un meurtre gratuit jugé aux assises du Gard


Elle s’appelait Claire Reynier, elle avait 39 ans et elle a été tuée pour rien. Littéralement. Son meurtre, gratuit, hallucinant, sera jugé à partir de lundi à Nîmes, devant la cour d’assises du Gard.L’accusé qui se présentera dans le box est un jeune homme d’à peine 26 ans. Mathieu Danel n’a jamais nié être l’auteur de ce crime. Il est même venu se dénoncer à la police avant que le corps de la victime ne soit retrouvée. Le 21 juin 2018, il s’est présenté au commissariat de Montélimar pour dire qu’il avait tué une femme deux jours plus tôt. Il ne la connaissait pas. Mais il avait envie de tuer, pour savoir ce que cela faisait. Et c’est tombé sur elle.Selon les incroyables déclarations qu’ils a faites en garde à vue puis à l’instruction, Mathieu Danel était dans sa voiture quand il pris Claire Reynier en stop à Montélimar. Elle voulait aller à Sommières, petite commune située entre Nîmes et Montpellier. Il l’a menée jusque là et le courant est visiblement bien passé entre eux puisqu’ils se sont promenés ensemble dans les rues de la ville, avant de dîner dans une pizzeria et de poursuivre la soirée dans un champ, discutant jusque vers minuit.Il ont passé cinq heures ensemble et selon son récit, il lui aurait proposé une relation sexuelle, mais elle aurait refusé.En repartant, Mathieu Danel est retourné vers sa voiture, où il gardait une dague dans l’attente de concrétiser ses envies de meurtre. Il s’en est emparée, s’est approché de Claire Reynier, et l’a frappée au cou, à la tête et au thorax. Le médecin légiste dénombrera 17 plaies.

« Je n’ai pas eu ce que je pensais obtenir. En fait, ça ne m’a pas fait plaisir, j’ai trouvé ça très neutre. Alors cela ne valait pas le coup de recommencer. Mais comme c’était fait et qu’elle allait être découverte, j’ai préféré prendre les devants. »Mathieu Danel, lors de sa garde à vue

un meurtre gratuit jugé aux assises du Gard

Elle ou quelqu’un d’autre, «c’était pareil »

«Il n’exprime aucun sentiment de regret, de remords ou de peine », note l’enquêteur.« Il n’a pas tué pour rien. Il avait une raison : savoir ce que ça fait.»Me Anthony Chabert, avocat de la famille de la victime«C’est plus compliqué que cela, estime Me Jérôme Arnal. C’est un garçon qui était en échec scolaire, sentimental et professionnel. Cela a pu jouer aussi. » L’avocat de la défense voit dans le procès la possibilité de faire la lumière sur les ressorts d’un crime qui est selon lui moins simple qu’en apparence.« Je pense qu’il va assumer jusqu’au bout », pronostique pour sa part Me Anthony Chabert. Le conseil des parents et de la soeur de Claire Reynier explique que ses clients « ne savent pas comment ils vont réagir devant une telle froideur ». « Que ce soit arrivé à cette victime, qui avait une maladie psychiatrique, rend tout cela encore plus douloureux », précise-t-il.Les parents de la victime n’ont « pas de haine » et ils « n’attendent rien » de ce procès, ajoute l’avocat montpelliérain, qui rejette le terme de crime gratuit: « Il n’a pas tué pour rien. Il avait une raison : savoir ce que ça fait.»

«Absence d’empathie »

Plusieurs experts psychiatriques se sont penchés sur le cas de Mathieu Danel durant l’instruction.Le premier a conclu à un «trouble psychique ayant altéré légèrement son discernement ». Aucune pathologie mentale ou psychiatrique, aucun trouble dépressif ou bipolaire : «sa dangerosité n’est pas psychiatrique mais criminologique », écrit l’expert.Le second ne détecte «aucun trouble ». La dynamique de Mathieu Danel  «est celle que l’on retrouve chez les serials killers », décrit le Dr Coutanceau. Le meurtre de Claire Reynier est à ses yeux «une marque de singularité constituant une réalisation, voire une oeuvre. Pour lui, oser cet acte est plus important que le destin qu’il a infligé à la victime et à sa famille, avec une absence d’empathie. »Le dernier collège d’experts conclut lui aussi à l’absence de trouble psychique. «Il existe une potentialité de récidive », estiment les deux psychiatres.Renvoyé devant les assises pour assassinat, Mathieu Danel encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Son avocat espère toutefois faire tomber la préméditation : «Qu’il ait réfléchi à la question de tuer, c’est une chose. Mais il n’a pas formé de plan précis pour que ce soit cette personne-là, à cet endroit puisque c’est la malheureuse victime elle-même qui l’a emmené là », avance Me Arnal.Le verdict est attendu mercredi.