ainsi que du souhait exprimé par une députée (qui avait contribué à écrire un rapport sur la question remis en octobre), Élodie Jacquier-Laforge, de voir s’appliquer le scrutin de liste à l’ensemble des communes françaises et non plus seulement à celle de 1 000 habitants et plus : « Sans exprimer une décision claire, Jean Castex n’a, en tout cas, pas donné l’impression qu’il souhaitait aller directement dans ce sens. Alors que la maire qui l’a interpellé lui a expressément demandé de supprimer les seuils et de ne pas en instaurer de nouveau (à 300 habitants, par exemple), Jean Castex a répondu : « Ce n’est pas simple. Est-ce qu’il faut y aller tout d’un coup ? Ou est-ce qu’il faut y aller, puisque c’est ce qu’on a fait finalement jusqu’à présent, par étapes ? Est-ce qu’il faut faire une autre étape ? Moi, je le sens comme ça » ».
se cachent parfois d’autres objectifs bien moins louables ou avouables puis au second tour ceux qui atteignent le plus de suffrages exprimés en fonction des places restant à pourvoir (on peut même ne se présenter qu’au second tour).
Le mode de scrutin d’une élection a de multiples conséquences.
Celles du scrutin « avec listes bloquées » vont être détaillées ci-dessous, étant entendu que toutes les analyses qui suivent ne s’appliquent pas à la lettre à chacune des 9 951 communes qui sont concernées aujourd’hui ni aux 25 014 autres qui demain pourraient l’appliquer. Mais ces grandes tendances sont potentiellement présentes partout où ce scrutin définit l’accès au pouvoir du personnel politique local.
personnes de confiance, aussi bien sur le plan personnel que politique (qu’il s’agisse de politique partisane ou non).
Quand il s’agit du maire sortant, il s’agit surtout de retravailler l’existant, d’en rétrograder certains, d’en promouvoir d’autres, de renouveler, d’écarter. Quand il s’agit d’un opposant (qui monte une liste « contre » le maire sortant), il s’agira de trouver des membres « utiles » pour permettre à la liste de gagner, et plus particulièrement à sa tête de liste de devenir maire. Les stratégies peuvent être diverses, comme une sélection sur les compétences (d’autant plus prégnante que l’on se rapproche de la tête de liste, c’est-à-dire des futurs potentiels adjoints), sur le sexe (pour respecter la loi sur la parité), sur l’âge, la profession, le lieu d’habitation – les différents quartiers –, l’association, l’institution ou le parti représentés, plus rarement l’origine ethnique (pour pouvoir argumenter sur la diversité de la liste et sa « représentativité » selon les critères jugés les plus importants par la tête de liste et ses plus proches collaborateurs), etc.
Mais tout cela se fait au bénéfice de la tête de liste, parce que c’est lui qui aura le pouvoir suprême au niveau local en cas de victoire. Chacun des membres de la liste doit faire acte d’allégeance à cette tête de liste en échange du droit d’y figurer et d’en tirer quelques profits potentiels. De savants calculs sont effectués pour définir des seuils : le seuil à partir duquel, en cas de victoire, on peut être élu, on peut devenir adjoint (le nombre d’adjoints potentiels varie en fonction du nombre d’habitants et de quelques autres facteurs) ou devenir conseiller communautaire, ou, en cas de défaite, où on est élu quand même, etc.
dans certains cas, de celle du leader charismatique national, dans l’espoir d’agréger localement le bénéfice de la reconnaissance du leader et de ce qu’il représente) –, et certaines des stratégies de constitution des listes (du moins celles qui ont présidé à la campagne de communication) se voient dans les tracts électoraux à travers les critères retenus pour qualifier chaque candidat et qui suivent ses noms et prénoms : âge, profession, quartier représenté, association, etc. Quand la diversité – par exemple professionnelle – n’est visiblement pas assurée, ce sont a contrario des stratégies de masquage qui sont adoptées, en mettant en avant d’autres critères plus honorables de ce point de vue.
et l’une des premières délibérations est la délégation des pouvoirs au maire et le reste des sièges est attribué à la proportionnelle parce que cela reviendrait à mettre en difficulté leur propre leadersont vouées à ne faire que décorer le tableau non seulement là aussi la critique des membres de la majorité est très malvenue, mais les élus s’aperçoivent très vite que les projets les plus importants sont tous élaborés et presque déjà finalisés « par un quarteron de décideurs composé du chef de l’exécutif généralement accompagné de son directeur de cabinet, de l’un ou l’autre de ses adjoints et du chef de l’administration territoriale , lui aussi en quelque sorte « aux ordres » parce que pèse sur lui en permanence la possibilité d’un remplacement en cas de désaccord récurrent » (Koebel, 2017).
Le scrutin avec listes bloquées, en concentrant le pouvoir sur la tête de liste, sur celui – et beaucoup plus rarement celle – qui deviendra maire en cas de victoire, en conférant à la liste majoritaire, dont tous les membres ont fait allégeance à leur leader, une majorité écrasante, et aux listes minoritaires une minorité affligeante, annihile le débat démocratique et parvient même à le bloquer.
Et tout cela avec le prétexte de la parité…Ce qui est visé à plus long terme avec cette concentration du pouvoir sur les maires – qui font aujourd’hui tous partie (à 4 exceptions près) d’un regroupement intercommunal –, c’est la suppression de l’échelon communal au profit de l’intercommunalité. Une grande partie du travail est déjà réalisé. Le reste est en marche.
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