Victor n’a pas eu «la main qui tremble» en déposant son bulletin Jadot dans l’urne, lui : «Certains militants sont passés de l’autre côté, de celui de La France insoumise, en ayant succombé au vote utile. Moi pas.»
«L’extrême droite aux portes du pouvoir, c’est effrayant»
Beaucoup ont cette désagréable impression d’être convié à un spectacle qu’ils ont déjà vu lors du premier duel Macron-Le Pen il y a cinq ans. «J’ai vraiment peur que le Rassemblement national l’emporte ce coup-ci», se lamente Victor. Même anxiété chez Jonas et son ami, qui préfère rester anonyme, 19 ans tous les deux et militants de la première heure. Si Marine Le Pen «effraie», Emmanuel Macron «est détesté dans le pays», analysent les deux copains. «L’extrême droite aux portes du pouvoir, c’est effrayant. La dynamique actuelle me fait craindre sa victoire.» Dépités, ils déplorent que le «vote utile» n’ait pas réussi à faire basculer les résultats. «Beaucoup d’indécis ont voté Mélenchon. Et ça n’a pas été payant. C’est terrible», se désole Jonas. La suite ? Ils la voient dans la rue et aux côtés des associations, pour manifester et rappeler l’urgence climatique.Dimanche 10 avril, les militants étaient déçus des 4,7% obtenus par leur candidat, qu’ils attribuent au vote utile à gauche, extrêmement favorable à Jean-Luc Mélenchon. (Remy Artiges/Remy Artiges)Si la Bellevilloise est remplie de jeunes et très jeunes militants, écocup blanche à la main, d’autres plus âgés ont répondu présents à la soirée électorale. Nicolas, 55 ans, se dit «déçu» des résultats. «Je trouve ça un peu dur que le climat ne s’incarne pas dans un vote alors que c’est pourtant dans les préoccupations majeures de la population.» Pour lui, ni Le Pen ni Macron ne régleront la question de l’environnement, «ça va accentuer l’urgence», craint-il.
Le Jadothon est lancé
Du côté de la garde rapprochée de Yannick Jadot, on s’inquiète du remboursement de la campagne. Le candidat a lancé un appel aux dons, un «Jadothon». «On se donne cinq semaines pour récolter deux millions d’euros», déclare Julien Bayou, secrétaire national de EE-LV. En effet, le score en dessous des 5 % du candidat écolo ne permet pas au parti de se faire rembourser les frais avancés pour mener la campagne. Charge aux militants et sympathisants d’éponger les dettes du parti et de le sauver de la banqueroute. Si «personne ne peut se réjouir de reconduire Macron», déclare David Belliard, adjoint écolo à la mairie de Paris, son parti «n’a jamais été ambigu sur la lutte contre l’extrême droite». Il déplore que les vrais sujets aient été confisqués du débat médiatique et maintenant «l’heure n’est pas à la fête». Même sentiment chez Nihal, 22 ans. «Je suis en colère, j’ai mal à ma France, affirme-t-elle d’un ton grave. Où sont l’environnement et le climat ?» Pour la jeune activiste, le chantier à venir tient en quelques mots : reconstruire la gauche et l’écologie. Et vite.