cette mauvaise expérience qui l'a dégoûté des plateaux de télévision


co-auteure de l’ouvrage, nous conte la face lumineuse de l’éternel râleur.

nous raconte un Bacri intime et lumineux.Télé-Loisirs : Comment vous est venue l’idée d’écrire ce livre sur Jean-Pierre Bacri ?Valérie Benaïm : D’abord, j’étais admirative du comédien et de son grand talent de scénariste. Et j’aimais l’homme, ses prises de position me séduisaient, m’interpellaient ou me réveillaient. À l’annonce de sa mort, j’ai été étonnée d’être aussi touchée par la disparition de quelqu’un que je ne connaissais finalement pas, même si j’avais eu le plaisir de le rencontrer. Je me suis rendu compte à quel point la France entière était malheureuse d’avoir perdu un homme qu’on avait trop vite catalogué comme acteur pour bobo de gauche. On a tous eu le sentiment de perdre quelqu’un de la famille. Quelques temps après, je discutais avec un ami éditeur et je lui disais qu’il faudrait vraiment écrire un livre sur Bacri. Il m’a répondu « Et pourquoi pas toi ? » L’idée a fait son chemin et j’ai contacté mon amie depuis mon passage chez LCI, Sandra Freeman, qui connaissait très bien Jean-Pierre et Agnès, personnellement et professionnellement.Télé-Loisirs : L’un des mérites du livre est de décoller l’étiquette du Bacri qui fait la gueule.V.B. : Oui, contrairement à ce qui a souvent été écrit, Bacri ce n’est pas le Français qui râle pour n’importe quelle raison. Quand il s’emportait, ce n’était pas pour rien. Et c’était un type solaire, qui aimait rire, qui faisait tout le temps des blagues. Son expression favorite c’était « Ma gueule fait la gueule » mais c’était un vrai trublion. Dès ses débuts au théâtre, chez Jean-Michel Ribes, il est très fantasque, il ne s’interdit rien.

cette mauvaise expérience qui l'a dégoûté des plateaux de télévision

Jean-Pierre Bacri : la révolution Agnès Jaoui a tout emporté

Télé-Loisirs : Vous nous faites aussi miroiter le Bacri flambeur et séducteur de sa jeunesse.V.B. : Dans le livre, Nathalie Rheims témoigne que toutes les filles du Cours Simon, quand il est monté de Cannes à Paris, étaient folles du lui. Il était beau, grand, athlétique, à la peau mate. Tout le monde, garçons comme filles, avait envie de faire partie de sa bande.Télé-Loisirs : En 1987, son univers est révolutionné par l’arrivée d’Agnès Jaoui dans sa vie.V.B. : Pour l’un comme pour l’autre, ça a été une évidence. Ils se sont rencontrés sur une pièce de théâtre de Pinter, mis en scène par Ribes, et le coup de coeur fut immédiat. C’est une rencontre amoureuse mais aussi intellectuelle. Il n’aura de cesse de dire qu’Agnès était le grand amour de sa vie et son âme soeur, même quand ils se sépareront. Pour autant, ils ne se diluent pas, ce n’est pas un couple fusionnel. D’ailleurs, ils détestaient le surnom Jabac car ça les réduisait. Ils sont trop libres pour se réduire l’un à l’autre.Télé-Loisirs : Avez-vous essayé de la contacter pour qu’elle témoigne dans le livre ?V.B. : Elle était, bien sûr, au courant de notre projet. On l’a immédiatement contacté mais je pense que c’était trop compliqué pour elle d’en parler, c’était trop récent et trop douloureux. Nous avons pu discuter avec certains des amis les plus proches de Jean-Pierre, grâce à la bénédiction d’Agnès.

Jean-Pierre Bacri et la télévision, un rapport complexe

Télé-Loisirs : Dans le livre, vous faites aussi mention de la dernière compagne de Jean-Pierre Bacri, prénommée Alexandra.V.B. : Jean-Pierre était quelqu’un de pudique, il ne s’est donc jamais épanché sur cette relation. Cette femme a été importante dans sa vie. Elles se connaissent, d’ailleurs, avec Agnès Jaoui. Alexandra étant quelqu’un qu’on nous a décrite comme très douce, elle a sans doute contribué à adoucir Jean-Pierre sur certains traits de son caractère. C’est une femme qui avait des enfants d’une précédente union donc ce fut aussi important pour le rapport de Bacri à la paternité, à la famille.Télé-Loisirs : Dans plusieurs de ses oeuvres (Cuisine et dépendances, Place publique), le milieu de la télévision est montré de façon acerbe. Quel était son rapport avec la télé ?V.B. : Il aimait regarder la télévision, surtout le sport et les documentaires. Il aimait aussi être sur les plateaux mais ne voulait pas devenir un animal de cirque. Il a été très heurté par une anecdote qui lui est arrivé lors de l’enregistrement d’une émission télé. Suite à un problème technique, le producteur de l’émission va voir l’animateur et, sans montrer de considération pour Jean-Pierre, lâche « On la refait, tu reposes ta question et il refera son truc », sous-entendu son cinéma. Il ne supportait qu’on puisse imaginer que ses emportements étaient feints. À partir de là, il a décidé de s’éloigner de la télé et de n’y aller que lorsqu’il se sentait en confiance. Il disait souvent : « Je ne suis pas un animateur télé, je ne suis pas payé pour sourire. Quand vous l’aurez, vous saurez que c’est un vrai sourire. » C’était tout Jean-Pierre : la haine du mépris et des faux semblants, le goût de la vérité et de la liberté.Jean-Pierre Bacri, le bougon gentilhomme, de Valérie Benaïm et Sandra Freeman, paru aux éditions L’Archipel (240 pages)