Quatre communes wallonnes se professionnalisent dans la transition écologique


04 :00

Rochefort, Grez-Doiceau, Chaudfontaine et Amay se sont adjoint les services de Kick Belgium, l’ASBL de transition écologique de la famille de Pret. Sur le terrain, les modalités diffèrent, mais pas la volonté de mieux faire.

Initiée par la famille de Pret, qui compte parmi les actionnaires de référence du géant brassicole AB InBev

l’ASBL Kick Belgium s’est donnée pour mission d’accompagner les communes belges dans l’accélération de leur transition écologique et la régénération de la biodiversité. Alors, pas à coups de baguette magique, mais bien à l’aide d’une méthodologie complète, partant d’un diagnostic partagé pour aboutir à un plan d’action collaboratif concret porté par un maximum d’acteurs locaux.

Il en va de Grez-Doiceau, Chaudfontaine et Amay, qui ont toutes trois répondu présentes comme, avant elles, Rochefort, bourgade du bourgmestre empêché et ministre fédéral de l’Economie et du Travail Pierre-Yves Dermagne (PS).

« Dans un premier temps, notre objectif est de tester et d’améliorer notre méthode d’accompagnement. »

Valentine de Pret

Présidente du conseil d’administration de Kick Belgium

« Dans un premier temps, notre objectif est de tester et d’améliorer notre méthode d’accompagnement. À l’heure où l’on parle de plus en plus d’effondrement, nous faisons le pari de l’espoir par l’action », avance Valentine de Pret, présidente du conseil d’administration. Comment? « En mobilisant la communauté des acteurs locaux, en diffusant les solutions et en augmentant les investissements dans la restauration de la biodiversité. »

À noter, les degrés de collaboration sont à ce stade divers avec les quatre partenaires, mais c’est toutefois là déjà un début.

Rochefort

379.500

euros

Pour sa transition, Rochefort a débloqué fin 2021 un budget de quelque 379.500 euros.

Rochefort inondée

Auditionnée mi-novembre en commission inondations au Parlement wallon, celle qui était bourgmestre de Rochefort à l’époque, Corine Mullens, a dressé un bilan chiffré des inondations pour sa commune. Quelque 1.444 ménages (pour 3010 habitants) 42 commerces et 24 bâtiments ont été touchés. En sus, deux ponts et trois passerelles ont été détruits. 

Pour se relever, la Ville a dû redoubler d’efforts. 32 arrêtés de démolition ou d’inhabilité ont été pris, 31 marchés publics pour reconstruction ont été lancés (chiffre au 12 novembre) et sept personnes ont été engagées pour renforcer le personnel communal.

Reprenons le cas de Rochefort, le plus avancé. Un budget de 379.500 euros y a été débloqué fin 2021. À la clé, une vingtaine d’actions concrètes ont été identifiées et financées. Il en va par exemple du creusement d’une soixantaine de mares agricoles et forestières sur les deux années à venir afin de restaurer la biodiversité, tout en atténuant les conséquences des futures inondations – à un an du triste anniversaire des événements de mi-juillet 2021, dont la charge des sinistres a dépassé les deux milliards et demi d’euros, le développement arrive à point nommé.

Un an après les inondations: relancer l’économie, sans attendre les masterplans

« L’expérience de Rochefort, première à nous avoir rejoints, est précieuse, car elle nous a permis d’identifier des dizaines de solutions et de nouer des partenariats avec divers acteurs tels que BePlanet, Natagora, Natagriwal, la Société Royale Forestière Belge, Farm for Good, Future Proofed Cities, Worms, Give a Day… et la liste s’allonge chaque jour. Sur cette base, on veut construire et diffuser en ligne une bibliothèque des solutions (sur le modèle du Suisse Bertrand Piccard et ses 1.000 solutions rentables pour un monde plus vert, NDLR), qui permettra à chaque acteur ou actrice de s’approprier et initier la solution de son choix », s’enthousiasme Grégor Chapelle.

« On veut construire et diffuser en ligne une bibliothèque des solutions qui permettra à chaque acteur ou actrice de s’approprier et initier la solution de son choix. »

Grégor Chapelle

CEO de Kick Belgium

Amay

Pour ce qui est de la commune d’Amay, dirigée par Jean-Michel Javaux (Ecolo), le travail vient de commencer après aval d’une convention de partenariat le 26 avril. L’heure est à la création d’une « alliance pour la biodiversité ». Regroupant déjà une trentaine d’acteurs associatifs, d’entreprises, d’écoles et de citoyens d’Amay, cette dernière s’est attelée à la création d’un atlas de la biodiversité communale.

