Dans son édito de ce mercredi 26 janvier, Eugénie Bastié, journaliste au Figaro, évoque la «campagne» du président de la République Emmanuel Macron, qui ne s’est toujours pas déclaré candidat à sa possible réélection.
Il a «encore beaucoup de choses à faire» a-t-il répondu alors qu’un journaliste lui posait pour la millième fois la question de sa candidature lors d’un déplacement dans la Creuse. Nous sommes à 70 jours de la présidentielle, et il peut se déclarer à tout moment. «Vous ne connaissez ni le jour ni l’heure» dit comme le Christ celui qui au début de son quinquennat voulait à tout prix rester le «maitre des horloges».
Les opposants ont beau jeu de râler sur le temps de parole et l’argent de la campagne, les précédents de président sortants plaident pour lui : de Gaulle en 1965 s’était déclaré un mois avant le premier tour , Giscard d’Estaing en 1974 55 jours avant, Mitterrand, 1988 32 jours avant le premier tour (un record), Jacques Chirac en 2002 69 jours avant et Nicolas Sarkozy 67.
L’ennui est que l’art de l’esquive ne porte pas que sur la date de la candidature, mais aussi sur le fond des sujets. La crise du Covid lui a permis de gagner du temps, d’écraser tous les autres débats en installant le faux clivage entre vaccinés et non vaccinés dont il sait qu’il tirera profit. La présidence du Conseil de l’UE est une autre occasion pour lui d’éviter les sujets nationaux. Emmanuel Macron prend soin de ne pas entrer dans la danse, tout en répondant de loin en loin aux candidats de la droite, comme sur la question de la sécurité ou de l’héritage. D’un point de vue stratégique, cela se conçoit, d’un point de vue démocratique, c’est problématique.
Pas de débats télévisés, une bonne stratégie ?
Conséquences de la progression des chaines d’info continue, les débats entre candidats avant le premier tour de la présidentielle n’existent que depuis la présidentielle 2017, où François Hollande n’était pas candidat… l’exercice serait donc inédit pour un président sortant, et Emmanuel Macron n’a pas envie de s’y risquer.
Il n’est pas à l’aise dans les débats à plusieurs : en 2017 il avait même saisi le CSA pour faire annuler le troisième débat d’avant premier tour programmé par France 2, qui avait été supprimé «Nous (les candidats) avons autre chose à faire que de courir de chaîne en chaîne pour multiplier les débats à onze», avait-il déclaré. Aujourd’hui, ce refus du débat est présenté comme une volonté d’ apparaitre au-dessus de la mêlée, mais c’est surtout en réalité la peur d’affronter des candidats comme Valérie Pécresse ou Eric Zemmour dont il sait que la compétence et l’art oratoire rendront plus difficile à battre que Marine Le Pen.
Il sera la cible de toutes les critiques. S’y dérober ne le ferait pas apparaitre comme un président vertical mais fuyant. A l’heure où l’abstention promet d’être le véritable fléau de la présidentielle, il serait du devoir d’Emmanuel Macron d’entrer dans la campagne le plus vite possible et de participer à la grande conversation nationale sur le destin de la France qu’est la présidentielle.