Pendant notre entretien, j’observe qu’un livre dépasse de son sac à dos. C’est le best seller de la rentrée littéraire : Cher Connard de Virginie Despentes. “ Je n’avais lu d’elle que King Kong Theory. C’est assez marrant car je pense avoir fait le chemin inverse en commençant par lire Constance Debré. C’est seulement plus tard que j’ai appris qu’elles étaient proches avec Despentes. ” L’occasion pour Panayotis de se confier sur ses souvenirs littéraires. “ Jusqu’alors, l’école nous présentait les œuvres littéraires comme l’éloge de la beauté – je trouvais ça ennuyeux – quand tout à coup, une prof assez cool, Madame Delbos, nous a fait découvrir Les Fleurs du mal de Baudelaire et notamment mon poème préféré : Une charogne. Je me suis dit : ‘ Tiens, on peut parler de choses dégueu ’. Dans Une charogne, il est question de putréfaction, d’une bête immonde sur le bord de la route qui pue. Cette prof nous a appris qu’avec l’art, le laid pouvait devenir beau. Ça a été un choc, une révélation. ”
Un air de famille
C’est loin du Futuroscope et des tourteaux fromagers (spécialité culinaire du Poitou) que Panayotis Pascot a grandi. Tout a commencé pour lui à Bondoufle, dans l’Essonne, entouré de ses deux sœurs et ses trois frères. Il est le dernier de la fratrie. “ C’est une chance parce que tu profites de l’expérience de tout le monde. Je me suis nourri des erreurs qu’ils ont pu commettre et des choses qu’ils n’ont pas osé faire. Ça te pousse à te dépasser. Il y a, en plus de ça, une véritable entraide. ” La famille est une chose à laquelle le jeune homme est manifestement très attaché. “ Il y a deux mots qui me viennent à l’esprit quand je pense à la famille : obligation et refuge. C’est une contrainte, une donnée avec laquelle tu dois composer : une histoire, un héritage, des traumatismes, des secrets, des non-dits, et ils seront là jusqu’au bout, c’est une partie de toi. Mais c’est aussi un refuge, une zone de confort, un endroit où on ne te juge pas et qui te permet de rester en prise avec le réel. Je reste le frère, le fils de ma mère et de mon père. ”Et pour cause, puisque dans son spectacle, un des personnages récurrents est celui de son père Philippe. Il ne manque pas d’épingler la perception traditionnelle qu’il a de la virilité. “ Je pense que c’est plus un héritage qu’une conception personnelle. Pour lui, un homme se devait de contrôler la situation, de ne pas se laisser porter ou surprendre. Son objectif était de nous offrir la sécurité et la protection maximales. Il faut dire qu’il a grandi à une époque où un homme ne pouvait pas évoluer s’il n’était pas dur, costaud, énigmatique. Mais il a très vite compris qu’on ne fonctionnait pas comme lui. ” Panayotis se rappelle alors d’un souvenir qui l’a marqué. “ Il s’est même lancé une fois dans une séance de chatouilles pendant laquelle je devais me contrôler et ne pas rigoler. ” Or il se trouve que le rire s’invitait souvent dans la famille de Panayotis : ses parents lui avaient fait découvrir, enfant, les sketchs emblématiques de Raymond Devos, Muriel Robin, Pierre Repp, Pierre Desproges.