« On est persuadé de ce qu’on dit, c’est un sous-marin qui a coulé le Bugaled-Breizh », témoignent les marins de l’Eridan – Le procès britannique du Bugaled Breizh


« On va rentrer en terre sainte, au Pays bigouden », souffle Frédéric Stéphan et Marc Cariou, exténués de cette journée. « On ne s’est pas vu depuis des années. Quand on se revoit, c’est autour de cette histoire. On était sur le même bateau. » Ce bateau, c’est l’Eridan, le premier à s’être rendu au secours du Bugaled-Breizh, le 15 janvier 2004. Mais, depuis des années, c’est la même question : comment le chalutier a-t-il pu sombrer en 37 secondes ?

Des questions, des réponses, pas de polémique

Pendant plusieurs heures, en visioconférence depuis Quimper, les deux anciens marins ont répété à la justice anglaise, à Londres, où est à nouveau jugée l’affaire, les témoignages qu’ils avaient tenus devant les policiers maritimes du Guilvinec. « Ils nous ont posé des questions et on a répondu, explique simplement Frédéric. Il n’y a pas eu de polémique. Ils reprenaient nos dépositions de l’époque. »Le 15 janvier 2004, à 12 h 23, le chalutier reçoit un appel à l’aide du Bugaled : « On chavire, vient vite. » « À ce moment-là, la seule chose à laquelle on pense, c’est de sortir les gars de l’eau. On a remonté le chalut, lancé un appel de détresse, appelé le Cross, et filé sur place, raconte Frédéric. On s’attendait à voir un bateau chaviré… Et non pas juste une plaque de gazole avec des bulles d’air qui remontaient à la surface. »Ils notent aussi la présence d’un hélicoptère jaune et de deux canots, dont un qui ne serait pas de la même couleur que celui du Bugaled-Breizh. Ils recherchent les marins, mais ne trouvent rien. « C’est arrivé au Bugaled, mais ça aurait pu nous arriver. Parfois, les bateaux se suivent à 25-30 mètres d’écart. Si ça avait été le cas, les deux partaient au fond. »

Ça avancera, que s’il y en a un qui ouvre sa gueule… Nous, on est persuadé de ce qu’on dit. C’est un sous-marin. Nous, on le sait. Mais, les familles, il faut le leur dire.

Des manœuvres militaires sur zone

Pour eux, il n’y a pas de doute, il s’agit forcément d’un sous-marin au vu de « la rapidité à laquelle il a coulé et des thèses aberrantes qui ont été racontées, comme celle de la croche mole. C’est n’importe quoi ! » De plus, ils se rappellent bien des hélicoptères gris qu’ils ont vus dans la matinée : « L’un d’eux était à moins de 50 mètres de nous. Le mec nous a même fait coucou au moment où on fumait une clope à l’arrière. C’était un hélico gris avec un sonar au pendant. Et, plus tard, quand j’ai appelé le Cross Gris nez, un gars, un militaire, m’a confirmé qu’il y avait des manœuvres militaires sur zone. Ce qui a pourtant, ensuite, été démenti pendant des années ».

« Être remis en question »

« On est toujours sûr de ce qu’on avait raconté il y a 17 ans, insiste Marc Cariou, que cette histoire hante toujours. Ce qui nous chagrine l’esprit, c’est d’être remis en question. On a un peu l’impression de pas avoir été cru par la justice. »Mais est-ce que ce que cet énième récit va permettre de faire avancer l’affaire ? Frédéric et Marc semblent en douter : « Même si on l’espère pour les familles, on n’y croit pas trop. On a été entendu, mais on a juste l’impression que c’était une formalité. Ils voulaient nous entendre dire ce qu’on a dit à l’époque. Ça n’avancera que s’il y en a un qui ouvre sa gueule… Nous, on est persuadé de ce qu’on dit. C’est un sous-marin. Nous, on le sait. Mais, les familles, il faut le leur dire ».

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