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Un secteur d’excellence aux multiples défis. Fragilisé par la chute du trafic aérien en raison de la pandémie de Covid-19, la filière aéronautique, moteur du commerce extérieur tricolore, a traversé d’importantes difficultés ces derniers mois. Mais ces perturbations ne doivent pas lui faire perdre de vue ses impératifs en matière de lutte contre le réchauffement climatique pour répondre aux enjeux de demain, selon un rapport d’information publié ce mercredi par les députés Jean-Luc Lagleize (MoDem) et Sylvia Pinel (PRG) après sept mois de travaux. Au contraire, « la filière (aéronautique) doit accélérer les efforts de décarbonation qu’elle a engagée depuis longtemps. Au cours des trente dernières années, les progrès ont permis de diviser par deux les émissions de Co2 par passager », a commenté le rapporteur Jean-Luc Lagleize.
Incitation fiscale pour renouveler les flottes des compagnies
Mais le temps que les technologies nécessaires au développement d’avions électriques ou à hydrogène soient matures, le rapport avance plusieurs pistes pour décarboner la filière française et encourage de « la soutenir plutôt » que « d’agir par la contrainte (.) afin qu’elle puisse préserver son leadership mondial ». Jean-Luc Lagleize et Sylvia Pinel appellent notamment à renouveler les flottes des compagnies avec des appareils de dernières générations qui permettent déjà de réduire la consommation de carburants de 15 à 20%. Pour les y encourager, les deux élus suggèrent la mise en place d’une incitation fiscale « qui pourrait prendre la forme d’un mécanisme de suramortissement ». Ils encouragent de surcroît les pouvoirs publics à « inciter » les entreprises de l’industrie aéronautique au « recyclage des aéronefs, d’une part, et à l’utilisation de produits issus du démantèlement des avions par les entreprises de l’industrie d’autre part ».
Filière européenne de carburants durables
la France ne cible que 5%. Un seuil qui pourrait être rehaussé à 10%, selon les auteurs du rapport. Surtout, l’utilisation des biocarburants passera par la création d’une filière de production européenne. Pour éviter d’être dépendants de la production américaine, « le soutien politique aux carburants durables doit être renforcé », a martelé Sylvia Pinel, prenant l’exemple des Etats-Unis qui ont mis en place des « mécanismes d’incitations », via un crédit d’impôt notamment, quand l’UE prévoit plutôt de taxer le kérosène. La présidence française de l’Union européenne devrait ainsi être l’occasion de « soutenir la création d’une alliance industrielle européenne pour les SAF ».
« Vision globale »
A moyen et long terme, les avions à hydrogène et avions électriques contribueront à la décarbonation de l’aérien. Mais là -encore, les députés préconisent d’aider le secteur en soutenant par exemple « le déploiement de hubs à hydrogène sur les plus grands aéroports » et en instaurant « au plus vite les soutiens à la production d’hydrogène décarboné ». Le plan d’investissement France 2030 devra aussi contribuer au soutien des travaux de R&D pour développer ces technologies. Enfin, Jean-Luc Lagleize estime que la suppression de certaines lignes intérieures « n’est pas obligatoirement une bonne solution pour l’industrie française » puisqu’elle n’incitera pas à accélérer les projets d’avions électriques. En effet, ces appareils peuvent « constituer une véritable opportunité pour les vols court courrier ». Mais qu’il s’agisse de carburants durables, d’hydrogène ou d’électrique, « il faut avoir une vision globale ». A défaut, les efforts français qui ne seraient « pas partagés ailleurs seraient vains », a expliqué Sylvia Pinel. De son côté, Jean-Luc Lagleize a appelé à « faire en sorte que les règles que nos édictons » pour verdir l’aérien « soient des règles internationales et non des règles franco-françaises qui vont uniquement handicaper l’industrie française ».
« Sensibiliser aux métiers de l’aéronautique »
Plutôt que de pénaliser le secteur aéronautique après deux ans de pandémie, le rapport conseille d’inclure les TPE de la filière dans les entreprises éligibles au rallongement de la durée d’amortissement du PGE de 6 à 10 ans. Il affirme par ailleurs que le secteur doit être structurer et consolider afin de mieux le protéger de « la prédation étrangère ». L’aérien n’est pas non plus épargné par les difficultés de recrutement. C’est pourquoi, les députés jugent utile de « sensibiliser aux métiers de l’aéronautique dès le plus jeune âge » en incitant les chefs d’entreprises à « aller dans les écoles ». Mais aussi de « communiquer davantage » sur les efforts faits par le secteur pour réduire ses émissions de CO2. Et ce afin de séduire davantage d’étudiants, toujours plus sensibles à la question environnementale : « Les étudiants souhaitent trouver un sens dans leurs études, c’est de plus en plus prégnant depuis un certain nombre d’années. On peut aussi trouver du sens dans l’aéronautique quand on comprend que ses technologies seront de plus en plus vertueuses », a souligné Jean-Luc Lagleize.