Bordeaux Métropole veut décaler la mise en place des ZFE à 2030


« Partout où elles sont instituées, les ZFE (zones à faibles émissions) se heurtent à des crispations et de vives incompréhensions, tant de la part des collectivités territoriales chargées de les mettre en place que des usagers, particuliers et professionnels, dont les mobilités quotidiennes seront affectées par les restrictions de circulation », constate un rapport du Sénat, qui vient d’être remis au gouvernement dans le cadre d’une mission flash.« Partout où elles sont instituées, les ZFE (zones à faibles émissions) se heurtent à des crispations et de vives incompréhensions, tant de la part des collectivités territoriales chargées de les mettre en place que des usagers, particuliers et professionnels, dont les mobilités quotidiennes seront affectées par les restrictions de circulation », constate un rapport du Sénat, qui vient d’être remis au gouvernement dans le cadre d’une mission flash.Au-delà du constat, les représentants de la Haute assemblée demandent à revoir le calendrier du déploiement des ZFE pour une mise en place en 2030 au lieu de 2025. Le sujet s’affranchit des étiquettes politiques. Cette mesure phare, et les huit autres proposées par le document, intitulé « ZFE  : sortir de l’impasse », ont recueilli l’assentiment des sénateurs LR, de l’union centriste et des socialistes.

Faute politique

soit le tiers du parc en circulation soit le tiers du parc en circulation, ce n’est pas réaliste »

Bordeaux Métropole veut décaler la mise en place des ZFE à 2030

Depuis deux ans qu’elle travaille sur le sujet, la collectivité a échafaudé plusieurs scénarios. Face aux difficultés, l’option volontariste (une mise en service en 2024) s’est fait doubler par un scénario pédagogique, soit un lancement en 2025 dans les clous de la loi. Aujourd’hui, le rapport du Sénat vient rebattre les cartes. Et Alain Anziani s’engouffre dans la brèche. « Il y a un consensus général des habitants et collectivités pour ne pas aller si vite. Ce serait la garantie de se casser la figure et de récréer le mouvement des gilets jaunes. Il est incroyable d’avoir conçu cette loi sans avoir consulté l’échelon local. C’est une erreur politique majeure. Il faut maintenant que le gouvernement se bouge sur le report mais aussi sur les aides. »Le président de Bordeaux Métropole souligne l’incohérence du projet  : « Il y aura 43 ZFE différentes en France. À Bayonne, Poitiers ou Bordeaux, les règles ne seront pas les mêmes. Si la ZFE est lancée en 2025, l’État n’aura pas mis en place les mécanismes de contrôle. Et quel est le sens d’une ZFE sans contrôle ? »

« Décaler c’est renoncer »

Pierre Hurmic, le maire écologiste de Bordeaux, est sur la même ligne. « Le projet n’est pas mûr. L’État n’a pas pris ses responsabilités, son accompagnement est défaillant. Les aides sont insuffisantes et illisibles. Les collectivités sont placées en première ligne, c’est l’exemple même du transfert des compétences régaliennes de l’État vers les collectivités. »L’édile bordelais est favorable au décalage de la mise en place des ZFE mais souhaite voir le curseur poussé un peu plus loin  : « Les ZFE répondent à des impératifs de santé publique et la politique de santé publique relève de l’État. Les ZFE sont pensées pour améliorer la qualité de l’air. Il faut donc profiter de ce décalage pour introduire des mesures contre les émissions de CO2. Actuellement, elles ne sont pas prises en compte. » Il reprend  : « Par exemple, les grands SUV électriques émettent plus de CO2 qu’une petite voiture à essence, c’est lié au poids et aux émanations lors des freinages. Or, ces SUV pourront circuler dans les villes avec la ZFE. C’est assez paradoxal. Il faut enrichir la mesure pour répondre à la question sanitaire sans omettre l’urgence climatique. Il faut prendre son temps pour ne pas bâcler les choses. »Seul Thomas Cazenave, député Renaissance de Bordeaux-Nord, défend le calendrier initial  : « Décaler, c’est renoncer, même si je partage l’avis de nombreux élus sur le fait qu’il y a un enjeu d’accompagnement pour éviter une aggravation de la fracture territoriale. » Il reconnaît que le calendrier imparti est un peu juste. « Il faut garder cette ambition mais faire preuve de beaucoup de souplesse dans la mise en application, sur les dérogations. Nous devons être très vigilants sur la progressivité des mesures. Cela dit, je m’étonne de voir que la Métropole et le maire écologiste de Bordeaux préfèrent renoncer à une mesure sanitaire et environnementale. »