A partir du 1er janvier, la France va généraliser les cours criminelles départementales, cours composées entièrement de juges professionnels. Pour certains, cette évolution sonne la fin des juridictions populaires. « Absolument pas », répond le ministre de la Justice Eric Dupont-Moretti, invité de RTL ce jeudi 22 décembre. « Une décision rendue par la cour criminelle départementale, en cas d’appel, l’affaire est jugée par la cour d’assises traditionnelle. J’ai renforcé d’ailleurs la souveraineté populaire puisque j’ai exigé qu’il y ait une majorité de jurés pour prendre une décision de culpabilité ».
Pourquoi cette professionnalisation ? « C’est Nicole Belloubet qui a mis en place les cours criminelles départementales. On a maintenant les retours de cette expérimentation. Cela va plus vite, c’est mieux pour les victimes et les accusés. Les audiences sont plus apaisées et on évite la correctionnalisation. Il y avait une embolisation des cours d’assises classiques et un certain nombre de viols étaient jugés en correctionnelle. On oubliait qu’il s’agissait d’un viol, on en faisait une agression sexuelle et c’était insupportable pour les victimes. La cour criminelle départementale permet de régler cette question ».
Des syndicats de magistrats et de nombreux avocats s’inquiètent d’une justice qui ne sera plus rendue au nom du peuple français, en quelque sorte, en particulier pour les affaires de viols, très présentes dans les tribunaux. « C’est très singulier. Le procès du 13 novembre, par exemple, tout le monde a souligné la très grande qualité. Ce procès s’est tenu devant une juridiction exclusivement composée de magistrats professionnels. C’est curieux que les syndicats de magistrats aient de la défiance à l’encontre de leurs collègues. Deuxièmement, si on est pas content d’un décision rendue par une cour criminelle départementale, on interjette appel et on se retrouve devant la cour d’assises classique », explique le ministre.
Alors que les viols représentent la très grande majorité des affaires jugées par ces tribunaux, environ 88% dans 15 départements ayant testé le dispositif, faut-il craindre la naissance d’une juridiction spécialisée pour juger les affaires de viol ? « Non, pas du tout parce qu’il n’y a pas que le viol, répond le garde des Sceaux. La compétence de cette cour criminelle départementale, c’est le quantum de la peine. Je vais traduire : c’est 20 ans de réclusion criminelle. Au-delà, c’est la cour d’assises classique qui a vocation à juger. On va juger certains vols, par exemple, avec des circonstances aggravantes. Il n’y a pas que des affaires d’ordre sexuel, pas du tout », explique le ministre.
Enfin, Eric Dupont-Moretti estime que les moyens alloués à la Justice française sont suffisants pour faire fonctionner ces nouvelles cours. « Nous avons renforcé de façon historique les moyens de la Justice, indique le ministre. La semaine dernière, le procureur général de Paris parlait des difficultés de la Justice mais il a précisé qu’elle n’avait jamais été dotée d’autant de moyens, avec 44% d’augmentation de son budget. Depuis que je suis ministre, 26% d’augmentation. Avec cet argent, nous avons embauché des magistrats comme jamais. Un plan historique d’embauche de 700 magistrats, 850 greffiers et 2.000 contractuels. Pour donner un exemple, sous François Hollande on a recruté 150 magistrats et sous Nicolas Sarkozy on en a perdu une centaine partis à la retraite. Mais nous n’avons pas tout réglé. Les magistrats ne peuvent pas penser que plus est égal à moins, ou alors, c’est à désespérer de tout. Et dans le plan d’embauches que nous allons mettre en place, c’est 1.500 magistrats de plus, ce sont les promesses présidentielles, 1.500 greffiers et de plus et des contractuels. Au total, plus de 10.000 emplois nouveaux ».
La rédaction vous recommande
L’actualité par la rédaction de RTL dans votre boîte mail.