Stéphane Genoud : «Dire qu’il faut mettre un couvercle sur une casserole, c’est nous prendre pour des enfants!»


Il a ensuite rattrapé son retard en réalisant toutes sortes d’études secondaires pour terminer par un doctorat en économie de l’Université de Neuchâtel.

Le Temps: Votre parcours pour le moins éclectique vous aide-t-il aujourd’hui?

Stéphane Genoud : «Dire qu’il faut mettre un couvercle sur une casserole, c’est nous prendre pour des enfants!»

Ce matin, l’Office fédéral de l’énergie a publié les chiffres de la consommation d’énergie en Suisse pour 2021. La part du renouvelable atteint 80%, dont 68% d’hydraulique. 18,5% provient du nucléaire et moins de 2% «d’agents énergétiques fossiles». Qu’est-ce que ces chiffres vous inspirent?

C’est une bonne nouvelle. On voit la croissance constante du renouvelable mais elle n’est pas assez rapide. Mais il faut distinguer la production de la consommation. En termes de production, nous dépendons énormément de l’étranger et on ne peut pas se tresser de lauriers.

Mais en même temps, qu’«il ne faut pas dramatiser», selon le conseiller fédéral Guy Parmelin. Qui croire?

Or soit une institution fédérale qui sait de quoi elle parle. Avec Guy Parmelin je pense qu’il y a un problème de langage et qu’il doit porter les paroles de ses services. Donc moi j’ai plutôt tendance à croire Werner Lüginbühl.

Est-ce que l’on ne joue pas à se faire peur?

A part le lobby des vendeurs de bougies, je ne vois pas qui pourrait en profiter… Après, si elle est bien gérée, une coupure électrique ne pose pas de problèmes. Plein de pays dans le monde ont des coupures tous les jours. Ce qui est grave, c’est si l’on ne gère pas bien la coupure. Tenez, je fais parfois du planeur; j’ai toujours un parachute sous les fesses même si je ne l’utilise jamais. L’important est d’avoir cette solution à disposition.

Quel est le parachute de secours de la Suisse?

Pour l’hiver qui vient, la seule solution est de baisser notre consommation. Et à ce stade, les consignes du Conseil fédéral sont presque comiques. Même votre petite-fille de six ans sait qu’il faut mettre un couvercle quand l’on cuisine… Dire cela aux gens, c’est nous prendre pour des enfants. J’attendais que Guy Parmelin sorte un nez rouge lorsqu’il énonçait tout cela. Je suis tombé de ma chaise.

L’appel à la responsabilité individuelle n’a pas marché longtemps durant le covid. Est-ce que l’on peut vraiment miser là-dessus pour la crise qui se profile?

Le discours de Guy Parmelin n’est à ce stade ni crédible ni sérieux. S’il nous disait clairement: «J’ai besoin de vous, pas uniquement pour des couvercles sur les casseroles, mais parce que nous devons tous nous serrer les coudes», je pense que les gens prendraient conscience de la situation. Si on continue de nous traiter comme des enfants, c’est sûr que cela ne marche pas.

Et pour les entreprises?

Oui, les éclairages et le chauffage, cela permet d’avancer un peu. Mais pour certaines entreprises, cela implique de réduire la production. Alors les calculs sont forcément plus compliqués. Il faut maintenant savoir quelle entreprise va être coupée, quand, où sont les listes. Il y a de vrais enjeux pour déterminer qui est prioritaire ou pas. C’est un peu comme les cas de rigueur durant le covid. Mais là, nous aurions encore un peu le temps de nous en préoccuper.

Quels sont les meilleurs outils ou pratiques à disposition des exécutifs communaux pour agir le plus vite et efficacement afin de réduire la consommation d’énergie?

Martigny Et aider les propriétaires – si ce n’est pas la commune – à passer à d’autres solutions.

Et le scénario du pire?

S’il y a un vrai black-out, c’est que le réseau européen est tombé. Et cela, c’est compliqué à relancer. Cela implique par exemple qu’il n’y ait plus d’eau courante, donc il faut prévoir des réserves… Mais après, il faut rester civilisés et aller donner un coup de main à sa commune. Je pense par exemple aux pompiers car, évidemment, les détecteurs d’incendie ne fonctionneront plus non plus.

Et pour les hivers suivants?

La Suisse est considérée comme un pays tiers car nous n’avons pas d’accord-cadre… et donc l’UE ne va pas faire preuve de solidarité avec nous

Est-ce qu’à l’avenir On attendra la hausse annuelle des primes avec anxiété?

08.22)

Mais cela j’ai donc eu une très bonne nouvelle la semaine dernière…

Cela devrait même être obligatoire.

Son fournisseur lui dit que s’il y a un black-out Comment l’expliquer?

L’onduleur – qui transforme le courant continu des panneaux en courant alternatif pour la consommation domestique – doit être synchronisé avec le réseau. S’il n’y a plus de réseau, l’onduleur ne peut plus se synchroniser et subira de graves détériorations. Il faudrait dès lors un onduleur dit « off-grid » et une batterie. Mais c’est plus cher. Certaines voitures électriques peuvent jouer le rôle de la batterie, mais toutes ne sont pas encore équipées en ce sens.

Justement sur ce sujet… Les voitures électriques en plein développement vont-elles faire exploser la consommation électrique de la Suisse? Est-ce une bonne ou une mauvaise chose?

Qu’en pensez-vous?

Nouvelle initiative pour les centrales nucléaires: opposants et partisans invoquent le pragmatisme (28.08.22)

Vingt ans pour construire des éoliennes à Ste-Croix hydraulique, éolien, géothermique, biomasse) nous pouvons non seulement résoudre le problème à court terme et en plus de lutter contre le réchauffement climatique…

Et quid des micro-centrales nucléaires?

Oui, peut-être que l’on peut réduire à vingt ans. Mais même les gestionnaires des centrales n’en veulent plus de nouvelles.

Votre intuition, c’est que la crise que l’on traverse actuellement va accélérer la transition énergétique vers une économie plus durable, ou la retarder?

Ce qui est sûr, c’est qu’on a jamais parlé autant que ces derniers temps. Et cela, c’est une excellente nouvelle.