Aimee Lou Wood, dans le rôle d’Aimee Gibbs, et Emma Mackey, dans le rôle de Maeve Wiley, dans la série « Sex Education ». SAM TAYLOR/NETFLIX CHRONIQUE Dans la foulée du scandale ayant entraîné la chute du producteur Harvey Weinstein, la fiction télévisuelle ne cesse de se réinventer à l’aune de la vague féministe à l’œuvre depuis maintenant cinq ans. Pas seulement pour accueillir le récit de violences sexuelles trop longtemps tues, mais aussi pour donner plus d’espace, plus de coffre, plus de nuances à la représentation des femmes dans cet objet intime et politique qu’est la série. Le secteur ne part pas de rien. Commençons par rappeler que, dans les années 1950, c’est une femme qui fait rire l’Amérique et ses téléspectateurs serrés par millions devant le poste de télévision. Elle s’appelle Lucille Ball (1911-1989) et, avec son mari, Desi Arnaz (1917-1986), vient d’inventer la sitcom telle qu’on la connaît aujourd’hui. Rien de moins. En 1970, Mary Tyler Moore (1936-2017) incarnait une productrice célibataire et ambitieuse dans un show, le Mary Tyler Moore Show, resté malheureusement inédit en France. Plus proches de nous, Cagney et Lacey traquaient le délinquant new-yorkais dans les années 1980 pendant que Tony Micelli faisait la poussière chez Angela Bower (Madame est servie). Un peu plus tard, Samantha Jones se plaindra ouvertement du cul tombant de son amant « Carte Vermeil » (Sex and the City). En 2012, Lena Dunham déshabille son corps imparfait face caméra (Girls). En 2015, Phoebe Waller-Bridge s’inquiète, elle aussi face caméra, de la taille de son anus (Fleabag).
Les stéréotypes ont la peau dure
On peut toujours compter sur les séries pour avoir un coup d’avance sur la réalité, et il n’est pas illogique que ce format, à l’origine taillé pour les femmes au foyer (qui tiennent les comptes, font les courses et décident quoi regarder le soir), ait su saisir les évolutions de la société en matière de représentation des sexes et de la sexualité. C’était l’objet, en 2016, de Sex and the Series (Editions de l’Olivier), l’essai fondateur d’Iris Brey sur la représentation de la sexualité, et particulièrement de la sexualité féminine, dans les fictions télévisées.
Le choc Weinstein a largement contribué à un repositionnement de l’industrie en faveur d’une plus grande visibilité de ses employées, à tous les postes
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