Et pour cause, Amay est sous tutelle du Centre Régional d’Aide aux Communes (CRAC), organisme chargé d’assurer le suivi et le contrôle des plans de gestion des communes et d’y apporter son concours au maintien de l’équilibre financier. Pour 2022, 25.000 euros ont toutefois pu être dégagés. « Mais en nous forçant à la créativité, ce sera aussi un bon test des capacités de Kick d’aller chercher des nouveaux investissements partout où c’est possible », souligne Grégor Chapelle. « On va passer au crible tous les appels à projet et aider à rentrer des dossiers. En parallèle, nous mobiliserons les entreprises locales pour qu’elles sponsorisent les solutions retenues. »

Grez-Doiceau

Restent enfin Grez-Doiceau et Chaudfontaine. Dans le premier cas, « le collectif de citoyens Grez des 4 Saisons, cofondé par Olivier Legrain (le patron d’IBA

NDLR), a pris l’initiative de nous contacter. Ils organisent des promenades destinées à mieux connaître les fermiers et agriculteurs de la localité et à réfléchir aux possibilités de développer une filière d’alimentation locale et durable. Ils avaient déjà rassemblé des associations et des entreprises. Du coup, quand on a tous rencontré le Bourgmestre Paul Vandeleene et l’échevin de l’Environnement Dimitri Dewilde, ils ont forcément été enthousiastes », sourit Grégor Chapelle.

« Je suis profondément convaincu par l’approche de Kick. Face à ce qui vient, nous avons besoin de communautés de résilience locale. »

Olivier Legrain

CEO d’IBA et cofondateur du collectif de citoyens Grez des 4 Saisons

Olivier Legrain ne cache d’ailleurs pas non plus son enthousiasme. « Je suis profondément convaincu par l’approche de Kick. Face à ce qui vient, nous avons besoin de communautés de résilience locale. La force de Kick, c’est de vouloir mobiliser tous les acteurs: privés, publics, associatifs, citoyens. Nous les voulions donc absolument chez nous », évoque le patron.

Chaudfontaine

Dans le deuxième cas, la commune de Daniel Bacquelaine (MR) « est à la pointe de la question depuis toujours. Plusieurs des solutions que nous proposons généralement étaient déjà d’application. À la demande de l’échevin de l’environnement Alain Jeunehomme, nous allons donc nous concentrer, là, sur le renforcement des partenariats avec les entreprises privées et l’identification de projets plus ambitieux », explique Grégor Chapelle.

Pour accompagner ces quatre premiers partenaires, l’équipe de Kick a commencé à grandir. Elle compte désormais six personnes, contre deux encore l’an dernier. « De quoi nous permettre de couvrir de 4 à 10 communes (à chaque fois, un employé communal est détaché en support, NDLR). C’est bien pour cette année. On ne veut pas grandir trop vite, même si on a déjà des communes sur liste d’attente. C’est comme pour une start-up, on veut d’abord démontrer que ça marche avant d’enclencher la scale-up », détaille le patron.

« Nous avons entendu l’alerte légitime des collapsologues. Avec Kick nous voulons être l’allié des solutiologues. »

Grégor Chapelle

CEO de Kick Belgium

Pour la fin de l’année par contre, « deux recrutements sont encore prévus, avec notamment l’idée d’essaimer en Flandre puis à Bruxelles pour à terme, commune par commune, faire de la Belgique un modèle de régénération de la biodiversité ». Et Grégor Chapelle de conclure par cette formule : « Nous avons entendu l’alerte légitime des collapsologues. Avec Kick, on veut être l’allié des solutiologues. »

Vers des « Obligation à Impact Environnemental »

En parallèle de ces avancées, Kick a noué un partenariat avec le leader mondial de l’investissement à impact qu’est la société belge KOIS.

Objectif? Construire un nouveau modèle d’analyse coûts-bénéfices et de financement, qui déboucherait sur la création d' »Obligations à Impact Environnemental ».

L’inspiration n’est pas à chercher très loin puisqu’elle se calque en partie sur les « Social Impact Bonds » (forme de de contrat entre public, qui cadre, et privé, qui finance ou porte, basé sur les résultats), lancés en 2014 en Belgique par Grégor Chapelle et KOIS, aux côtés de Thomas Dermine (actuel Secrétaire d’État pour la Relance), alors fraîchement sorti de Harvard.

contre 22% habituellement.

« Si nous voulons accélérer la restauration de la biodiversité avec la rapidité qu’exige la situation, il va nous falloir trouver de nouveaux mécanismes de financement. KOIS va nous aider à trouver comment faire du transversal, en rassemblant par exemple les projets par thématiques », détaille Grégor Chapelle.

conclut-il.