le débat s'enflamme autour du livre de Jean-Baptiste Fressoz


Publié le 26 janvier 2024

Rarement un livre d’histoire, de l’énergie qui plus est, n’aura eu tant d’écho médiatique. Dans son dernier essai, Jean-Baptise Fressoz s’emploie à démontrer que la transition énergétique, prônée depuis les années 1970, n’a pas eu lieu et ne se produira pas dans les temps pour répondre à l’urgence climatique. Au lieu de se substituer les unes aux autres au fil du temps, les énergies se sont empilées portées par une consommation toujours plus importante. Ce à quoi ses défenseurs répondent que tout peut arriver et que le « défaitisme » ne mène à rien.

le débat s'enflamme autour du livre de Jean-Baptiste Fressoz

« La transition énergétique n’aura pas lieu ». Le bandeau du nouvel essai* de l’historien des sciences, des techniques et de l’environnement français, Jean-Baptiste Fressoz, a de quoi susciter a minima la curiosité, voire l’indignation pour ceux qui défendent et travaillent à la mise en œuvre de cette transition énergétique indispensable à l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris.

à savoir l’objectif de l’accord de Paris, non la transition n’aura effectivement pas lieu. Cela n’est absolument pas surprenant. Il suffit de regarder les prévisions de l’AIE (Agence internationale de l’énergie, ndr) et de l’IEA (Département de l’énergie américain, ndr). Cela veut dire qu’il faut se secouer, installer des renouvelables certes mais aussi parler de décroissance pour tout ce qu’on ne saura pas décarboner », nous explique le principal intéressé, rencontré dans son appartement parisien.

Pas de transition « linéaire »

Le propos de son livre, « un livre d’histoire », tient-il à préciser, est d’apporter un éclairage différent sur l’histoire de l’énergie, « la première histoire de la transition énergétique ». De fait, la transition énergétique contemporaine n’occupe qu’une faible place sur les 400 pages consacrées à démontrer comment les énergies dites du passé (bois, charbon, pétrole, gaz) se sont empilées les unes sur les autres, contrairement à ce que prône le discours dominant qui propose une histoire linéaire et « phasiste » de la transition selon laquelle une énergie remplacerait l’autre.

Je ne dis pas qu’il ne se passe rien mais on assiste tout au plus à une baisse de l’intensité carbone de l’économie liée à l’électrification depuis les années 1990″, poursuit-il.

« Il y a des transitions partielles »

avec force, qu’il est possible de réussir cette transition », écrivent-ils.

elle aurait dû se faire plus vite, mais elle est en marche. Il faut aussi prendre en compte que par le passé, nous avons assisté à une croissance économique et démographique considérable, mais cela aussi change. Nous sommes dans une transition démographique et le rythme de la croissance économique ralentit », explique-t-il.

Solaire en tête passant de 30% du total en 2023 à 37% en 2026.

« La décroissance est sous-équipée »

du transport maritime, de la production d’acier, de ciment, d’engrais, de plastique ?, interroge Jean-Baptiste Fressoz. Se focaliser sur la transition énergétique permet de continuer comme avant sans se poser les questions qui fâchent, réfléchir aux choses qu’il faudra abandonner, ce qui émet du CO2 sans augmenter le bien-être par exemple. En ce sens, la décroissance est complètement sous-équipée intellectuellement », déplore-t-il.

ont également élaboré des scénarios « sobriété » incluant une réduction de nos consommations, de nos déplacements ou encore l’adoption d’un régime alimentaire moins carné. Mais le grand débat sur la société bas-carbone que l’on souhaite pour demain n’a pas encore été programmé. En attendant, à qui des optimistes ou des « combattifs » comme se décrit Jean-Baptiste Fressoz prêter l’oreille ? 

Concepcion Alvarez

* « Sans transition, une nouvelle histoire de l’énergie », Jean-Baptiste Fressoz, éditions Ecocène Seuil, 406 pages, janvier 2024.