Les trois moments de la semaine par Dominique Seux


Mais comment Jean-Luc Mélenchon a marabouté les médias et la gauche à partir souvent de n’importe quoi ? Pourquoi le remaniement, qui se veut plus écologique, ne s’arrêtera pas à Matignon ? Et si malgré la guerre qui a éclaté sur le continent, l’Europe avait une carte à jouer en ce moment ? Notre chroniqueur répond à ces questions d’actualité en trois mots.

Mensonges

Chapeau l’artiste  ! Un Français revenu en début de semaine de Patagonie extérieure vierge de toute information aurait facilement pu croire que Jean-Luc Mélenchon a gagné la présidentielle tant le leader Insoumis a occupé l’espace médiatique et politique. Plus fort encore, la façon dont il a avalé les socialistes (qui ne présenteront de candidat que dans 70 circonscriptions…) et les écologistes mérite les plus grands compliments.

Les trois moments de la semaine par Dominique Seux

Mais bon, quitte à jeter un seau d’eau froide sur les chimères d’une partie des électeurs, il faut bien appeler un chat un chat  : Jean-Luc Mélenchon dit n’importe quoi sur trop de sujets pour être un instant crédible. Il s’est magistralement trompé sur les deux grands sujets d’actualité, la Russie et les vaccins, il promet le retour de la retraite à 60 ans et il jurait encore jusqu’à l’automne que la sortie du nucléaire en 2030 était faisable. Quant à sa désobéissance européenne, c’est François Hollande qui en parle le mieux  : « Cela ne marche pas, c’est comme si vous jouez au football et à la fin, vous annoncez qu’on peut jouer avec les mains » parce que les règles habituelles ne vous plaisent pas.

Le vrai talent de l’ex-sénateur PS est d’avoir senti les aspirations des jeunes à la radicalité écologiste. C’est cette aspiration à laquelle les partis de gouvernement doivent répondre.

Remaniements

Dans la nouvelle équipe Macron, le Premier ministre ne sera pas le seul à être chargé de la « planification écologique » , avec deux ministres ad hoc, l’un qui reprendrait les attributions du ministre jusqu’alors en charge (avec une dimension territoriale) et l’autre la planification énergétique.

Il est vraisemblable que l’Elysée aussi s’équipera sur l’écologie, si on peut utiliser cette formule. Des proches du Palais estiment qu’Alexis Kohler, le secrétaire général très proche d’Emmanuel Macron, devrait être entouré d’un ou plusieurs secrétaires généraux adjoints, dont l’un veillerait précisément à cette dimension. Il est de notoriété publique que « AK » a une approche surtout innovation et business du sujet, ce qui est indispensable (la décarbonation de l’industrie et des transports ne va tomber du ciel) mais ne suffit plus forcément quand le président s’est engagé à aller deux fois plus vite que jusqu’à maintenant pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

L’alignement des planètes est d’ordinaire une expression positive. Mais elle peut décrire aussi une conjonction de phénomènes qui le sont moins. Qu’avons-nous sous les yeux actuellement ? Une Chine doublement paralysée par son étrange gestion du Covid 19 et une crise immobilière qui n’en finit pas.

Des Etats-Unis frappés par une inflation record. Une Europe qui connaît la guerre à ses portes – à 1.200 km de Strasbourg pour être précis.

Rien de bien réjouissant. Pourtant, comme l’éléphant au milieu du couloir, ces événements cachent des défis bien plus importants pour chacun de ces trois ensembles  : c’est le recul démographique qui menace vraiment Pékin à court terme (en 2021, il y a eu 10 millions de naissances au lieu des 20 millions attendus). Outre-Atlantique, la fracture politique et sociale s’avère infiniment plus profonde que l’alternance Trump-Biden pouvait le faire croire ; notre Vieux continent a longtemps souffert d’une panne d’énergie vitale (innovation, défense de ses intérêts) qui l’a transformé en simple zone de chalandise aux yeux du monde entier.

Eh bien, c’est cela qui est en train de changer sous nos yeux et si on se permet une seconde d’optimisme raisonné, c’est une bonne nouvelle.