaille, on a de meilleurs revenus et c’est la meilleure façon de préserver le pouvoir d’achat des ménages, en période d’inflation », rappelle un conseiller. Enfin politiquement, ce discours sur la priorité du travail séduira les Républicains. Alors que le gouvernement se cherche des alliés à l’Assemblée nationale, ce peut être un moyen de rallier quelques élus à droite, voire à l’extrême droite.

Retrouver des marges budgétaires

L’enjeu est d’autant plus important que c’est par le plein emploi que l’exécutif compte trouver des sources de financement pour investir dans l’école, la transition écologique, la santé. Bien plus qu’en réduisant les dépenses. Dernier argument que l’exécutif n’avance pas ouvertement mais à dans la tête, cette réforme serait aussi un signe envoyé à Bruxelles. Un gage de la capacité de la France à poursuivre sa transformation.