Poutine estime que le monde entre dans sa décennie « la plus dangereuse » depuis 1945


Vladimir Poutine lors de la 19ᵉ rencontre internationale du club de discussion de Valdaï, à Moscou, en Russie, le 27 octobre 2022. MIKHAIL METZEL / AP Selon le président russe, Vladimir Poutine, s’exprimant jeudi 27 octobre à Moscou, le monde est entré dans sa décennie « la plus dangereuse » depuis la fin de la seconde guerre mondiale, et le conflit en Ukraine est l’illustration de la lutte contre la domination occidentale. « Nous sommes à un moment historique. Nous sommes sans doute face à la décennie la plus dangereuse, la plus importante, la plus imprévisible » depuis 1945, a déclaré le dirigeant russe, devant le forum de discussion de Valdaï, à Moscou. « L’Occident, sans unité claire, n’est pas en mesure de diriger le monde, mais il essaye désespérément, et la plupart des peuples du monde ne peuvent l’accepter », a-t-il affirmé, jugeant dès lors la planète en « situation révolutionnaire ». Selon lui, l’assaut contre l’Ukraine s’inscrit dans ce « changement tectonique de tout l’ordre mondial ». « La Russie ne supportera jamais le diktat de l’Occident agressif, néocolonial », a-t-il ajouté. Peu avant, il avait décrit sa confrontation avec les Occidentaux, notamment dans le contexte de l’offensive contre l’Ukraine, comme un combat pour la survie même de la Russie. « La Russie ne défie pas l’Occident, la Russie défend juste son droit à exister », a-t-il encore affirmé, accusant les Américains et les autres Occidentaux de vouloir « détruire, effacer [la Russie] de la carte » dans un nouveau réquisitoire contre ses rivaux géopolitiques, qui soutiennent et arment l’Ukraine face aux soldats russes. Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Pour célébrer l’annexion de nouvelles régions ukrainiennes, Vladimir Poutine offre un discours messianique et violemment antioccidental

« Bombe sale » : enquête de l’AIEA

Concernant les accusations russes selon lesquelles Kiev est en train de mettre au point une « bombe sale », le maître du Kremlin a demandé à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) de se rendre « au plus vite » en Ukraine. « L’AIEA veut venir (…). Nous sommes pour, au plus vite et de la manière la plus large possible, car nous savons que les autorités à Kiev font tout pour brouiller les traces de ces préparatifs », a-t-il affirmé. « Nous savons même où cela se fait approximativement [en Ukraine] », a ajouté le dirigeant russe. L’Ukraine et ses alliés occidentaux ont tous, depuis, largement condamné les allégations, « à l’évidence fausses », de la Russie. L’AIEA a, de son côté, annoncé dans un communiqué jeudi soir qu’elle allait visiter « cette semaine » deux sites ukrainiens à la demande de Kiev « pour détecter tout détournement de matière nucléaire ». Selon M. Poutine, l’Ukraine veut utiliser une telle arme radioactive « pour pouvoir dire plus tard que c’était la Russie qui avait effectué une frappe nucléaire ». Le président russe a relativisé ses menaces passées sur un éventuel recours russe à l’arme atomique, estimant qu’il n’avait fait que répondre aux menaces de ses adversaires. « Nous n’avons jamais parlé de la possibilité d’utiliser des armes nucléaires. Nous avons seulement fait des allusions en réponse aux déclarations d’autres pays », a assuré le président russe. Lire aussi : Accusations de « bombe sale » : « Moscou tente de masquer la défaite majeure que son armée essuie dans le sud de l’Ukraine » Pour lui, l’Ukraine et les Occidentaux affirment que Moscou joue l’escalade nucléaire afin d’« influencer les pays neutres pour leur dire : “Regardez la Russie  ! Ne coopérez pas avec elle  ! ” » Il a ensuite accusé les Etats-Unis d’être « le seul pays au monde à avoir utilisé des armes nucléaires contre un Etat non nucléaire », le Japon en 1945. « S’il n’en a pas l’intention, pourquoi en parle-t-il autant ? Pourquoi parle-t-il des capacités [de la Russie] à recourir à une arme nucléaire tactique ? », a répondu le président américain, Joe Biden, dans une interview à NewsNation. « Sa façon d’aborder cette question est très dangereuse », a-t-il estimé. Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Oleksii Reznikov, le ministre de la défense ukrainien, ne croit pas que Poutine utilisera l’arme nucléaire

De prétendues « armes biologiques »

Evoquant la situation économique de son pays, M. Poutine a prétendu que « le pic des difficultés » économiques était « passé ». Selon lui, « l’économie russe s’est adaptée (…). Ce qui se passe est en fin de compte bénéfique pour la Russie et son avenir, (…) y compris dans la sphère économique ». Dans la soirée, le ministère des affaires étrangères russe a, par ailleurs, annoncé que la Russie avait demandé au Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) d’ouvrir une enquête internationale sur l’implication de Washington dans la mise au point présumée d’armes biologiques en Ukraine. Lire aussi Article réservé à nos abonnés Armes biologiques, bombe nucléaire… Comment la Russie justifie son « opération militaire spéciale » en Ukraine Peu après le début de son offensive en Ukraine, la Russie a accusé Washington d’avoir financé un programme d’armes biologiques en Ukraine. Les Etats-Unis comme Kiev ont démenti l’existence de laboratoires destinés à produire de telles armes en Ukraine, Washigton la qualifiant de « pure invention ». L’ONU a, elle, affirmé n’être « pas au courant » d’un tel programme, par la voix d’Adedeji Ebo, haut représentant adjoint chargé des questions de désarmement devant le Conseil de sécurité. Le Monde avec AFP