En cas de pollution de l’air, faut-il s’abstenir de faire du sport ou pas ?


On court dans la poussière, on pédale derrière des camions. Faire du sport, est-ce vraiment bon pour la santé quand on pratique en ville, le long des grands axes routiers ou près des zones industrielles? Peut-on pratiquer partout, tout le temps, en faisant fi de la pollution atmosphérique? C’est à cette question qu’a répondu le Dr Wilfrid Guardigli, médecin généraliste, président de la CPTS La Seyne Toulon Ouest (1) lors d’une conférence Jeudi sport santé organisée par la Maison sport santé du comité départemental olympique et sportif du Var.

Un risque prouvé

Si le sport est incontestablement un facteur de bonne santé, une pratique intensive, notamment chez un sujet peu entraîné, augmente le risque d’infarctus. « C’est aussi le cas de la pollution de l’air, explique le Dr Guardigli. C’est même le premier facteur de risque d’un point de vue collectif. Chaque augmentation de 10 microgrammes par mètre cube d’air de particules fines de 2,5 microns expose à une augmentation du risque de 4,5%, pour une exposition le jour même et les deux jours précédents. On parle là des particules qui représentent 80% des polluants atmosphériques et qui sont issues principalement du trafic routier, de la combustion du bois et des cigarettes. »

Cette seule étude montre l’importance de choisir les zones les moins polluées pour la pratique sportive.

Elle n’est pas la seule.

Le Dr Guardigli en cite une autre, réalisée sur des patients déjà coronariens, avec des pathologies traitées et un traitement préventif secondaire. Ils ont effectué deux épreuves d’effort, la première en air sain, la seconde après une exposition d’une heure à un air très pollué. Lors de l’épreuve suivant cette exposition, l’électrocardiogramme a mis en évidence les marqueurs de la souffrance cardiaque.

Une étude comparable, sur vingt non-fumeurs en bonne santé exposés à des particules diesel fait le même constat: le risque de thrombus (caillot) augmente significativement, tout comme l’activation plaquettaire, les marqueurs inflammatoires et la coagulation, qui font le lit de la maladie coronarienne.

Dangers accrus par temps froid

Chez des patients atteints de BPCO (Broncho-pneumopathie chronique obstructive) ou de cardiopathie, une marche de deux heures près d’une avenue polluée augmente significativement l’essoufflement et la toux, comparée à la même activité dans un air sain.

« Tous ces effets liés à la pollution sont accrus par temps froid, à cause de l’augmentation du nombre de particules, mais aussi en cas de fortes chaleurs, à cause de la déshydratation et de l’augmentation du niveau d’ozone, un gaz irritant des fonctions respiratoires », précise le Dr Guardigli.

Voilà qui pourrait fournir plein de bonnes excuses pour éviter les séances de sport. Pourtant, « même dans ces conditions, le sport reste bénéfique, l’avantage va à l’activité physique » indique le Dr Guardigli.

Il convient cependant de prendre les bonnes précautions, particulièrement pour les personnes qui ont des difficultés respiratoires ou souffrant de cardiopathies.

Courir avec un masque n’est cependant pas recommandé. Le plus simple reste d’éviter de courir le long d’un axe routier fréquenté, en dehors des heures de pointe. Attention donc, pour ceux qui font du sport en allant au boulot !

En cas de pic de pollution, il faut préférer les sports doux en extérieur, réduire l’intensité de son activité habituelle ou opter pour les pratiques indoor. Avec un bémol cependant: « L’air intérieur est parfois plus pollué qu’à l’extérieur, à cause notamment des Composés organiques volatiles (COV) ou des filtres des VMC. Dans ce cas, le port d’un masque avec filtre à particules est indiqué, prévient le médecin. On n’a pas idée de la rapidité avec laquelle l’air ambiant devient irrespirable. Cela va très vite, d’où l’intérêt d’aérer très régulièrement. »

Attention aussi dans les piscines: « On se méfie souvent du chlore, qui n’est pas cancérigène mais qui est un irritant des voies respiratoires. On prend moins garde aux moisissures, dont les propriétés allergisantes sont bien réelles. »

1. Communauté professionnelle territoriale de santé.