Vous avez entendu parler des apprentissages conçus comme des petites bouchées rapides à avaler ? Des audios, des vidéos ou des capsules interactives qui se nichent dans le moindre temps mort (attentes un peu longue à une caisse, intermède entre deux rendez-vous, réunion qui débute en retard etc.) entre 20 secondes et 5 minutes maximum ? Pour mieux se rapprocher de la restauration rapide les expressions anglo-saxonnes de « Nugget learning » ou « Fast Learning » sont utilisées. Quand on connait les risques sur la santé de ce type d’alimentation, la métaphore a de quoi inquiéter.
Pour capter l’attention et arrêter l’ennui, il s’agit de faire retenir rapidement des informations indispensables ou nouvelles pour exécuter les missions qui sont confiées aux collaborateurs. Ces types d’apprentissages visant l’adaptation au poste de travail n’ouvrent guère aux horizons larges de la vie en car ils se concentrent sur un scope réduit et sur l’efficacité immédiate. Pire encore, ils contribuent à la machinisation de l’humain consommateur effréné de données.
Ce malheureux humain est encore poussé compulsivement à chercher l’information manquante au détour de la moindre phrase au mot au personnage ou à la date inconnu sur son téléphone intelligent. Signe que la puce cérébrale connectant notre cerveau aux bases de données et aux réseaux sera vite adoptée. Le projet Neuralink a donc de beaux jours devant lui.
L’enjeu n’est rien de moins que la réussite du premier implant neuronal qui permettra de contrôler un ordinateur ou un appareil mobile. « Le principe en est le câblage de fil de l’épaisseur du micron qui seront insérés dans des zones du cerveau qui contrôlent le mouvement. Chaque fil contient de nombreuses électrodes et les relie à un implant, le Link ».
(Neuralink)Que rêver de plus qu’un accès aux informations de toute l’humanité à la vitesse de la pensée, et du contrôle d’un ordinateur sans interface manuelle ? Comment l’humain avide de performance va-t-il résister à cette promesse d’omniscience qui était l’apanage des dieux ?Pourtant en 2009, déjà Alexandre Roberge se demandait « De petites bouchées font elles un repas ? » Comme le grignotage intempestif ne risque-t-on pas l’infobésité ? La mal connaissance ?L’accélération reste un des phénomènes de notre société. Hartmut Rosa distingue trois types d’accélérations : celle du vécu individuel, l’accélération technique et celle du changement social. Pour lui ce changement serait la cause d’une incapacitation en augmentation des compétences, expériences et attentes et, par conséquent, de l’incapacité grandissante de prévoir l’avenir ou bien même de s’y projeter.
Se ralentir pour partir de soi et du milieu
En matière d’apprentissage, la lenteur est souvent associée à un problème. Les programmes d’études sont calibrés pour des durées données. Au-delà du temps imparti nos capacités cognitives sont mises en doute.
Les tests que j’ai passés en amont de mon service militaire étaient basés sur la célérité mais pas sur mon sentiment patriotique ou mon envie d’engagement. De quoi étaient-ils prédictifs ? Pourtant nous savons que la connaissance s’édifie par plusieurs chemins et que le temps est une variable dont l’intensité change selon les périodes de la vie. À l’égal d’une graine, parfois la progression est fulgurante, parfois au contraire les apprentissages prennent le temps de se poser en soi.
Les apprentissages informels lents, massifs, continueraient-ils à être négligés ? Et si l’apprentissage lent était un apprentissage en conscience qui nous amènerait dans le même temps à comprendre les implications de ce que nous apprenons sur le milieu ainsi que l’orientation de notre désir d’apprendre. De la même façon que nous pratiquons la méditation en pleine conscience, nous pouvons pratiquer l’apprentissage de pleine conscience. Observer spécifiquement ce que produisent les apprentissages en cours sur nos désirs, nos croyances, nos envies, nos potentialités apporterait un surplus d’ancrage.
Si apprendre et vivre sont synonyme, s’observer en train d’apprendre, c’est s’observer en train de se vivre.Un apprentissage en conscience consisterait à mieux accueillir ce que produit une expérience sur ses orientations en train de naître. À lier les connaissances en cours d’émergence avec ses buts de vie; à se sentir plus vivant.
Quelles seraient les conditions d’un apprentissage en conscience ?
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les repères subtils qui donnent de la valeur à une expérience;
Savourer leur silence, écouter leur rebond;
Les bénéfices d’un apprentissage lent, intégré et profond
À l’école, lorsque j’étais jeune, je demandais mais pourquoi dois-je apprendre tout cela ? Il m’était répondu «passes ton diplôme d’abord, tu comprendras plus tard à quoi tout cela te servira». Et si apprendre en conscience c’était un surplus de sens et de désir à cultiver au moment où l’on apprend, plutôt qu’une thésaurisation de savoirs à dépenser plus tard? Du reste cette vision d’un capital de savoir est elle toujours absolue quand la masse de savoirs évolue si rapidement ? Le tu « comprendras plus tard » n’est il pas devenu une fausse promesse ?Les apprentissages lents consistent à enlever un élément du paradigme pédagogique habituel qui existe dans l’idée d’un cadre temporel contraint ou borné pour un apprentissage. Les apprentissages lents se perdent peu en agitation, méthode créative, jeux de mise en train ou de création d’énergie et de groupe.
Ces pratiques touchent souvent la surface des questions et effleurent à peine la profondeur du monde. Ils flattent nos cerveaux et nos besoins de le satisfaire par la décharge de dopamine de cette sensation de vitesse. Nous sommes électrifiés et tout excités.
Mais cela ne dure pas. L’effet retombe. L’adrénaline et toutes les hormones cérébrales activées se dissipent.
Nous avons peut être ancrées des notions ou des questions à l’occasion du jeu de l’exercice de la pratique ludique mais notre contexte lui a-t-il vraiment changé ? « L’apprentissage lent » implique au contraire d’explorer le monde à son rythme, en y prenant du plaisir; en se posant des questions et en comprenant les expériences que l’on rencontre et celles que l’on crée. Mettons un peu la technologie et la pression de faire juste tout de suite de côté pour goûter à la précision et à la joie du lien avec notre milieu.Sources Apprendre en liberté https://apprendreenliberte.
wordpress.com/2012/05/18/apprentissage-slow/ Cornak Le Nugget Learning qu’est-ce que c’est ? https://www.cornak.
com/le-nugget-learning-mais-quest-ce-que-cest/ Hartmut Rosa : Philosophie magazine Https://www.philomag.com/philosophes/hartmut-rosa Fast Learner Https://fastlearner.
fr/fast-learning/ Thot cursus – De petites bouchées font elles un repas – Alexandre Roberge Https://cursus.edu/fr/7772/de-petites-bouchees-dapprentissage-ne-font-pas-un-vrai-repas Europe 1 Qu’est que l’accélérationisme la mouvance des militants d’ultra droite https://www.europe1.
fr/societe/quest-ce-que-laccelerationnisme-la-mouvance-des-militants-dultradroite-arretes-mardi-4077682 Wendy Priesnitz « Slow Learning » Publié dans « Natural Life Magazine, September/October 2011 »Wikipédia accélérationisme https://fr.wikipedia.org/wiki/Accélérationnisme Neuralink https://neuralink.
com Thot cursus – Denis Cristol – Ralentir pour apprendre. https://cursus.edu/fr/13212/ralentir-pour-apprendre Nos pensées.
L’apprentissage lent variété d’apprentissage https://nospensees.fr/lapprentissage-lent-variete-dapprentissage-anomalie/
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