Plusieurs artistes brisent le tabou de la santé en chantant leur pathologie à la première personne du singulier. Un geste courageux dans un univers où la maladie, qu’elle soit physique ou mentale, n’a pas toujours été bien acceptée.
Article écrit par Alexandra Dumont, issu du Tsugi 156 : 100 personnalités qui font bouger la musique
“Amie Amère maladie / c’est toi qui choisis / quand les blouses blanches / ralentiront ta folie.”
Dans les paroles de “Mala Diva”, la Française Thérèse (ancienne moitié du groupe La Vague) aborde directement la maladie qui la ronge. La chanteuse de 36 ans vivait, depuis une dizaine d’années, dans le secret du diagnostic d’une polykystose hépato-rénale héréditaire, caractérisée par la formation de kystes au niveau des reins le plus souvent, du foie la concernant. Dans l’attente d’une greffe, la femme derrière l’artiste ne peut plus se taire. Elle a pris d’abord la parole sur ses réseaux sociaux avec un diptyque photo qui fait toute la lumière sur son abdomen gonflé, un symptôme de son affection qui lui donne l’apparence d’être enceinte. “Il fallait que ça sorte, dit-elle. C’est la confrontation avec la mort qui m’a poussée à le faire le plus vite possible”.
“Je ne voudrais pas avoir l’air de me plaindre ou pire, me montrer vulnérable, dit Lisa. J’ai peur que les gens me perçoivent comme moins efficace, comme quelqu’un de négatif qui a une mauvaise attitude, ou comme quelqu’un qui ne serait pas capable d’en prendre autant que les autres, de produire de la musique ou de gérer la performance et la pression. Mon image en prendrait un coup ! ” “Le risque en tant qu’artiste, c’est de ne plus être bankable, tranche Thérèse. Il y a plein de mythes fondateurs dans l’industrie du disque. Un artiste est une icône. Souffrir pour mieux écrire, peut-être, tant que tu es beau et en bonne santé ! Je me demande jusqu’où j’irai dans ma volonté de questionner le monde sans être bannie ?” Le courage se situe là aujourd’hui, dans le fait de tenir ses convictions. L’artiste a pu compter sur le soutien de son entourage professionnel proche, “qui s’est mis en quatre pour l’aider à tous les niveaux”, assure Alex Monville. “Je suis presque un cas d’école, relativise‑t‑elle. Il a fallu que je mette à gauche au cas où, financièrement, je me retrouve avec un méga trou.” Elle soulève une question essentielle, à laquelle l’industrie du disque n’apporte pas (encore) de réponses concrètes. Sans parler de l’accompagnement psychologique, dévolu aux médecins. Ce qui renforce encore plus le tabou. “Est-ce que c’est son rôle ?, s’interroge Robin Ecoeur. Je n’ai pas la réponse, mais la question se pose.” D’autant que les assauts musicaux des artistes que nous avons cités se font entendre, à voix haute.
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