Encore balbutiant il y a une dizaine d’années, le marché du reconditionné est aujourd’hui en plein essor. En 2022, il se sera vendu en France quelque 4 millions de téléphones reconditionnés. Un chiffre en constante augmentation mais comparé aux 16 millions d’appareils vendus neufs par an, les nouvelles habitudes de consommateurs sont encore à encourager.
Dans un contexte d’inflation et de hausse de prix, choisir de la seconde main s’avère non seulement financièrement intéressant mais aussi bénéfique pour la planète.
En effet, selon
une étude récente de l’Ademe, un téléphone mobile reconditionné permet de prévenir l’extraction de 76,9 kg de matières premières et l’émission de 24,6 Kg de CO2 (eq GES) par année d’utilisation.
Malgré tout, deux tiers des Français n’auraient pas encore franchi le pas. Le premier frein demeure le manque de confiance dans la qualité de produits dont la provenance est mal indiquée. Et il faut bien dire que le marché du reconditionné peut s’avérer une vraie jungle pour le consommateur. Les plateformes de revente se sont multipliées sans qu’il existe de législation très précise sur les standards de remise à niveau des appareils.
Au point qu
’une enquête de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), menée l’année dernière, épinglait pas moins d’une cinquantaine de revendeurs pour leur manque de vérifications et de tests des réparations réalisées.
Du côté du syndicat des industriels du reconditionnement, le SIRRMIET (syndicat interprofessionnel du reconditionnement et de la réglementation des matériels informatiques électroniques et télécoms) il s’agit de défendre les intérêts de la filière française. La quarantaine d’entreprises adhérentes a signé une charte de qualité impliquant l’emploi de salariés qualifiés, une garantie de deux ans, un Service Après-Vente français et des critères de réparations exigeants qu’elles ont fait certifier par un label QualiCert.
Le GSM, atelier de reconditionnement à Ivry-sur-Seine, déjà labelisé QualiCert vient d’obtenir le label Qualirépar, Oct 2022
Annabelle Grelier
« Ces labels permettent de nous démarquer mais ils sont encore peu connus du grand public. Ce sont les distributeurs et les revendeurs qui mettent notre image en jeu » relève le président du SIMRRMIET, Jean-Lionel Lacoureye
« Et certains ne sont pas très scrupuleux » nous explique-t-il, privilégiant le prix, quitte à se fournir auprès d’ateliers de reconditionnement plus ou moins clandestins. Sans parler de la distorsion de concurrence avec les acteurs étrangers sur les questions fiscales. La TVA mais aussi une redevance pour copie privée contre laquelle le syndicat se bat, après qu’elle a été étendue aux appareils reconditionnés en 2021. Une décision du Conseil d’Etat est attendue pour la fin de l’année.
Tout du moins pourra-t-il se réjouir du tout nouveau label attribué aux professionnels réparateurs, QualiRépar, qui sera mis en place par le gouvernement à compter du 15 décembre prochain avec un fonds réparation qui prendra la forme d’un forfait de 10 à 45 euros selon le type d’appareil à réparer.
Ce dispositif répond aux nouvelles obligations de la loi Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire (AGEC), qui vise à promouvoir auprès de tous les français, l’allongement de la durée d’usage des produits.
Un marché dépendant de l’étranger
Les opérations de reconditionnement sont d’autant plus vertueuses qu’elles sont associées à la mise en place d’une économie circulaire. 2 téléphones reconditionnés sur 3 vendus en France proviennent des Etats-Unis et d’Asie pendant que 120 millions d’appareils dorment dans les tiroirs des français. Un paradoxe auquel veut remédier Gaël Brouard.
Ancien salarié de Nokia, le président de
CompaRecycle a pris très vite conscience que si rien n’était fait pour encourager la reprise des téléphones, un grand gâchis se préparait. Il lance alors en 2013 son comparateur de prix.
« Déjà pour vendre un bien, il faut en connaître la valeur mais à mes débuts le marché était totalement désorganisé et les prix variaient du simple au double selon les revendeurs. »
Et le jeune entrepreneur se souvient qu’il y a dix ans, le prix moyen de reprise était d’environ 45 euros quand aujourd’hui il est de 130 euros.
CompaRecycle, a été le premier à se lancer sur le marché du reconditionné. Avec un siège à Massy dans l’Essonne assorti d’une plateforme logistique à Rennes, il est aujourd’hui le comparateur le plus utilisé des professionnels à l’instar de
l’opérateur Orange qui pour améliorer son bilan carbone doit proposer une offre d’appareil de seconde main.
Pour le particulier, l’intérêt de passer par son comparateur de prix, c’est qu’en plus d’afficher une offre crédible, il sert d’intermédiaire avec ses 50 partenaires, dont il a unifié les modalités de reprise. Des reconditionneurs français, car l’objectif de Gaël Brouard est bien de favoriser une filière du reconditionné « made in France ».
Lionel Uzzan, CEO du GSM et Gaël Brouard, CEO de CompaRecycle
Annabelle Grelier
Chaque foyer français a dans ses tiroirs 4 à 5 appareils, que ce soit des téléphones, ordinateurs ou consoles de jeux, de quoi alimenter selon lui le marché tricolore de l’occasion.
Dans un souci écoresponsable et pour faciliter la reprise, CompaRecycle a simplifié les démarches de reprise.
Après avoir répondu à un rapide questionnaire sur le produit n’excédant pas 6 questions et sélectionné l’offre de son choix, l’internaute n’aura qu’à imprimer une étiquette d’expédition prépayée pour l’envoyer par la poste, avant de recevoir le prix de reprise par virement sur son compte bancaire. L’utilisateur peut également, rapporter physiquement son vieux téléphone, et obtenir en échange un bon de cession.
CompaRecycle a conclu des partenariats avec quelques grandes enseignes qui paient par émission d’un bon d’achat valable dans leurs magasins.
La reprise de téléphone sur le site de CompaRecycle a généré environ 85 millions d’euros de transactions en 2021 et croît chaque année de 20 à 30%.
« Nous sommes des facilitateurs de reprise. Les Français doivent savoir que 80% des appareils qu’ils n’utilisent plus sont fonctionnels et réparables et 40% sont revalorisables. »
Avec tous nos vieux équipements, ce serait en moyenne 500 euros que l’on peut espérer récupérer et autant de kilos de CO2 que l’on émettra pas et de matières premières que l’on préservera assure-t-il, se référant
aux chiffres de l’Ademe démontrant qu’un appareil reconditionné et revendu en France équivaut à 9 kilos de Co2 contre 60 kg pour un portable reconditionné importé.
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