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« Ensuite, il a fallu encore déménager. Une dernière fois. Le troisième lieu était plus infâme grimace le prêtre, nous sommes restés 5 nuits dans ce petit lieu très très étroit où on avait du mal à s’allonger tous ensemble. On avait des courbatures, le sol n’était vraiment pas doux. » »Et puis, précise le prêtre, ils nous rationnaient de plus en plus la nourriture. Ils nous avaient prévenus, c’était un moyen de pression, mais avec nous il y avait deux personnes diabétiques. On a dit aux gardiens ‘Vous allez nous laisser mourir’, ils nous ont amené de la soupe et on a partagé avec eux. Ils étaient logés à la même enseigne que nous. On n’avait rien, mais eux non plus. »
La libération au milieu de la nuit
« Enfin, sourit-il largement, une nuit, on a été libérés. Ils sont arrivés vers minuit et demi, on était tout endormi. Ils nous ont réveillés en faisant pression sur nous pour que ça aille vite, nous sommes sortis sous cette pression et un des gardiens m’a glissé dans l’oreille, ‘vous êtes libérés !’ « Michel Briand a vécu ensuite un moment étrange : « Au moment de partir, un des chefs est venu nous faire une accolade et nous demander de prier pour eux. J’étais tout étonné, confie Michel Briand, je lui ai répondu qu’on n’allait pas commencer à prier pour eux maintenant, parce qu’on le faisait depuis le début. »
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Michel Briand, prêtre enlevé en Haiti au printemps 2021, raconte sa captivité
Une rançon d’un million de dollars
Les preneurs d’otage avaient réclamé 1 million de dollars pour la libération de Michel Briand et des autres personnes qu’ils détenaient. « Où irions-nous les prendre ? » interroge le prêtre. Il ne sait pas au juste ce qui s’est passé pour que la liberté leur soit rendue. « Au début, un gardien est venu et nous a dit : ‘avec ce qu’on a reçu, ça ne vaut même pas la peine d’acheter de l’eau’, témoigne Michel Briand, on ne sait pas ce qui s’est passé, nous, nous étions coupés du monde. » »Les ravisseurs voulaient nous garder, nous les deux français », précise-t-il. « La communauté a été claire : tout ou rien. Tout le monde doit être libéré, ou personne. Ils ont fait preuve d’une certaine intransigeance et ont fait croire qu’il n’y avait rien à espérer. Si ils veulent nous exterminer, qu’ils nous exterminent, si ils veulent nous libérer, qu’ils nous libèrent, par bonheur, ça a été la deuxième solution. »
Le missionnaire breton a été kidnappé le 11 avril, à Haïti, avec neuf autres personnes
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L’amour du missionnaire pour son île
Le Breton est arrivé à Haïti en 1986 juste après la chute de Duvalier fils. « Tout le monde espérait une démocratisation malheureusement au fil des ans. Ça a été le contraire, l’anarchie s’est installée dans le pays, la misère est devenue plus grande et plus visible. Au point que les Haïtiens qui restent encore dans leur pays ne rêvent que d’une chose, en partir ! »Michel Briand a d’abord passé quelques années dans des paroisses sur l’île, puis il œuvré dans un centre de développement, avant d’arriver à Port au Prince pour accompagner les jeunes qui voulaient entrer dans la communauté pour devenir eux aussi missionnaires. Cette année, la communauté a accueilli 11 jeunes qui vont être envoyés au Brésil, au Canada et en France.
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Retour sur la prise d’otage du prêtre Michel Briand, enlevé en Haïti
Le peuple d’Haïti est la première victime
En 36 ans sur l’île, Michel Briand a vécu le tremblement de terre, les coups d’état. Il connaît parfaitement la situation des Haïtiens. Et accorde son pardon à ceux qui l’ont kidnappé. « Il y a toujours eu des moments durs , analyse-t-il, mais ces moments durs ils sont pour le peuple. Ils subissent les fléaux des gens qui sèment la terreur, ils en sont les premières victimes. Tous ceux qui tombent sous les balles, ce sont des gens qui marchaient dans la rue et qui se retrouvent des cibles. » La semaine dernière, 15 passants ont été tués dans une ville.Depuis plusieurs années, des gangs sévissent en Haïti. Celui qui est soupçonné d’avoir kidnappé le petit groupe de Michel Briand est baptisé, « 400 Mawozo ». Son chef Joseph Wilson, alias Lanmò San Jou (la mort sans jour, en créole haïtien ) est recherché par la Police. « Le kidnapping est devenu un moyen de survivre pour des gens qui n’ont plus rien. Ils accusent le pouvoir parce que le pouvoir ne leur offre rien. Le peuple ne peut plus supporter. Ils ont la trouille au ventre. »
Michel Briand, prêtre enlevé en Haïti raconte son amour pour l’ile
Comme pour lui donner raison, ce 7 juillet, alors que Michel Briand se repose quelques jours en Bretagne, le chef d’état Haïti, Jovenel Moïse a été assassiné dans sa résidence en pleine nuit. « Plusieurs personnes m’ont demandé pourquoi je ne reste pas en France. J’ai envie de repartir, j’ai encore plein de choses à faire là-bas avec eux et pour eux. Quand on fait un choix, on doit l’assumer. L’amour fait des merveilles dans le cœur des hommes, il nous permet d’aller jusqu’au bout, comme le Christ est allé au bout pour nous sauver. C’est un don total que l’amour nous permet de faire, c’est grand, c’est beau. »Bientôt, le missionnaire regagnera donc « son » île pour continuer à vivre son histoire d’amour avec cette terre et ses habitants.