Philippe Lamberts (Écolo) : 'Le problème avec le Green Deal, ce n’est pas qu’on va trop vite... c’est qu’on es...


Philippe Lamberts expose clairement la nature du Green Deal, qualifiant l’initiative d’engagement de l’Europe envers la transition écologique ». Selon lui, le volet climat du Green Deal a progressé, mais d’autres aspects tels que la biodiversité et la pollution sont en attente. Lamberts souligne que « le secteur agricole, pilier essentiel du débat, n’a pas encore été pleinement touché par le Green Deal ».

Les défis du monde agricole  : Un modèle à repenser

Donc, quand Jordan Bardella ou les conservateurs du PPE disent que tout ça est la faute du Green Deal, c’est une imposture intellectuelle puisque le Green Deal ne touche pas encore le secteur agricole » explique-t-il. Il souligne la nécessité de repenser le modèle agricole actuel pour le rendre plus durable et respectueux de l’environnement.

Philippe Lamberts (Écolo) : 'Le problème avec le Green Deal, ce n’est pas qu’on va trop vite... c’est qu’on es...

Les conséquences du Green Deal sur l’agriculture  : Un dialogue manquant

Thomas Gadisseux soulève la question de la compatibilité des normes environnementales avec la réalité du monde agricole. Lamberts nie que la situation actuelle soit due aux normes existantes, mais plutôt à des choix politiques qui ont enfermé les agriculteurs dans un modèle économique insoutenable.

L’eurodéputé explique  : « J’entendais Marianne Streel sur votre antenne il y a une semaine (ndlr  : La présidente de la Fédération wallonne de l’agriculture). Que disait-elle ? D’abord qu’on a un problème de modèle économique. Et donc, en effet, on ne peut pas faire l’impasse sur la transformation profonde du modèle économique qui permette alors aux agriculteurs de vivre économiquement décemment, de vivre correctement de leur travail. Ce n’est pas normal que, pour pouvoir survivre aujourd’hui, les agriculteurs touchent parfois la moitié de leurs revenus de subsides. D’ailleurs, d’un point de vue de la dignité humaine, quand vous faites un travail honnête, vous avez envie d’être payé pour votre travail et pas de recevoir l’aumône du contribuable ».

Il insiste sur la nécessité d’un dialogue constructif avec les agriculteurs et critique l’imposture intellectuelle de ceux qui attribuent les problèmes actuels au Green Deal, alors que ce dernier n’a pas encore touché pleinement le secteur agricole.

Pour lui, « Les problèmes liés au changement climatique, les problèmes de santé publique, la qualité de nos eaux – dont on a parlé il n’y a pas si longtemps en Wallonie -, la qualité de l’air, la qualité de nos terres arables est extrêmement dégradée et cela impacte directement la santé humaine et la capacité de nous alimenter à l’avenir. On va donc devoir agir là-dessus. Et je dirais que si la vitesse n’est pas bonne, c’est qu’on est trop lents plutôt que trop rapides ».

L’interview met en avant l’urgence de changer le modèle agricole actuel. Lamberts soutient que la transition écologique ne doit pas compromettre davantage les agriculteurs déjà en difficulté, mais plutôt les accompagner vers des pratiques plus durables. Il rejette l’idée que les normes environnementales sont impossibles à appliquer, affirmant que la vitesse n’est pas le problème, mais plutôt la lenteur de l’action.

Les enjeux géopolitiques des accords de libre-échange  :

La discussion aborde les accords de libre-échange, notamment le traité Mercosur, mettant en lumière les enjeux géopolitiques et économiques qui sous-tendent ces négociations. Lamberts critique le traité Mercosur comme un non-sens économique pour le secteur agricole européen « la première chose n’est pas de passer le traité de libre-échange avec le Mercosur, qui est un non-sens économique pour notre secteur agricole et qui est aussi un dinosaure du commerce international. C’est un traité qui est hérité d’une logique néolibérale à laquelle il est temps de mettre fin ».

Il souligne l’importance de repenser ces accords pour protéger l’agriculture paysanne. « La logique des accords de libre-échange que l’Union européenne a poursuivie, et ça reste le cas avec le Mercosur, est que les Allemands veulent vendre des biens industriels, les Français veulent vendre des services d’épuration des eaux et il faut bien donner quelque chose en échange. Et ce quelque chose est souvent l’accès aux biens agricoles des partenaires au marché européen. Et donc, cette logique-là, qui voit beaucoup de politiques – aussi bien conservateurs libéraux que socialistes – privilégier les grands acteurs du secteur, c’est toujours au détriment de quelqu’un : l’agriculture paysanne ».

Interrogé sur le fait que les verts ont accepté de signer le traité de libre-échange avec la Nouvelle-Zélande. Philippe Lamberts explique que celui-ci  : « est le premier au monde dans lequel le chapitre social et environnemental est juridiquement contraignant. Son non-respect peut donc entraîner la suspension de l’accord. C’est un accord d’un nouveau type. Par ailleurs, rappelez-vous la discussion du CETA à l’époque. C’est un accord dans lequel les investisseurs, les détenteurs de capitaux, ne jouissent d’aucune protection particulière. Autrement dit, dans le cadre de ce traité-là, si un investisseur n’est pas content, il va devant les tribunaux normaux, il n’y a pas de tribunaux d’arbitrage, etc. Et donc, ces changements ont, pour nous, justifié le fait que puisqu’il y avait des changements fondamentaux dans la logique du traité. Nous avons changé d’attitude là-dessus ».

Philippe Lamberts conclut en insistant sur l’importance d’un changement de modèle économique dans le secteur agricole et la nécessité d’un véritable dialogue entre les décideurs politiques et les agriculteurs. Il espère que la manifestation agricole prévue jeudi sera l’occasion d’exprimer la colère tout en favorisant une écoute attentive des dirigeants européens. Lamberts souligne que l’extrême droite ne doit pas être autorisée à instrumentaliser la situation et appelle à un débat public, à la pédagogie et à la présentation des faits pour trouver des solutions durables.