nos révélations sur sa candidature à la présidentielle


Une stratégie portée par un petit noyau de jeunes militants politiques, de financiers et d’intellectuels. Notre enquête lève le voile sur cette « galaxie Zemmour ». Et sur les motivations profondes d’un personnage devenu une marque.

nos révélations sur sa candidature à la présidentielle

quelques proches suggèrent Accompagné de sa conseillère Loïk Le Floch-Prigent intellectuel de la finance

Dans l’ombre, une vingtaine de personnes, qui ont décliné tout entretien, voire annulé les rendez-vous convenus, s’affairent

le 1er juillet, un avis informant que l’association Les Amis d’Éric Zemmour était agréée par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

le 19 mai

s’apprête donc à briguer les suffrages des Français mais peine à cesser de hausser les épaules et de pencher la tête sur le côté, comme le ferait un enfant pris en flagrant délit de bêtise.

« Il est né petit, maigrichon et adulé par sa mère, ça laisse des traces », plaisante Isabelle Balkany

Vidéo : Eric Zemmour répond aux rumeurs sur ses ambitions présidentielles (Dailymotion)

ont triplé en un an ? Lui qui s’abrite derrière un curieux parapluie noir tant, à chaque pas, les passants le saluent et l’encouragent ? Oui, il s’engagera « pour l’union des droites et la défense du peuple français » – l’expression est rapportée par un proche. Seulement, bien que pénétré de la certitude qu’il serait appelé par l’Histoire à sauver la nation du naufrage civilisationnel, le candidat putatif reste consumé par l’angoisse. Comment concilier une éprouvante course vers l’Élysée et ses habitudes rigides, son programme auquel rien, jamais, ne le fait déroger ?

Deux semaines à Noël dans un resort aux Caraïbes, et tous les étés ce bel hôtel du Var où il s’inflige un emploi du temps millimétré. L’homme qui rêve de présider la République redoute surprise et dépaysement. Quelle aventure, d’ailleurs, fut ce voyage en Hongrie, où l’invita, en 2019, Philippe Martel, ancien directeur de cabinet de Marine Le Pen et ex-directeur du château de Chambord, décédé l’année suivante. Il a raconté partout ces jours de cauchemar, son « Éric » claquemuré dans la chambre d’hôtel, inquiet à l’idée d’errer dans les rues de Budapest. Vivement Paris, son mobilier XVIIIe, son tennis du dimanche matin et ses sachets de fruits frais qu’il achète en personne, obsédé par sa ligne et inquiet d’un mal de dos chronique. « Il est né petit, maigrichon et adulé par sa mère, ça laisse des traces », plaisante Isabelle Balkany, qui se présente comme sa « grande sœur ».L’ancienne adjointe au maire de Levallois n’est pas favorable à l’aventure électorale de son complice, avec qui elle aimait tant déjeuner au Fouquet’s : « Il est littéraire, cultivé, capable de vous dire à quelle heure Napoléon a pissé à Waterloo, mais il voit la politique comme une joute intellectuelle ; il ne connaît rien au taf, au cambouis. » Elle le lui a écrit récemment : « Imaginons que tu sois élu, tu seras mauvais. » Le « petit frère » a promis de venir lui parler. Hélas, il manque de temps, la course ne lui laisse même plus le loisir d’une visite à Montretout, dans le bureau de Jean-Marie Le Pen, son partenaire de conversation depuis vingt ans.

Gagner la campagne dans les esprits, sans avoir à quitter ses employeurs

grâce à Mme Marcel nostalgique obsessionnel de la France sépia des années 1960 Condamné en 2020 au pénal pour « injure et provocation à la haine », Zemmour a porté devant la Cour européenne des droits de l’homme sa deuxième condamnation pour des propos anti-musulmans tenus en 2019. Quant aux articles selon lesquels il aurait importuné des femmes, son défenseur les balaie : « Éric a la réputation d’être un séducteur mais le parquet n’a, à ma connaissance, ouvert aucune enquête. »

au Salon du livre de Paris

À l’heure de sauter du haut de la falaise pour entrer dans le combat électoral, Éric Zemmour vit un drame. D’un côté sa nature : solitaire, routinière, obsessionnelle ; de l’autre, son appétit : gigantesque, orgueilleux. Déchiré par ces forces contraires, écartelé entre confort et destin, il vise, selon le résumé de Paul-Marie Coûteaux, « les deux Français sur trois qui croient en la France, qui tiennent à l’autorité de l’État, qui pensent que la famille c’est un père, une mère, des enfants, et qui, pour cela, jugent nécessaire l’union des droites », mais il redoute le vertige d’une candidature sans retour. En janvier, son plan était de ne se déclarer que tout début 2022. Histoire de profiter de ses audiences télévisées quotidiennes et de marteler ainsi ses idées cinq heures par semaine, sans contradicteur ou presque, et surtout sans être soumis au décompte des temps de parole du CSA. Gagner la campagne dans les esprits, sans avoir à quitter ses employeurs. Une campagne éclair, disait-il en substance, quatre mois au maximum ; d’ailleurs Emmanuel Macron n’est-il pas lui aussi parti sans mandat en 2017, sans s’abîmer dans une primaire ?Reporter la grande bascule, conserver ses balades, les dîners mondains, et puis ses soirées passées à discuter du destin de la nation avec Sarah Knafo, énarque et magistrate à la Cour des comptes, dont il s’est attaché l’enthousiasme radieux et pugnace. Comme, autour de lui, la garde est jeune, celle-ci approuve l’échéancier intenable. Allumer le désir, lancer des œillades appuyées, jouer – lourdement – avec les sous-entendus. Comme quand il prend la pose, ce 18 juin, à Lille, devant la maison natale du général de Gaulle, osant une comparaison entre le grand homme, « un écrivain avant d’être un soldat, un intellectuel, un homme qui connaît l’histoire de France » et lui-même…

Le livre ? « On le sort en septembre, ce sera une façon de lancer ma campagne »

une place forte templière en Charente le secret de sa candidature s’est ébréchéÀ cet instant verra le jour cet automne, vraisemblablement édité par une société créée pour l’occasion

changement de registre En réalité verra le jour cet automne vers 2010 féru d’histoire de France et le biographe d’Édouard Balladur et de Jacques Chirac émission de la chaîne d’informations i> dans un combat féroce, mais courtois. Un jour, Domenach se retrouve à prendre dans la même journée huit taxis différents, dont les chauffeurs lui parlent tous de son duo télévisé avec Zemmour. Amusé par cette popularité, il en fait part à son partenaire. Sait-il que huit taxis sur huit regardent leur émission ? Quel succès, quelle blague ! Réponse de Zemmour : « Je suis sûr que les huit étaient d’accord avec ce que je dis moi. » Convaincu que ceux qui l’écoutent l’approuvent, Éric Zemmour s’est enivré d’une décennie de succès médiatique, il s’est laissé griser d’une exponentielle martingale des audiences et n’a jamais su que, sur les huit chauffeurs, trois partageaient ses idées, trois soutenaient celles de son contradicteur, et les deux derniers n’avaient pas d’avis.