le pari fou de l'aviation


reprenant non seulement un vieux rêve évoqué dès 2007 par le directeur général de l’Iata de l’époque Ceci alors que le trafic aérien est appelé à croître fortement d’ici-là. Willie Walsh, l’actuel patron de l’IATA a donc appelé à un « changement fondamental » et a visiblement été entendu par les compagnies membres  : celles-ci ont approuvé quelques minutes plus tard la résolution proposée par le conseil des gouverneurs sous la présidence de Carsten Spohr, directeur général du groupe Lufthansa. Safran et TotalEnergies s’allient pour le développement des carburants verts

Toutes les options technologiques sont sur la table

Lors de la mise au vote de cette résolution, un seul commentaire est venu de la salle, exprimé par un représentant de la compagnie Saudia. Celui-ci a pointé la question des technologies éligibles pour l’atteinte du zéro émission nette. Ce à quoi Willie Walsh a répondu que l’IATA était agnostique sur les technologies à adopter pour construire cette trajectoire jusqu’en 2050  : « Nous allons identifier de nouvelles mesures pour atteindre cet objectif et encourager toute nouvelle technologie qui pourrait y contribuer. » Cette remarque intervient après que le patron de l’IATA a avancé plusieurs pistes possibles pour arriver au zéro émission nette. A court terme, Willie Walsh a souligné le besoin de poursuivre les renouvellements de flotte, même si cela nécessitait de la prudence de la part des compagnies pour faire le meilleur choix. De même, il a noté que le transport aérien allait s’appuyer de plus en plus sur les carburants durables (SAF), ou les compensations dans le cadre du système CORSIA qui poursuivra sa montée en puissance en 2022. Le lobbyiste en chef des compagnies aériennes en a profité pour tancer au passage l’inefficacité structurelle et choquante du contrôle aérien. A plus long terme, Willie Walsh a mentionné le besoin de ruptures technologiques dans la conception des avions, dans les modes de propulsion avec en particulier les promesses de l’hydrogène ou encore la captation de carbone. Il a en revanche déclaré que l’hybridation électrique ne pouvait adresser qu’une faible partie de l’objectif, son intérêt se limitant essentiellement au segment court-courrier. Au final, le scénario central retenu pour atteindre l’objectif fixé passe par un fort développement des carburants aériens durables (SAF), d’origine non fossile. Censés représenter 2 % de la consommation du transport aérien en 2025, ces carburants verts sont appelés à peser 17% des besoins en 2035, 39% en 2040, 54% en 2045 et 65% en 2050. Par ailleurs, des avions électriques et/ou à hydrogène destinés au marché régional (50-100 sièges pour des vols de 30-90 minutes) sont attendus à l’horizon 2035. Des avions à hydrogène de 140 à 150 sièges pour des vols allant de 45 à 120 minutes pourraient voir le jour à partir de 2040. Hy24 : un fonds de 1,5 milliard d’euros pour structurer le marché de l’hydrogène décarboné

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Des investissements en milliers de milliards

cela générera un coût brut de près de 2 000 milliards de dollars au cours des trente prochaines années, même si certains investissements auraient tout de même été réalisés comme les renouvellements de flotte. Willie Walsh admet ainsi que toutes les compagnies ne pourront pas adopter en même temps les différentes ruptures technologiques à venir, dont certaines devraient s’avérer très coûteuses, et qu’elles devront trouver leur propre voie pour atteindre le zéro émission nette. De même, il estime que certaines compagnies, en particulier en Europe où la pression environnementale est la plus forte, devraient aller plus vite que l’objectif fixé par l’IATA. Dans son discours, le directeur général de l’IATA a estimé que « la rupture de notre industrie avec sa dépendance aux énergies fossiles ne pourra reposer sur les seules épaules des compagnies aériennes » et appelle donc ses « partenaires » a partagé l’effort, à commencer par les gouvernements.

La Chine veut imposer son propre calendrier

Si la salle s’est montrée majoritairement favorable à cette résolution, plusieurs commentaires en ligne sont venus animer le vote, tous issus de compagnies chinoises  : China Southern Airlines, China Eastern Airlines ou encore China Cargo Airlines. Willie Walsh a néanmoins tenu à atténuer la portée de cette opposition en affirmant que les dirigeants de ces compagnies, notamment Liu Shaoyong, président de China Eastern avait largement contribué aux travaux menés par le conseil des gouverneurs et qu’il s’agissait avant tout d’une différence de calendrier. Le directeur général de l’IATA a ainsi rappelé que les compagnies chinoises travaillaient étroitement – pour ne pas dire plus – avec leur gouvernement sur un objectif similaire, mais à l’horizon 2060. La programmation de la prochaine assemblée générale de l’IATA, en juin 2022, semble en tout cas être le signe que le dialogue n’est pas rompu avec les compagnies chinoises.

Léo Barnier, à Boston

04 Oct 2021, 19 :09