3 questions à se poser avant de commencer à utiliser l’intelligence artificielle pour votre travail


L’IA est un outil puissant qui peut nous faire gagner en productivité de bien des manières©PATRICK T. FALLON / AFP

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L’IA est un outil puissant qui peut nous faire gagner en productivité de bien des manières. Pourtant, il convient de se poser quelques questions avant d’envisager son utilisation

3 questions à se poser avant de commencer à utiliser l’intelligence artificielle pour votre travail

Atlantico : De plus en plus de travailleurs envisagent l’utilisation de l’intelligence artificielle pour faciliter leur charge de travail. Dans quels secteurs peut-on effectivement faire appel à l’IA pour booster sa productivité ?

Jérôme Durel : Comprenons bien, tout d’abord, qu’il est possible de faire à peu près tout ce que l’on veut avec de l’intelligence artificielle. Tant qu’on ne parle pas d’un travail strictement manuel, on peut donc s’appuyer sur elle pour gagner en productivité. Il est possible de lui assigner des tâches très basiques comme le fait de générer une image qui viendra illustrer un fichier quelconque. D’autres utilisations sont plus avancées, notamment dans le domaine de l’informatique, où l’on peut exiger d’elle qu’elle produise des lignes de code. Elle est aussi en mesure de procéder à la synthétisation de documents déjà écrits ou à la rédaction d’autres éléments nouveaux. Dès lors, c’est un champ des possibles très large qui s’ouvre et il n’y a pas nécessairement qu’un seul usage “type” auquel on puisse penser. L’enjeu principal, pour pouvoir faire appel à l’intelligence artificielle, c’est de savoir comment utiliser l’outil. La question de sa manipulation est essentielle, et il importe à cet égard de bien comprendre qu’il faudra effectivement se former (au moins un peu) à cette nouvelle technologie. D’aucuns devront tâtonner aussi, avant d’en arriver à un résultat correspondant à leurs attentes. Dans tous les cas, et ce quelque soit le secteur d’activité, c’est un outil puissant qui peut venir en aide sur un nombre de tâches conséquents. C’est vrai pour la comptabilité de toute entreprise, par exemple : on peut se servir de l’IA pour corriger des erreurs Excel ou des formules erronées, pour s’en tenir à ce cas de figure. On peut aussi se tourner vers elle pour s’épauler dans l’essentiel des démarches administratives auxquelles sont confrontés l’ensemble de nos sociétés ou même pour se renseigner sur des nouvelles techniques qu’il pourrait être utile d’appliquer pour gagner en efficacité dans le cadre d’un emploi plus technique ou manuel.

Quelles sont les questions que tout travailleur devrait se poser avant de faire appel à l’intelligence artificielle dans le cadre de son emploi ?

L’utilisation d’intelligence artificielle dans le cadre de l’activité professionnelle soulève plusieurs questions, plusieurs enjeux, qu’il faut bien cerner. Le premier concerne à mon sens la sécurité des données. C’est même le nerf de la guerre puisque les données avec lesquelles on travaille sont le plus souvent confidentielles et que les fournir à une intelligence artificielle pour qu’elle puisse œuvrer sur la base de celles-ci, c’est de facto rompre la confidentialité. En somme, cela revient potentiellement à créer une faille de sécurité. La question à se poser est donc la suivante : est-il vraiment nécessaire, souhaite-t-on vraiment envoyer ces données confidentielles sur un serveur tiers ? Le danger n’est pas comparable à la faille récemment observé dans le cadre de France Travail et il n’y a pas non plus de risque de virus, mais il faut bien comprendre que l’IA aura recours aux données qu’on lui communique, qu’elles lui serviront à s’exercer. Parce qu’il n’y a pas d’intervention ou de traitement par l’humain derrière, le risque reste très différent d’une tentative de hack.De plus, l’utilisation de l’intelligence artificielle peut également, dans certains cas de figure, soulever des questions relevant du droit. Le simple fait de générer une image en IA pose question : à qui appartient-elle, au juste ? A celui ou celle qui a rédigé le prompt de la demande ? Aux divers artistes dont le travail a été utilisé pour créer le tracé ? Ou alors au propriétaire de l’intelligence artificielle qui édite l’image en question ? Pour l’heure, le flou reste total et chaque entreprise décide de sa propre politique. C’est une question à se poser avant de se décider à utiliser des images réalisées à l’aide d’intelligence artificielle pour illustrer une campagne publicitaire, par exemple.Notons également que certaines entreprises qui éditent des intelligences artificielles, comme c’est le cas de Microsoft par exemple, prévoient des clauses de confidentialité, en cas d’utilisation payante. Il existe aussi des propositions de co-pilotage non commerciale des produits de ces entreprises qui peuvent aussi bénéficier de telles garanties.La troisième question qu’il convient de se poser, c’est le choix de l’IA à laquelle faire appel. Nous l’avons évoqué précédemment, certaines sont armées de clauses de garanties. Il faut aussi s’interroger au sujet de ses propres besoins : s’il s’agit seulement d’assurer sa comptabilité personnelle et d’optimiser le traitement de ses fichiers Excel, il n’y a pas d’inquiétude à avoir. N’importe quelle IA sera suffisante. Toutefois, si la notion de confidentialité est essentielle, alors il faut évidemment se tourner vers les solutions adaptées. Se tourner vers sa direction juridique peut être utile pour éviter d’éventuelles erreurs.

A quel point l’IA peut-elle être en mesure de bouleverser notre rapport au travail ?

La question relève presque de la philosophie. La réponse diffère évidemment selon les secteurs : l’IA est très efficace quand il s’agit de répondre à des besoins relevant de la bureaucratique au sens large – ce qui inclut notamment les développeurs informatiques par exemple. Sur ces sujets, elle est en mesure de tout changer, d’engendrer des gains de temps conséquents. On pourrait presque imaginer un monde – je ne sais pas s’il faut le rêver ou non – ou tout est fait par IA, peu ou prou. L’employé deviendrait alors un pilote pour l’intelligence artificielle. A cet égard, on pourrait légitimement comparer l’avènement de l’IA à la révolution industrielle durant laquelle nous sommes passés d’un travail manuel à un travail automatisé.

Tous les travailleurs ont-ils, dès lors, intérêt à s’essayer à l’IA ?

Oui, indéniablement. Tout le monde devrait au moins tester : c’est en fouinant un peu que l’on trouvera des usages, parfois spécifiques à son métier. C’est comme cela aussi que l’on pourra identifier certaines des difficultés que la technologie rencontre face aux exigences propres aux différents secteurs. L’expérience personnelle du produit ne peut donc pas être remplacée et c’est ainsi que l’intérêt réel de l’IA sera révélé dans des cas très précis.