sans justice indépendante et où la législation impose aux entreprises de collaborer avec le gouvernement.La plateforme s’est-elle dite prête à collaborer et répondre à vos questions ?Ils collaboreront parce qu’ils y seront obligés. Dans le cadre des commissions d’enquête, on témoigne sous serment et les mensonges coûtent cher. Enfin, une commission d’enquête peut contrôler sur pièce et faire des visites sur place. Nous aurons donc les moyens de nos objectifs. Mais même sans cet impératif, la stratégie de TikTok est de communiquer. Le PDG est venu de lui-même rencontrer la Commission européenne et il doit aussi se rendre, à sa demande, aux États-Unis dans les jours qui viennent. Son attitude est plutôt coopérative. Maintenant, c’est dans la réponse aux questions qu’il risque d’y avoir des contournements. Le diable se niche dans les détails.
Je ne me fais pas d’illusions sur notre capacité à percer l’opacité des algorithmes
Dans la mesure où les algorithmes sont protégés, quelle est votre marge de manœuvre pour travailler ?En tant que sénateurs, nous n’avons pas les moyens d’analyser des pages et des pages de codes qui, de plus, changent tous les jours. Mais nous allons interroger des chercheurs spécialisés dans les algorithmes qui vont nous aider à orienter nos questions pour essayer de comprendre une partie du problème. Je ne me fais pas pour autant d’illusions sur notre capacité à percer l’opacité des algorithmes.
La Commission européenne demandait fin février à ses salariés de supprimer l’application en urgence elle est obligée de motiver cette décision en expliquant ce qu’il se passe au niveau du transfert de données. Il est quand même très probable que ses motivations relèvent de l’espionnage de données, raison pour laquelle ils ne veulent pas en parler. Si TikTok espionne la Commission européenne, tous les États sont menacés. Je compte commencer demander à la Commission européenne de transmettre les informations qui l’ont poussé à prendre cette décision. D’autant plus qu’ils l’ont pris en urgence, ce qui n’est vraiment pas habituel.
Grâce au RGPD, notre système de législation est l’un des plus avancés
Que faudrait-il faire pour mieux les encadrer ?J’avais déposé un amendement dans le cadre de la loi séparatisme avec cette idée : à partir du moment où une plateforme sélectionne les contenus diffusés, elle adopte une ligne éditoriale et elle se rend responsable de ces contenus. Ça a été voté au Sénat contre l’avis du gouvernement, mais ce n’est pas arrivé à l’Assemblée. Dès lors qu’on ne l’aura pas adopté, on fera toujours face à ces mêmes problèmes de désinformation et de haine en ligne.TikTok a annoncé la création à Dublin d’un « centre européen de transparence et de responsabilité ». De quel œil voyez-vous cette initiative ?Cela soulève plusieurs problèmes. D’abord, chaque pays risque de perdre sa souveraineté numérique en acceptant de transférer toutes les données en Irlande. Je ne suis pas sûr que cela soit mieux sécurisé. Enfin, ça ne garantit pas qu’il n’y ait pas de fuites des données.