Quatre personnes sont aujourd’hui incarcérées à Bruxelles : le couple, un directeur d’ONG, Niccolo Figa-Talamanca, et surtout leur ami Pier-Antonio Panzeri, le cœur du dispositif. Ancien président de la sous-commission des droits de l’Homme du Parlement, cet Italien, membre du petit parti de centre gauche Articolo Uno, s’est reconverti après son échec électoral en 2019 dans le business d’influence « à visage humain ». Il a créé son ONG, Fight Impunity, pour exploiter un filon : vendre son carnet d’adresses, son réseau, aux pays en quête d’image.
Un véritable pacte d’influence
Le Maroc, le Qatar, la Mauritanie… auraient été ses principaux clients. Plusieurs autres députés sont tombés dans les filets de Panzeri : le socialiste belge Marc Tarabella et le démocrate italien Andrea Cozzolino, l’actuel président de la délégation Maghreb. Ce que l’on pourrait appeler le « cercle du 15e étage ». L’étage où siègent côte à côte sociaux démocrates italiens et belges à Bruxelles.
Au fil des PV d’audition de la police belge, on découvre un véritable pacte d’influence au profit de puissances étrangères
2023
l’Union européenne compte beaucoup pour Rabat. Et « les millions d’euros » dépensés semblent peu de chose à côté.
Voyages tous frais payés
Au fil des jours qui passent, se révèlent d’autres affaires, certes moins graves, mais qui traduisent un certain laisser-aller. Premier dévoiement : les voyages offerts par les pays tiers. Une pratique assez courante et loin d’être anodine. Le député tchèque Tomáš Zdechovský, vice-président du petit parti chrétien-démocrate tchèque KDU-CSL, a ainsi pu se déplacer en novembre au Bahreïn sans acquitter un kopeck. Un voyage très éducatif apparemment. Son projet de résolution sur le pays, rédigé pour le compte de la droite européenne (PPE), est moins attentif que celui des autres groupes politiques aux opposants.
Autre ventre mou de l’institution : les groupes d’amitié. Si nombreux qu’on n’en connaît pas toute la liste ! Et très peu encadrés. « On ne sait pas vraiment ce qui s’y passe », témoigne un habitué du Parlement
Chacun se souvient aussi des pseudo-missions d’observations électorales du député RN Thierry Mariani au Kazakhstan ou en Ouzbékistan en 2021. « Tous frais payés », là aussi, selon les dires de l’intéressé. Les pays d’Asie centrale étant spécialistes de l’arrosage tous azimuts.
BERTRAND GUAY
Ces petits arrangements jettent comme une ombre sur le travail parlementaire, très sérieux, accompli par la grande majorité des députés
Enfin, comment ne pas citer le point faible de l’institution parlementaire : la connivence, parfois très forte, entre députés, think-tanks et autres lobbys. La Française Sylvie Goulard, proche d’Emmanuel Macron, du temps où elle était députée, a perçu, en même temps, plus de 12 000 euros par mois de la fondation Berggruen… pour un contrat de consultance. Sans aucun souci. « C’était légal », a répondu l’intéressée lors de son audition à l’automne 2019.
Opération « mains propres »
Ces traditions de copinage sont fortes. Même l’actuelle présidente du Parlement européen, la Maltaise Roberta Metsola, pourtant chevalier blanc de la corruption, vient d’être prise la main dans le sac. Elle avait nommé son beau-frère Matthew Tabone comme chef de cabinet. Ce n’est qu’après révélation de cette proximité par le quotidien italien « Il Foglio » qu’elle a changé d’avis.
Même Roberta Metsola, l’actuelle présidente du Parlement, chevalier blanc de la corruption, a été convaincue récemment d’avoir nommé son beau-frère comme chef de cabinet.
LUDOVIC MARIN /