Martina Chyba : le roman Rendez-vous


D’où vient votre passion pour la littérature ?Je suis arrivée de l’ex-Tchécoslovaquie en Suisse à l’âge de 3 ans.L’école a été un facteur d’intégration important et je suis tombée amoureuse de la langue française dès l’école enfantine. J’ai très vite beaucoup lu et à 14 ans j’ai trouvé un livre de Zola (Pot-Bouille) chez ma grand-mère, cela a été un choc littéraire qui m’a portée jusqu’à aujourd’hui. J’ai ensuite fait des études de lettres, en français et allemand.

Pouvez-vous nous présenter votre roman Rendez-vous ?C’est une femme qui a rendez-vous avec un homme inconnu, avec lequel elle est entrée en contact par erreur sur un site de rencontres, elle a aussi rendez-vous avec un psy qui lui prescrit des œuvres d’art pour lui redonner de la force et, à la croisée de plusieurs chemins, elle a rendez-vous avec elle-même. Elle n’est plus toute jeune mais elle veut rire, pleurer, baiser, bosser, bref rester vivante. On suit son histoire avec cet homme mystérieux, sa vie compliquée et sa thérapie artistique.

Que peut-on savoir de votre personnage principal ?C’est une femme qui me ressemble  ! Elle est un peu plus jeune (sourire).C’est une autofiction et j’assume une part importante d’auto  ! Donc, divorcée, bossant trop, avec des enfants qui grandissent et des parents qui meurent, une sale gueule le matin au réveil et des envies de chirurgie esthétique, des inquiétudes financières, des amis indispensables, un besoin d’amour et d’aventure et une libido qui se réveille, héhé. Peut être bouleversée, et réparée par un tableau. Surtout, élément important de survie, elle a beaucoup d’humour et de lucidité sur elle-même.

l’envie d’être encore dans le jeu, et la question centrale  : que vais-je faire du temps qui reste ? Tout le monde se la pose. Et c’est normal. Et sain. Mais cela peut aboutir à de grandes remises en question. Aujourd’hui, à la cinquantaine, on ne met pas le clignotant pour aller se parquer définitivement au garage, on est en forme et on veut le rester, on veut vibrer, vivre intensément chaque instant. C’est une période éprouvante et fascinante.

Qu’est-ce qui vous a intéressé de mener l’intrigue autour d’une histoire d’amour ?Je me rends compte qu’on s’agite tous beaucoup autour de plein de choses, mais au fond, on cherche tous ça. Même celles et ceux qui vont sur les sites de rencontres pour ce qu’on appelle des plans cul ont quelque part l’espoir secret que cela puisse être « une histoire » ou mieux « l’Histoire ». Eros et Thanatos. La pulsion de vie, la pulsion de mort, tout tourne autour de cela depuis des millénaires, quelque soit la civilisation que l’on construit autour. Une amie un peu plus âgée m’a confié  : « avant de mourir je ne demande rien, je voudrais juste être amoureuse encore une fois ». J’ai trouvé cela très touchant.

Quelle place occupe les oeuvres d’art dans votre ouvrage et quel est leur pouvoir ?D’abord les oeuvres d’art sont reproduites dans le livre en couleurs, il y a eu un très beau travail de l’éditeur (Favre) que je tiens à souligner, et cela fait du livre un bel objet. Après chaque étape imprtante de sa vie, mon personnage principal se voit prescrire une visite dans un musée pour aller voir une œuvre d’art précise. Elle doit impérativement la voir « en vrai » et se poser une question précise devant  : « dans ce que je vois, qu’est-ce qui me donne de la force ? » Cela l’oblige à se confronter à elle-même. Il ne s’agit pas d’histoire de l’art, de données comme la technique, l’année de réalisation ou d’histoire de l’auteur, mais de ressentir dans ce que l’on voit l’énergie de l’artiste et comment son travail touche un nerf chez nous. Il est prouvé scientifiquement que ce type d’approche active les neurotransmetteurs et agit sur le cerveau. Oui l’art a le pouvoir de… guérir est un grand mot, mais disons de faire du bien.

Une oeuvre d’art vous fascine-t-elle en particulier ?J’ai une passion immodérée pour Schiele, je vis au milieu de grands posters de nus de lui encadrés (pas des vrais hélas  ! ) et j’ai demandé à mes enfants de les mettre avec moi lorsque je serai incinérée  ! Ce sont des tableaux rudes, torturés mais d’une beauté qui me transperce.

Dans quelles conditions écrivez-vous et êtes-vous plutôt papier ou clavier ?Maintenant, définitivement clavier. Je tape assez vite et j’aime pouvoir corriger, changer les blocs, vite chercher une info sur le web, mon bureau se résume désormais à un ordinateur portable et un téléphone, je suis devenue assez nomade.

Bien sûr  ! En 35 ans de journalisme, j’en ai vu et entendu des choses  ! Donc oui, j’écoute, je note, j’enregistre mentalement, je m’imprègne. Et comme je suis assez droguée d’info, je reste très en prise avec l’actualité. Je laisse sédimenter tout ça, et ensuite j’écris. J’ai la chance de pouvoir écrire des chroniques et de poster sur LinkedIN ce qui me permet de réagir assez vite, et je garde la matière plus personnelle pour les romans.

Peut-on se permettre de vous demander comment s’est passé votre dernier Rendez-vous ?Eh bien je vous donne justement Rendez-Vous dans l’épilogue du livre, sur les marches du Sacré-Cœur. Il y a des choses inventées dans mon roman, mais l’histoire de ce rendez-vous est vraie, et cela a changé ma vie. Spoil  : ça finit assez bien (sourire).

Des séances de dédicaces en libraires ou salons sont-elles prévues ?Absolument  ! Il y a des dédicaces en Suisse chez Payot Librairie, à Lausanne le 5 novembre, Genève le 10, Nyon le 19, Vevey le 26 et Neuchâtel et la Chaux de Fonds le 10 décembre. Pour les salons, mon éditrice est en train de composer le programme, et nous allons probablement compléter avec d’autres dédicaces.

Que souhaitez-vous dire pour terminer ?Qu’il faut acheter des livres  ! Le livre papier se porte bien, c’est joli dans une maison, ce n’est pas un écran, ce n’est pas mauvais pour la santé, cela peut même être bon pour la tête, c’est local, circuit court, ça peut se réutiliser, être passé plus loin, cela soutient la culture, les auteurs, la pensée, l’écriture, ce n’est pas si cher par rapport à d’autres choses et c’est un super cadeau pour Noël  !

Merci à Martina Chyba d’avoir répondu à notre interview !