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Le moment choisi pour cette annonce a toutefois de quoi laisser perplexe. La veille en effet, l’Agence européenne du médicament (EMA) avait indiqué dans un communiqué « qu’il n’y avait pour l’instant pas de preuve que la protection contre une forme grave de Covid diminuait sensiblement chez les adultes de 60 à 79 ans avec un système immunitaire normal, et qu’il n’y avait donc pas de preuve claire pour recommander une quatrième dose dans l’immédiat ».
Même si les pays membres de l’Union européenne ne sont pas tenus de suivre les avis de cette instance, comment expliquer que la France prenne une position aussi radicalement différente ? « Nous avons une divergence dans l’interprétation des données disponibles », tranche le Pr Alain Fischer. Â
« Pas de risque de craindre un épuisement de la réponse immune »
Déjà , la Haute autorité de santé et le Conseil scientifique s’étaient prononcés en faveur de cette nouvelle injection. Cinq arguments ont achevé de convaincre le COSV.
D’abord, le niveau de circulation virale très élevé dans l’Hexagone : avec 140 000 cas par jour, 1500 hospitalisations et une centaine de décès quotidiens, l’épidémie est encore loin d’être terminée. Ensuite, une étude du service de statistiques du ministère de la Santé (confirmée par des études britannique et américaine) a montré qu’à distance du rappel, la protection contre l’hospitalisation chez les plus de 60 ans diminue. Â
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« Par ailleurs, nous disposons de suffisamment de données pour confirmer qu’une dose supplémentaire est sûre, et qu’il n’y a pas de risque de craindre un épuisement de la réponse immune induite par la répétition des vaccins », souligne le Pr Fischer. Enfin, une étude israélienne, montrant une réduction très importante des décès chez les plus de 60 ans après un deuxième rappel, vient d’être rendue disponible en prépublication (non revue par les pairs) : « C’est un résultat important, qui justifie de permettre aux personnes qui le souhaitent de se protéger, alors que les projections des modélisateurs montrent que le risque d’infection va encore être très élevé dans le mois qui vient », complète Alain Fischer. Â
Cette étude ne présente toutefois pas « un niveau de preuve très élevé, car il s’agit d’un travail observationnel, et non d’un essai clinique randomisé contre placebo », relève un observateur.
Cela pourrait expliquer que, cette fois, les autorités n’aient pas choisi de rendre cette nouvelle dose quasi obligatoire par le biais du passe sanitaire, comme il avait pu le faire par le passé. Â
Pas de 4ème dose pour les soignants de moins de 60 ans
Par ailleurs, le gouvernement n’a pas suivi l’avis du COSV qui préconisait également un rappel supplémentaire pour les soignants. Il s’agissait avant tout, pour les membres de cette instance, de protéger le système de santé en réduisant l’absentéisme du personnel pour Covid, et en diminuant, même marginalement, le risque de transmission du virus aux patients.
De leur côté, les pouvoirs publics n’ont visiblement pas été convaincus de la nécessité de revacciner des personnes jeunes, d’autant que cette proposition reposait « sur un niveau de preuve faible », comme le précise le Conseil dans son avis. Â
Reste maintenant à convaincre les Français éligibles de tendre à nouveau le bras. Ce qui n’a rien d’évident : sur les 2,3 millions de 80 ans et plus et les immunodéprimés, seuls 375000 ont répondu à l’appel.
« Ce n’est pas fulgurant, mais c’est un peu tôt pour en tirer des conclusions », indique le Pr Fischer. Du côté du ministère de la Santé, on se rassure en regardant rétrospectivement le succès du premier rappel : « 98% des personnes éligibles sont revenues pour la troisième dose. Nous espérons qu’elles continueront, car elles savent qu’elles sont à risque ».
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Faut-il voir dans cette annonce un premier pas avant, encore une fois, une généralisation à l’ensemble de la population de ce rappel ? Absolument pas, martèle le Pr Alain Fischer : « Pour le moment, nous allons nous arrêter là . Il n’y a aucune indication pour les jeunes à faire une quatrième dose. Ils font des formes bénignes, donc ce n’est vraiment pas le sujet ».
Pour les moins de 60 ans à risque (obèse, diabétiques, etc.), la question doit se discuter avec le médecin traitant. En revanche, il n’est pas du tout certain que cette quatrième dose exonérera les seniors d’un autre rappel à l’automne.
Au contraire, il paraît « plausible » au président du COSV qu’il y ait à nouveau une campagne de vaccination à la fin de l’année, en même temps que celle contre la grippe, au moins pour les publics les plus fragiles. Â
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